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  • Ce soir, Thalassa:Marseille vu du ciel

    Fêter les oursinades, découvrir le port de l’Estaque, moins connu que celui de César, vivre une opération maritime spectaculaire dans le port de la Ciotat... Le Bel Espoir et Thalassa font escale à Marseille et dans sa région ! Puis nous allons sous les tropiques aux Bahamas et aux Antilles, où nous cueillerons des perles bleues et vivrons le quotidien d’une île sous la cendre…

    http://www.thalassa.france3.fr/index-fr.php?page=prochainement

  • Mon bouts rimés inédit:Paysages marseillais

    Atelier d’écriture n°292

    Voici la 292è photo de l’atelier d’écriture. Une petite nouvelle par ici, puisqu’il s’agit d’une photographie de Caroline Morant. Merci à elle.

    Quelques petites règles de cet atelier d’écriture  :

    C’est un atelier hebdomadaire : le principe est d’écrire une histoire à partir d’une photographie. La fiction est à l’honneur, donc. Pas plus d’une page word.

    Les publications ont lieu chaque lundi (sauf pendant les vacances), si jamais vous avez un blog, vous vous inscrivez dans le formulaire donné ci-dessous, et si vous n’en avez pas, vous pouvez m’envoyer votre texte avant le dimanche soir. (Si vous me l’envoyez trop tardivement il ne sera en ligne que lorsque j’aurai le temps de l’ajouter.)

    Si jamais un texte ne me convenait pas pour X raisons, je ne le publierai pas et je vous expliquerai pourquoi par mail.

    http://www.bricabook.fr/2018/01/atelier-decriture-n292/

     

    Paysages marseillais

    Du Fort Saint-Jean que Cross, sous un ciel rosé, était en train d’aquareller

     Je suis partie vers la mer bleue et verte, la longeant sans me lasser

    Peut-être qu’au bout de mes pas, il y aura mon ancien rêve d’Europe, à Tanger.

    Le jour de ma première visite au MUCEM, il tombait des cordes

    C’est comme si l’eau lavait la poussière de soleil comme dans un tableau de Marquet.

    Je revenais vers la ville pour voir une exposition sur l’orientalisme à la Vieille Charité.

    Je repartais pour l’Estaque où je croisais Van Gogh qui cherchait le musée

    De Monticelli mais comme moi, il se cassa le nez car il était fermé.

    Il n’avait pas pu rencontrer Othon Friesz, par l’Estaque, aussi ensorcelé.

    Nous marchâmes ensemble en parlant des peintres qui nous avaient précédés.

    Ils étaient si nombreux à nous rejoindre dans notre tour paysagé.

    Nous croisâmes Monet qui regardait un fond de montagnes  éloigné

    Sur lequel se découpait un pin qui sur la mer  semblait se pencher.

    Charles Camoin nous salua rapidement avant de retourner à sa barque floutée.

    Nous le revîmes le soir sur le port au ciel redevenu bleu, bateaux et peuple à croquer.

    Nous décidâmes de prendre un chemin de terre vers l’Estaque  avec Renoir : couleurs rêvées.

    Assis sur un rocher, Cézanne cueillait un effet du soir avec une apparente facilité.

    Le Dufy cubiste se délectait de l’usine de l’Estaque, un monde aujourd’hui oublié

    Le fauve Lhote faisait rugir les couleurs d’un paysage naturellement ensoleillé.

    Braque s’était laissé ensorceler par le port de l’Estaque : presque un cliché.

    Je n’ai malheureusement pas pu présenter à Van Gogh Kandinsky : abstrait et coloré.

  • Je viens de terminer:La France Des Impressionistes Jardins de GivernyN° 7 du 26 octobre 2016

    Résultat d’image pour la france des impressionnistes jardins de giverny

    Découvrez le courant impressionniste d'une façon originale grâce à cette collection de Beaux Livres inédits.


    Monet, Van Gogh, Signac, Renoir... A l'arrivée du chemin de fer, ces peintres audacieux ont décidé de quitter leurs ateliers pour puiser leurs inspirations à travers la France.

    Au fil des numéros, voyagez sur les traces des impressionnistes, revivez leurs parcours, et partez à la rencontre des plus beaux paysages de France.

    Suivez l'itinéraire proposé dans vos livres ou flânez selon vos envies. Le Café le soir, La Nuit étoilée, Les Rochers de l'Estaque... Retrouvez les paysages qui ont inspiré ces peintures et de nombreuses indications et anecdotesq pour tout savoir sur le courant impressionniste.

    http://www.journaux.fr/jardins-de-giverny_la-france-des-impressionnistes_culture_219436.html

  • Fin de:Picasso céramiste et la Méditerranée

    Picasso céramiste et la Méditerranée

    Ouvert tous les jours de 9h à 20h.

    L’exposition est présentée dans le centre d’art installé dans la belle chapelle des Pénitents Noirs. Dans les années 1950, Picasso a largement exploré la thématique de la civilisation méditerranéenne sur tous les supports, peintures, gravures, lithographies et a embrassé l’art de la céramique avec autant de génie et de vitalité que la sculpture et la peinture. L’exposition présente cent cinquante oeuvres autour de cette même thématique, certaines d’entre elles jamais rassemblées ni montrées. Plus d’info sur l’expo, en un clic.

    L’exposition Picasso céramiste et la Méditerranée est associée à l’exposition événement Le Grand Atelier du Midi. En savoir plus sur Le Grand Atelier du Midi, ici et réserver dès maintenant, là.

     

    Dufy, de Martigues à l’Estaque

     

     

    Commissariat : Joséphine Matamoros, Bruno Gaudichon. Coproduction : Communauté d’Agglomération du pays d’Aubagne et de l’Étoile, Marseille-Provence 2013.
    Partenaires projet : Printemps Marseille, Meubles lacaux
     

    Chapelle des Pénitents Noirs, centre d'Art de la ville d'Aubagne

    13400 Aubagne
     
     
  • L'atelier de Cézanne

    Une maison, un artiste

    Docu-info - Paul Cézanne - Des maisons aux couleurs de Provence

         Programmes TV Programmes TV TNT France 5 | Diffusé le 22/08/2015 à 20H00
    Docu-info - Société | 2015 | 40min. (20H00 / 20H40 )
    sur
    Auteur : Patrick Poivre d'Arvor, Isabelle Motrot
    Réalisation : Bruno Ulmer, Catherine Ulmer
    Cézanne est né en Provence et il y est mort en peignant. Deux maisons symbolisent ce parcours et en gardent les traces. La première, la bâtisse du Jas de Bouffan, grande bastide du XVIIIe siècle entourée d'un parc immense, est sa maison de jeunesse. C'est là qu'il a décidé de se tourner vers la peinture. Le Jas de Bouffan, c'est aussi la maison de famille, de l'amour maternel et des contraintes paternelles. Sans cesse, entre ses allers retours à Paris, ou à l'Estaque auprès de sa femme, Cézanne y revient. A la fin de sa vie, il fait construire sa maison atelier sur une colline, près d'un point de vue exceptionnel sur la montagne Sainte-Victoire
     
  • Cézanne à Gardanne, par Denis Coutagne

    Conservateur en chef du patrimoine, Directeur du musée Granet

    Publié le mercredi 11 janvier 2006

    Préface de l’ouvrage Gardanne, le seul village peint par Cézanne

    “Pour finir je vous dirai que je m’occupe toujours de peinture et qu’il y aurait des trésors à emporter de ce pays-ci qui n’a pas trouvé encore un interprète à la hauteur des richesses qu’il déploie”. Ainsi écrit Cézanne de Gardanne à son ami Victor Chocquet en date du 11 mai 1886, Gardanne où le peintre séjourne depuis une petite année déjà avec femme et enfant (lequel âgé de 13 ans est inscrit à l’école). De fait Cézanne passe plusieurs mois à Gardanne (année 1885-1886), au médian de sa vie d’homme et de peintre. Sur le plan humain, on sait qu’il traverse alors une crise passionnelle dont l’enjeu nous échappe (la femme pour laquelle le peintre éprouve une passion ne nous est pas connue). Gardanne paraît lui assurer le repli et la tranquillité voulue.

    Sur le plan pictural, il devient le “grand Cézanne” que nous célébrons. Dans les années qui précèdent, il vient d’apprendre à l’Estaque à dépasser l’impressionnisme dont il a voulu partager un temps les enjeux. Mais à l’Estaque il découvre de grands panoramas dominant la mer bleue de la baie de Marseille, donnant à ses compositions une force classique insoupçonnée. La couleur devient sa matière et son lieu, tant Cézanne découvre que la peinture doit se composer à partir d’elle, pour elle : “quand la couleur est à sa richesse, la forme est à plénitude” dit-il encore.

    Le temps de Cézanne à Gardanne est un temps relativement circonscrit mais Cézanne avait besoin de ce village pour opérer un nouveau dépassement : ne rien perdre de la couleur mais composer les tableaux à partir des structurations objectives découvertes sur nature. Et voilà que le peintre donne des tableaux qui représentent un village de Provence : ni Aix, ni Peynier, ni Fuveau, ni Vauvenargues n’attireront le peintre. Gardanne seulement permet au peintre de s’inscrire dans une tradition védutiste, c’est-à-dire dans la tradition des peintres italiens attachés à révéler picturalement les villes, monuments, selon un ordonnancement classique. Ici il retient le village sur une colline vue frontalement. Trois fois Cézanne peint le village autour de son clocher : quel symbole ! L’artiste veut l’unité autour d’une architecture significative tant spirituellement que architecturalement.

    De plus il choisit trois heures différentes du jour comme pour signifier la totalité du temps. Ce ne sont pas les séries de Monet devant la Cathédrale de Rouen, mais une saisie d’un temps immobile. Comme toujours, le peintre prend du recul et se tient en vis-àvis de son motif, en l’occurrence sur la colline en face. Mais Cézanne aime les environs ainsi, il choisit un autre village, le Payannet, cette fois pour composer une toile en longueur comme une réponse à la falaise allongée que signifie Sainte- Victoire. Et voilà qu’il peint alors la montagne selon un angle de vue qu’on ne trouve qu’à cette période : la montagne semble retenir l’horizon de disparaître et ramène le paysage au devant.

    Ayant ainsi expérimenté un nouveau rapport au motif, Cézanne cherche compose encore quelques toiles au Jas de Bouffan à Aix, mais il veut des lieux plus sauvages associant à la fois l’ordre et le désordre. Château-Noir et Bibémus répondront à ces nouvelles exigences picturales. Gardanne aura marqué sans contestation possible ce moment où Cézanne devient le classique d’un art nouveau, dans la tradition de ses maîtres italiens puisqu’il entendait “faire du Poussin sur nature”.

    Lire 2006, année Cézanne à Gardanne

    http://www.ville-gardanne.fr/Cezanne-a-Gardanne-par-Denis

    Je précise que cette article n'est pas de moi (lien vers la page citée et si possible son auteur)mais que je suis auteure et que vous pouvez commander mes livres en cliquant sur les 11 bannières de ce blog

  • Mon texte inédit sur ce blog:Le pantalon de Paul

    Le thème de la semaine

    Dans notre promenade dans les thèmes anciens, nous avons trouvé « le pantalon de Paul. »

    Et vous qu’en ferez vous ?

    En prose ou en vers, qu’il soit déchiré ou neuf, il vous faut nous envoyer votre texte avant dimanche 26 février 2017 minuit à l’adresse habituelle :impromptuslitteraires[at]gmail.com

    impromptuslitteraires.blogspot.fr/p/le-theme-de-la-semaine.html

    Le pantalon de Paul Cézanne

    Le pantalon du petit Cézanne a couru dans tout Aix -en-Provence

    Du Cours Mirabeau où il vivait avec ses parents à l'Eglise

    Sainte-Madeleine où il a été baptisé. Quand son père ouvrit une banque

    Rue des Cordeliers, le pantalon du petit Paul fut mieux coupé, plus riche.

    Au collège, le pantalon du petit Cézanne rencontre celui d'Emile

    Avec lequel il forme deux paires d"Inséparables." Un jour Paul défend Emile.

    Le lendemain, Zola offre à Cézanne un panier de pommes, un motif du peintre.

    A l'école de dessins d'Aix-en-Provence, le pantalon de Paul s'use.

    "Cézanne peint" et sculpte mais est aussi bon en mathématiques.

    Après avoir obtenu le bac brillamment, le pantalon de Paul épouse

    Sans enthousiasme les bancs de la faculté de droit mais c'est de peinture

    Qu'il reçoit un prix. Le pantalon de Paul échappe au service militaire.

    Le pantalon de Cézanne est celui d'un athlète  souffrant et timide.

    Le pantalon de Paul s'assoit dans les couloirs du Louvre comme copiste.

    Emile Zola prend un jour la défend de Paul Cézanne dans un article.

    Le pantalon du peintre court à nouveau la campagne aixoise.

    Paul fait sauter le pantalon pour une ouvrière et modèle, Hortense.

    Le pantalon de Paul connait l'usure et les raccommodages à Auvers-sur-Oise.

    Alors qu'il est sans pantalon, Hortense lit Baudelaire à Cézanne.

    Paul mouille le bas de son pantalon à l'Estaque dont il parcourt le paysage

    A pied et à pinceaux comme le fera à Gardanne et Aix pour la Ste Victoire.

    Le bas du pantalon de Paul finira de s'user en grimpant vers la montagne

    Ou vers son atelier  où on l'a suspendu pour accentuer le pittoresque

    De la visite des paysages aixois. J'ai suivi le pantalon de  Paul vers le barrage

    De Bibémus où mon pantalon a reçu la poussière du chemin des carrières.

     

    22 février 2017

  • Casse record au musée d'art moderne de Paris

    Par Tristan Vey
    20/05/2010 | Mise à jour : 19:16 Réaction (55)

    La brigade de répression du banditisme va analyser les 5 cadres évidés de leur toile.
    La brigade de répression du banditisme va analyser les 5 cadres évidés de leur toile.

    VIDÉO - Cinq toiles de grands maîtres, dont un Picasso et un Matisse, ont été dérobées dans la nuit. Le montant estimé du butin pourrait atteindre les 100 millions d'euros

    Entre 90 et 100 millions d'euros. C'est le montant estimé des cinq tableaux de grands maîtres qui ont été volés dans la nuit de mercredi à jeudi au musée d'art moderne de la Ville de Paris (16e arrondissement). Cette estimation, communiquée par la direction du musée, est cinq fois moins importante que celle annoncée auparavant par le parquet de Paris. Quel que soit le montant exact du préjudice, c'est à n'en pas douter le plus important vol constaté dans un musée français depuis le célèbre cambriolage du palais des Papes à Avignon en 1976 où 118 toiles de Picasso avait été dérobées.

    Le scénario du casse parisien est digne d'un film policier. D'après les images des caméras de surveillance, le voleur aurait en effet agi seul, au cœur de la nuit, cagoulé et vêtu de noir. Il serait entré par effraction en passant par une fenêtre après avoir coupé à l'aide d'une pince de type coupe-boulon le cadenas d'une grille. Il aurait ensuite détouré avec précaution les toiles à l'aide d'un cutter avant de les rouler pour les transporter.

    Les cinq chefs d'œuvres dérobés sont «Le pigeon aux petits pois» de Picasso, «La pastorale» de Matisse, «L'olivier près de l'Estaque» de Braque, «La femme à l'éventail» de Modigliani et «Nature morte aux chandeliers» de Léger. Des pièces d'une très grande valeur, beaucoup trop connues pour pouvoir être revendues sur les marchés traditionnels.

     

    Le musée fermé pour la journée

     

    Le signalement et la photo des tableaux ont immédiatement été mis en ligne sur les bases de données policières dans le monde entier via Interpol. La brigade de répression du banditisme a été chargée de l'enquête et le musée a été fermé pour la journée afin de faciliter le travail des enquêteurs, a indiqué Bertrand Delanoë. Le maire de Paris s'est dit «attristé et choqué de ce vol qui est une atteinte intolérable au patrimoine culturel universel de Paris».

    Les explications de l'adjoint du maire chargé de la culture, Christophe Girard :

     

     

    Cette affaire promet de relancer le débat sur la sécurité dans les musées parisiens. En juin dernier, un carnet de dessins de Picasso estimé entre 3 et 8 millions d'euros avait en effet été dérobé au musée Picasso alors que celui-ci était en pleine rénovation.

    Pour ce qui concerne le musée d'art moderne, la Ville de Paris a annoncé que l'alarme volumétrique anti-intrusion ne fonctionnait plus dans certaines salles depuis le 30 mars et qu'elle n'avait pas pu être réparée depuis. La société prestataire n'aurait en effet à ce jour toujours pas reçu le matériel de remplacement nécessaire à sa réparation. Cela n'explique toutefois pas pourquoi le dispositif vidéo qui diffusait des images en temps réèl au PC de sécurité, qui fonctionnait correctement, n'a pas permis de donner l'alerte alors que trois agents sont mobilisés chaque nuit pour surveiller les écrans de contrôle. Pour Christphe Girard, c'est simplement la preuve que l'on a affaire à un vol d' «une sophistication extrême», une «opération de grand banditisme, du crime organisé».

     

  • Au-delà du paysage

    La chronique d'Olivier Cena Peinture 3

    Il y a quelque chose de Corot chez Carrache (1560-1609), le don de révéler l'air, de le rendre visible, de faire sentir l'agitation par le vent du feuillage des arbres. Sans doute est-ce ainsi que commence l'histoire de la peinture de paysage, par l'intérêt d'un artiste pour les feuilles d'un chêne animées par la brise - par une sensation cézannienne, en quelque sorte, la première. La nature émerveille le peintre bolognais. Jusque-là, elle inspirait de la crainte. On la domestiquait dans des jardins ordonnés. On lui donnait des allures géométriques.

    Mais l'avènement de la peinture de paysage a un prix. Le Sacrifice d'Abraham (1600), de Carrache, est avant tout le sacrifice du sujet religieux. Abraham, son fils et l'ange sont relégués dans un coin du tableau, statufiés au sommet d'une falaise. Seuls importent la végétation, la vallée sinuant jusqu'à la plaine, les montagnes dans le lointain, le vent, surtout, qui souffle de la gauche vers la droite dans les arbres du premier plan, entraînant dans le ciel bleu des filets de nuages blancs. Un arbre pris dans la bourrasque, admirable dessin du peintre, confirme cette fascination.

    Gottfried Wals, miniaturiste de Cologne émigré en Italie, avait la même passion. On sait peu de chose de lui, sinon qu'il fut le professeur de paysage de Claude Gellée, dit le Lorrain, à Naples vers 1620. On ne connaît sa peinture que depuis 1969. Les dates de sa naissance et de sa mort sont incertaines (vers 1590- 1638). Corot aurait pu peindre sa Route de campagne avec une maison (1620). Le vent y souffle par la droite. La lumière franche, italienne, est splendide. Le sujet religieux a définitivement disparu. Wals ne raconte plus rien. Il peint une route en fin d'après-midi, à l'entrée d'un village où deux personnes bavardent, tandis qu'une troisième se repose à l'ombre d'un talus, voilà tout.

    On ne sait s'il a durablement marqué l'art du Lorrain (1600-1682) - un peu, à en juger par le Paysage avec un berger (1635) ou la magnifique Vue de la Crescenza (1650), bien que l'on ne sente pas, ou si légèrement, l'air circuler dans les tableaux du Français. L'affaire du Lorrain, c'est avant tout la lumière. C'est elle qui circule. En cela, il séduit - surtout, comme chez Turner, lorsqu'elle est aussi évidente que celle d'un coucher de soleil sur la mer. Le Lorrain éblouit. A ses côtés, Poussin (1594-1665) paraît terne. Ses méchantes bacchanales, où le vent anime pourtant en arrière-plan les bosquets, pèsent. Au mieux, il atteint, comme Cézanne, une gravité légère. Une lumière savante (ou, comme au théâtre, un éclairage) structure le paysage inventé. Poussin compose. Ce n'est pas tant la nature qui l'intéresse que son ossature et ses couleurs. Dans le merveilleux Paysage avec saint Jean à Patmos (1640), où Jean, simple figurant, ne semble là que pour le jaune de sa toge, le paysage du premier plan (les arbres, la rivière, les ocres et les verts du sol) paraît peint par Courbet ; le fond, une majestueuse Sainte-Victoire se reflétant dans la calanque de l'Estaque visible au-dessus des toits de tuiles, par Cézanne. Poussin ne peint pas le paysage, il peint la peinture - ou, comme le disait Picasso, « il surpasse la nature ». A peine le genre est-il né qu'il se place au-delà. Et cet au-delà, comme l'histoire de la peinture de paysage elle-même, semble infini. C'est pourquoi les nombreux jeunes artistes qui s'essaient aujourd'hui au paysage, souvent trop empêtrés dans le modèle photographique, devraient toujours s'en inspirer.

     

    | Jusqu'au 6 juin | Grand Palais, Paris 8e | Tél. : 01-44-13-17-17.

    Olivier Cena

    Telerama n° 3195 - 09 avril 2011
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  • Les grévistes de la SNCM empêchent l'accostage d'un paquebot Costa

     

    Le <i>Costa Pacifica.</i>

    Le Costa Pacifica.

    Le mouvement social vise à pousser le gouvernement à chasser Transdev (66 % du capital), hostile au plan de redressement de la société.

    Il aura suffi d'une cinquantaine de grévistes de la SNCM pour empêcher le paquebot Costa Pacifica et ses 3000 passagers d'accoster dimanche matin à Marseille, étape d'une croisière en Méditerranée les menant de Barcelone à Savone (Italie). Face à ces salariés CGT occupant le quai, et au vu de conditions météo peu favorables, le navire a envisagé un repli vers le port de l'Estaque. Il a fini par choisir une solution plus rocambolesque, s'immobilisant dans la rade et faisant débarquer 700 passagers... dans des chaloupes. C'est la procédure en vigueur par gros temps.

    «À travers cette action, nous voulons montrer notre détermination, souligne Yann Pantel, délégué CGT de la SNCM.Au cinquième jour de grève, les navires de la compagnie, au cœur d'un imbroglio politique, économique et social, sont toujours bloqués à quai en Corse et sur le continent.«Les personnels sont excédés, nous voulons des réponses de l'État, faute de quoi nous allons encore monter en puissance.» La grève a été reconduite à «l'unanimité» par les marins CGT réunis en assemblée générale l'après-midi, juste après la libéralisation de l'accès au port. Le mouvement social vise à pousser le gouvernement à chasser Transdev (66 % du capital), hostile au plan de redressement de la société.

    Si les grévistes s'en prennent aux croisiéristes, c'est que ce marché est en pleine croissance à Marseille, à l'inverse du trafic du port de commerce. L'an dernier, la Cité phocéenne a passé le cap du million de croisiéristes et vise 1,5 million de passagers à l'horizon 2015.

    Cette activité, qui apporte 160 millions d'euros de retombées économiques à Cité phocéenne, est soutenue par la croissance des deux champions du secteur: Costa Croisières et MSC Croisières. Leur produit vedette? La semaine de croisière en Méditerranée. Pour l'unique escale française, le port de Marseille est la meilleure option, devant celui de Toulon. C'est pourquoi les croisiéristes n'ont pas hésité à investir conjointement 6 millions d'euros dans leur terminal marseillais, afin d'améliorer l'accueil des passagers. L'an dernier, la ville s'est classée au sixième rang des étapes de croisière en Méditerranée derrière des villes comme Barcelone, Venise ou Le Pirée.

    Les cégétistes de la SNCM ne sont pas les seuls à saliver devant ce succès. L'an dernier, leurs collègues dockers ont menacé de bloquer les terminaux de croisières, car ils souhaitaient étendre leur monopole du transport de marchandises à celui de la manutention des bagages de touristes. Avec le MuCEM, les grèves au port pourraient devenir une des attractions culturelles majeures de Marseille pour les croisiéristes...

  • Nous avons aimé cet après-midi:Le château de Vauvenargues

    Picasso. Métamorphoses.
    Le château de Vauvenargues.
    25 mai-27 septembre 2009

     
    de l’atelier Cézanne et des carrières de Bibémus en 2006, l’ouverture
    au public du château de Vauvenargues pendant le déroulement
    de l’exposition marque sans aucun doute l’originalité profonde de ce projet
    et le désigne comme un événement unique. Le château de Vauvenargues,
    par son histoire et celle de ses propriétaires, est en effet un des fleurons
    du patrimoine aixois. Il y a cinquante ans en 2009, Picasso s’y installait,
    après l’avoir acheté en septembre 1958. Même s’il ne l’a occupé que pour
    une période relativement courte, il y a produit des oeuvres dont la grande
    originalité porte la marque de ce séjour. Il crée là un style caractérisé
    par des formes et des couleurs propres à exprimer ce bonheur de peindre
    auquel il veut, plus que jamais, se consacrer exclusivement...
     
    Chateau de Vauvenargues - Expo Picasso Aix 2009

    Entre le village de Vauvenargues et la montagne Sainte Victoire,le château où Picasso repose semble surveiller l’entrée de la vallée.

    Classé monument historique en 1929, son histoire remonte aux comtes de Provence.

    Le Chateau de Vauvenargues - Demeure de Pablo Picasso proche d'Aix en Provence
    Un lieu d’histoire

    Flanquée de deux tours du XIVe siècle et entourée d’une enceinte du XVIe siècle, la propriété appartenait en 1257 aux archevêques d’Aix. Son histoire, liée à celle de la Provence, passe par le roi René en 1473, qui cède ensuite sa terre à son médecin Pierre Robin d’Angers.

    Les familles de Cabanis, de Jarente et de Séguiran sont propriétaires du château jusqu’en 1548, date à laquelle, par le mariage de Marguerite de Séguiran et de François de Clapiers, il passe aux Clapiers.
    Sous l’impulsion d’Henri de Clapiers, seigneur de Vauvenargues, premier consul d’Aix et procureur du Pays de Provence en 1674, d’importants travaux modifient la place forte médiévale du château et lui donnent sa configuration actuelle,
    prenant assise sur l’affleurement du piton rocheux ainsi que sur les fortes murailles qui seront conservées.

    En 1722, Joseph de Clapiers voit ses terres érigées en marquisat pour services rendus pendant la Grande peste de 1720. Et c’est le troisième marquis de Vauvenargues qui vend le château en 1790 à la famille des Isoard, dont les blasons sont toujours visibles aujourd’hui sur les remparts et les façades de l’édifice. A l’intérieur, dans un salon encore tendu de velours, demeure le portrait du cardinal d’Isoard.

    En 1943, le domaine est vendu par Simone Marguerite d’Isoard Vauvenargues à trois industriels marseillais. Il est ensuite transformé en colonie de vacances pour les enfants des personnels de la marine marchande (quelques aménagements parasites demeurent de cette période), puis vendu en 1954 à la société civile
    Société agricole du domaine de Vauvenargues.

    Picasso et le château

    En septembre 1958, l’histoire du château rejoint celle du monde de l’art… Picasso acquiert la propriété et son domaine.
    Et l’on sait l’anecdote du peintre téléphonant à son marchand Kahnweiler :
    - "J’ai acheté la Sainte Victoire de Cézanne".
    - "Laquelle ?" lui demande son correspondant en pensant à un tableau.
    - "L’originale" répond Picasso.
    Picasso ne s’installe dans le château qu’au début de l’année suivante. Il ne s’agit alors pas d’un lieu de villégiature mais bien d’une installation pérenne que souhaite l’artiste pour échapper à une vie sociale trop prenante et au développement urbain de Cannes où il habite dans sa villa de La Californie, sur les hauteurs de la Croisette.

    Même si les conditions de confort resteront toujours très rudimentaires (il fait néanmoins installer le chauffage central), ce refuge doit pouvoir lui permettre d’accueillir l’ensemble de ses collections, parmi lesquelles figurent trois chefs-d’oeuvre de Cézanne, une Vue de L’Estaque, Le Château Noir et des Baigneuses.

    La plus grande partie de ces tableaux est accrochée sur les antiques murs du château.

    Il déménage encore sa collection de sculptures en bronze qui se trouve alignée sur la terrasse,
    devant la façade du château, ou dans le corridor d’entrée. Ses propres oeuvres, ses livres, arrivent par centaines et des caisses entières sont stockées dans le château.

    Picasso occupe véritablement la propriété sur une période relativement courte et par intervalles entre janvier 1959 et juin 1961. Mais Vauvenargues demeure un des hauts lieux de l’oeuvre parce que chacun des tableaux peints là en porte la marque indélébile.

    A quatre-vingt ans, il dédie le domaine à sa jeune épouse Jacqueline, en peignant le portrait Jacqueline de Vauvenargues, nouvelle maîtresse des lieux.

    C’est chronologiquement d’abord un énorme buffet noir acheté par le peintre qui va devenir un élément essentiel de cet univers de Vauvenargues. Pas moins de sept versions, dont de grands formats, chantent les formes bizarres de ce meuble.

    "Une cochonnerie Henri II, rien de plus. Mais comme c’est beau !" dira Picasso. Ce buffet est encore en place dans le château. En s’installant à Vauvenargues, Picasso, privé de son Espagne natale à cause de la dictature franquiste, retrouve au pied de Sainte Victoire les paysages austères de son enfance.

    Les tableaux qu’il peint durant cette période sont empreints de la nostalgie de son pays. Les rouges, les jaunes, les verts, couleurs caractéristiques de l’Espagne, dominent ses toiles, notamment la série des natures mortes avec pour objet principal une mandoline achetée en Arles, encore aujourd’hui accrochée au mur de la salle à manger du château.



     
    Atelier Peinture Picasso
    Château Picasso - Chateau de Vauvenargues
       
    Atelier Picasso - Chateau de Vauvenargues
    Sculptures château Picasso - Chateau de Vauvenargues
    Intérieur château Picasso - Chateau de Vauvenargues
    copyright © Succession Picasso 2009  

    http://www.avignon-et-provence.com/exposition-picasso-aix/picasso-aix/chateau-de-vauvenargues.htm

  • LE HAVRE : Musée Malraux:Othon Friesz, le fauve baroque”

    5bb37ebe24e53ea11700c1d837ac46c1.jpgEmile Othon Friesz
    "Paysage à la Ciotat "
    Huile sur toile -1907
    © Coll. Part.
    © ADAGP

    Achille-Emile Othon Friez est né au Havre le 06 février 1879. Fils de capitaine, son rêve de jeunesse était de devenir un grand navigateur. Mais il s'intéresse aussi à l'art. Il suit les cours de Charles Lhuillier à L'Ecole Municipale des Beaux Arts du Havre au côté de Georges Braque et de Raoul Dufy. Il parvient à obtenir une bourse en 1897 qui l'amène à suivre les cours de Léon Bonnat à l'Ecole des Beaux Arts de Paris.
    Mais l'académisme des beaux arts ne lui convient pas, et il préfère découvrir et étudier l'oeuvre des maîtres dans les salles du Musée du Louvre.
    C'est l'impressionisme qui l'intéresse, mais aussi les oeuvres de Vincent Van Gogh et de Paul Gauguin. Le Salon d'Automne de 1905, lui permet de présenter quelques toiles auprès de Matisse et de Marquet, et de se faire connaître avec ses aplats de couleurs vives et juxtaposées qui font dire aux critiques que ces peintres donnent l'illusion d'être dans une cage aux fauves. C'est en effet le début du fauvisme, dont Othon Friesz sera l'un des plus brillants représentants.

    Il était au premier plan alors parmi les jeunes peintres qui se révoltaient contre les maîtres académiques, mais en marquant son attachement à l'impressionnisme. Durant l'été 1906, avec son ami Georges Braque, il fait un séjour à Anvers, en travaillant sur des sujets communs. Ils poursuivent cette expérience l'année suivante en se rendant dans le midi de la France à l'Estaque et à la Ciotat, pour travailler ensemble sur la transposition de la lumière, comme l'avaient fait avant eux Matisse et Derain à Collioure en 1905.
    Les couleurs de la côte méditerranéenne l'inspirent, et le conduisent à produire une série de paysages qui sont sans doute les plus représentatifs du fauvisme. En mettant en relief  le dessin, en stylisant les formes, en supprimant les détails descriptifs, certains des tableaux qu'il peint alors sont à la limite de l'abstraction. Aucun autre artiste fauve, sauf peut-être Matisse n'ira aussi loin dans l'exaltation des couleurs.
    De retour à Paris, alors que Braque travaille avec  Picasso aux premiers fondements du cubisme, Othon Friesz poursuit de son côté ses paysages, ses natures mortes, ses marines dans un naturalisme où l'influence de Cézanne domine tout en conservant l’énergie de la ligne, le goût affirmé pour les couleurs et les contrastes forts, mais avec une force chromatique qui s'estompe au fil des mois pour devenir plus austère à l'approche de la première guerre mondiale.


    Alors que ses expositions chez son marchand d'art Druet et sa participation régulière au Salon des Indépendants et au Salon d’automne à Paris, lui avaient valu une certaine notoriété avec des expositions à Moscou, à Londres à Berlin, ou à New York encore avec l’exposition Manet et les Post-impressionnistes, sa palette s’assombrit avec une dominante
    d' ocres, de bruns, de verts et de bleus plus froids, des lignes plus rigides, des formes moins attrayantes et des compositions plus traditionnelles : nus, paysages, natures mortes et portraits.

    Emile Othon Friesz "Paysage à la Ciotat " Huile sur toile -1907 © Coll. Part. © ADAGP

    Emile Othon Friesz
    "Paysage à la Ciotat "
    Huile sur toile -1907
    © Coll. Part.
    © ADAGP



    Emile Othon Friesz : " Les Baigneuses " Huile sur toile -1907 115 x 122 cm © Coll. Part. © ADAGP


    Emile Othon Friesz
    " Les Baigneuses "
    Huile sur toile -1907

    115 x 122 cm
    © Coll. part.
    © ADAGP




    Emile Othon Friesz © ADAGP

    Emile Othon Friesz
    © ADAGP


    La guerre marque en effet la période d'une production surtout orientée par la vente, davantage que par la recherche picturale qui avait été la sienne quelques années avant auprès de Braque. On peut y voir non seulement l'effet des hostilités, mais aussi la conséquence d’un mode de vie plus aisé grâce à une réputation grandissante.
    Il souhaite alors exercer le contrôle sur la vente de ses tableaux, et à ce titre romp le contrat d’exclusivité qui le liait au marchand d'art  Druet. Il s’installe avec sa jeune épouse et son enfant dans l'ancien atelier de Bouguereau et il décide d'enseigner le dessin. Il se rapproche  d’Emile Bernard et de Maurice Denis, et devient avec eux les défenseurs de Cézanne contre l'avancée de l’avant-garde cubiste.

    En 1937, il réalise la décoration du Palais de Chaillot avec son ami Raoul Dufy, et tombe peu à peu dans l'oubli par la prédominance de la peinture abstraite. Il participera sous l'occupation à une rencontre d'artistes organisée par les Allemands, ce qui lui vaudra des explications à la fin de la guerre. Il mourra à Paris le 10 janvier 1949.

    Emile Othon Friesz aura tout au long de son oeuvre tenté le pari de concilier, à la fois les principes fondamentaux que Matisse s'appliquait à mettre en  œeuvre pour chaque tableau  "équilibre, pureté, sérénité " et, d'autre part, ceux que défendaient Maurice de Vlaminck " vivre, agir et penser sans entraves ".

    Construite selon un ordre non strictement chronologique, au côté des travaux de Derain ou de Dufy, cette exposition très richement documentée, présente près de 200 oeuvres, qui permettent de suivre le parcours de Friesz, qui demeure aujourd'hui un artiste mal connu, et rend ainsi au peintre la place qu’il mérite dans l'histoire de la peinture moderne. Mais elle laisse aussi place aux arts décoratifs, avec une série de céramiques produites par l'artiste qui montrent comment il a pu agir comme l’un des artisans du mouvement de rénovation des arts décoratifs de l’entre-deux-guerres.


     Musée Malraux - Le Havre

    LE HAVRE - Musée André Malraux -
    2, Boulevard Clémenceau - 76600 Le Havre
    Tél : 02 35 19 62 62
    Ouvert : Tous les jours
    de 11 h à 18 h
    sauf mardi et  jours fériés

    Site Internet : http://www.ville-lehavre.fr

    http://www.lemondedesarts.com/ExposRegions16.htm849ec7b0351420aafb760c21dd3d8428.jpg


    Emile Othon Friesz
    © ADAGP

  • Le bonheur de peindre au soleil de la Méditerranée

    <i>Le Petit Paysan</i> de Cézanne

    Le Midi a été une source infinie d'inspiration pour les peintres. Une superbe exposition composée de deux volets présentés simultanément à Marseille et à Aix-en-Provence évoque cette terre de la modernité.

    L'exposition, présentée en deux volets à Marseille et à Aix-en-Provence, commence avec des oeuvres datées de 1880. La date n'est pas choisie au hasard. Les années qui suivirent allaient encore accentuer la désintégration du groupe impressionniste, ce mouvement qui avait jadis pris son essor dans la forêt de Fontainebleau, dans les allées du Salon des refusés, dans les brasseries et à la terrasse du café Guerbois.

    Les concepts qui s'étaient formés à ces différentes sources étaient apparus dans toute leur déconcertante nouveauté lors de la première grande exposition impressionniste de 1874. Moins de vingt ans plus tard, quand la huitième et dernière exposition fermera ses portes en 1886, Monet et ses amis vont s'éloigner sans regret, chacun choisissant alors de travailler de son côté.

    Si leur effort commun appartenait désormais au passé, une nouvelle génération entreprenait déjà de poursuivre la lutte pour des idées nouvelles. Le tournant du siècle sera donc l'histoire parallèle de deux générations: l'aînée, toujours en pleine vigueur et confiante dans ses forces, et la plus jeune, qui devait encore prouver toutes ses possibilités. Tandis que l'audace était souvent du côté des nouveaux, l'expérience restait l'apanage des anciens.

    Quelle est alors la situation? Gauguin était parti pour la Martinique, Renoir exposait ses Baigneuses, fruit de plusieurs années de recherche, Monet commençait à vendre ses toiles un bon prix. Van Gogh avait quitté Paris pour le Midi de la France où il espérait retrouver les couleurs de Delacroix, le contour net des estampes japonaises qu'il collectionnait et les paysages qu'il avait admirés dans les toiles de Cézanne. Il écrit à son frère Théo: «Au lieu de chercher à rendre exactement ce que j'ai sous les yeux, je me sers de la couleur de manière arbitraire, pour exprimer fortement mes impressions.» Comme en écho, Gauguin écrit à Vincent: «J'utilise une couleur assez loin de la nature, mais plus proche de mes sentiments.»

    <i>Le Petit Paysan</i> de Cézanne

    Le Petit Paysan de Cézanne Crédits photo : Tate, Londres, 2012

    Ce rôle primordial accordé à la couleur, en liaison avec les émotions du peintre comme composantes picturales, se reconnaîtra dans le fauvisme, ce «pot de peinture jeté à la figure du public», selon l'expression du critique Camille Mauclair. Le mouvement devra beaucoup à l'art de Van Gogh à partir de 1888, quand il quitte Paris pour Arles. Il prend le contre-pied de l'impressionnisme simplement en en inversant les termes: l'objectif de Monet, Renoir et les autres était de retranscrire sur la toile les sensations qu'ils recevaient du monde extérieur. Celui de Van Gogh, à l'inverse, sera de faire partager, via la toile, ce qu'il ressent (Champ de blé ; Vue sur Arles).

    La rétrospective de Vincent au Salon des indépendants de 1905 sera une révélation pour les jeunes peintres fauves qui adhèrent à l'autonomie de la couleur: Matisse et Derain, qui travaillent ensemble à Collioure, exécutent les premières toiles aux couleurs pures, puissantes, stridentes mises en contraste les unes avec les autres (Derain, Les Faubourgs de Collioure). Friesz et Braque, qui se retrouvent durant l'été 1907 à La Ciotat et à l'Estaque (Friesz, Cassis). Dufy, qui adhère au groupe dès 1905 (Paysage de Provence). Comme Van Gogh,

    Gauguin va s'opposer au flou de l'impressionnisme en introduisant des aplats de couleurs vives qui, par leur simplification, influenceront à la fin du siècle le mouvement nabi (Bonnard, Le Cannet) puis se retrouveront dans le jeu abstrait des formes et des couleurs. A cette révolution par la couleur s'oppose la révolution par la forme qui découle de la leçon de Cézanne, considéré avec Van Gogh comme le père tutélaire de l'art moderne. Ils se répondent lorsque l'on aborde la question débattue en peinture depuis le XVIIe siècle et toujours présente dans les préoccupations des artistes: la ligne est-elle plus importante que la couleur? Ce qui revient ici à s'interroger sur la manière dont les peintres modernes ont regardé tantôt du côté de Van Gogh, tantôt du côté de Cézanne pour trouver leur propre voie.

    «Je n'en suis qu'au début de mes recherches», disait Cézanne, deux ans avant sa mort

    La <i>Vue de Bordighera </i>de Monet

    La Vue de Bordighera de Monet Crédits photo : © Hammer Museum, Los Angeles

    Cézanne reprochait au mouvement impressionniste de réduire le rôle de l'artiste à la pure vision matérielle, de gommer la part de l'intelligence créatrice en faisant de la peinture un art imitatif. Il apparaîtra vite comme le principal maillon entre l'impressionnisme et la peinture du début du XXe siècle. Pour lui, la toile du peintre n'est plus le lieu où l'on simule une représentation de l'espace à l'aide de la perspective mais un domaine d'expérimentation basé sur la forme, le fractionnement des points de vue et des couleurs modulées en harmonie: «Quand la couleur est à sa richesse, la forme est à sa plénitude», affirmait-il.

    En organisant en 1895 la première rétrospective de l'oeuvre du peintre, le galeriste Ambroise Vollard déclenche un formidable mouvement d'opinion envers Cézanne. Les peintres sont bien sûr les premiers à comprendre que l'artiste est une référence. Matisse le considère comme «une sorte de bon Dieu de la peinture»; toute sa vie il refusera de se séparer d'une petite toile de Cézanne représentant des baigneuses, dont il disait: «Cette oeuvre m'a soutenu moralement dans les moments critiques de mon aventure d'artiste ; j'y ai puisé ma foi et ma persévérance.»

    <i>Le Faubourg de Collioure</i> de Derain

    Le Faubourg de Collioure de Derain Crédits photo : Collection Centre Pompidou, Dist. RMN-Philippe Migeat

    Et Picasso, indigné par un visiteur qui essayait de lui vendre un faux Cézanne, s'était exclamé: «Si je connais Cézanne? Il est mon seul et unique maître. Vous pensez bien que j'ai regardé ses tableaux... J'ai passé des années à les étudier.» L'ascendance cézanienne est en effet manifeste dans Le Nu bleu de Matisse comme dans Les Demoiselles d'Avignon de Picasso. Le peintre d'Aix aura contribué à mettre les artistes sur la voie du cubisme. Dans l'histoire de l'art, Cézanne est l'un des seuls maîtres qui rassemble autant de jugements et d'hommages des plus grands peintres de son temps comme des plus grands de ses successeurs. A la fin de sa vie, pourtant, Cézanne disait qu'il n'en était qu'au début de ses recherches! Un hommage posthume lui sera rendu au Salon d'automne de 1907: au-delà des fauves, des cubistes, de Picasso, de Matisse, de Bonnard, la plupart des peintres abstraits le prendront à leur tour pour référence.

    Dès 1892, les peintres sont les premiers à s'installer à Saint-Tropez

    Longtemps, les peintres qui faisaient le traditionnel «tour d'Italie» pour parfaire leur formation avaient traversé le sud de la France sans s'y arrêter. A partir des années 1880, le Midi sera au contraire leur terre d'élection. Séduits par les paysages, fascinés par la lumière, ils se réuniront le long du littoral, de Collioure à Saint-Tropez, qu'on ne pouvait alors atteindre qu'en bateau. Installé en Arles, Van Gogh, qui avait rêvé du Midi en homme du Nord, pensait avoir découvert un monde nouveau. C'est lui qui décrira en poète ce Midi que tous les peintres ont alors aimé: «Ici, même en fortifiant toutes les couleurs, y compris le rayonnement de soufre pâle du soleil et le bleu admirable de la coupole du ciel, on obtient encore le calme et l'harmonie. Il arrive quelque chose de semblable avec la musique de Wagner: bien qu'exécutée par un grand orchestre, elle n'en est pas moins intime.»

    Le Grand Atelier du Midi, musée Granet, place Saint-Jean-de-Malte, Aix-en-Provence et musée des Beaux-Arts, palais Longchamp, 2, rue de la Charité, Marseille, du 13 juin au 13 octobre 2013.

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  • Vincent Van Gogh. La Couleur à son zénith

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    1 – Vincent Van Gogh. La Couleur à son zénith 
    « Un soleil, une lumière (…). Que c’est beau le jaune ! » Vincent Van Gogh


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    2 – Paul Gauguin. L’Alchimie de l’ailleurs 
    « La couleur pure ! Il faut tout lui sacrifier. » Paul Gauguin


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    3 - Claude Monet. Une impression de lumière 
    « Il faut beaucoup travailler pour arriver à rendre ce que je cherche : l’instantanéité. » Claude Monet


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    4 - Johannes Vermeer. Peintre de l’intime 
    « Vermeer a peint jusqu’au silence rayonnant qui émane des choses amies, jusqu’à l’accueil qu’elles vous font. » Elie Faure


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    5 - Léonard de Vinci. Les Secrets d’un génie 
    « Les détails font la perfection, et la perfection n’est pas un détail. » Léonard de Vinci


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    6 - Paul Cézanne. Penser avec un pinceau 
    « Les tableaux faits à l’intérieur, dans l’atelier, ne vaudront jamais les choses faites en plein air. » Paul Cézanne


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    7 - Edgar Degas. En compagnie des femmes 
    « Le dessin n’est pas la forme, il est la manière de voir la forme. » Edgar Degas


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    8 - Pierre Paul Rubens. Le Baroque à son apogée 
    « Aucune entreprise, pour vaste qu’elle soit dans son envergure et diversifiée dans son sujet, n’a surpassé mon courage. » Pierre Paul Rubens


    Pierre Paul Rubens, érudit humaniste, collectionneur d’art et diplomate, personnifie l’apogée de la peinture baroque. Ses toiles empreintes de couleur, de mouvement mais aussi de plaisir et de sensualité, sont encore aujourd’hui une source d’inspiration. Rubens et son atelier auraient produit plus de 2 000 tableaux, des œuvres monumentales aux thèmes religieux, mythologiques ou historiques.

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  • À Varengeville, l'amour Braque

     CULTURE Arts Expositions

    Braque dans l'atelier de sa maison de Varengeville

    Braque dans l'atelier de sa maison de Varengeville Crédits photo : Robert DOISNEAU/ Gamma-Rapho

    REPORTAGE - Disparu il y a cinquante ans, le peintre cubiste fera l'objet à la mi-septembre, au Grand Palais, d'une grande et spectaculaire rétrospective ­- la première depuis 1973. Dans le petit village normand où il a vécu et travaillé jusqu'à sa son dernier souffle, personne ne l'a oublié.

    La Bentley. Tout le monde à Varengeville-sur-Mer se souvient de la Bentley de Georges Braque. Grise et noire. Il raffolait du gris, Braque, et des voitures. Un temps, il eut même des Alfa Romeo rouges qu'il repeignait dans cette couleur. A Varengeville, située à 12 kilomètres à l'ouest de Dieppe, en Seine-Maritime, la Bentley était conduite par un chauffeur en livrée qui l'amenait en réparation au garage Blondin, à l'entrée du village. Le garage est toujours là, ainsi que la maison du «patron», comme l'appelait Jean Paulhan, à l'autre extrémité, au bord d'un chemin qui porte aujourd'hui le nom de Braque, connu autrefois sous la désignation de chemin communal numéro 22.

    Braque a façonné Varengeville comme Varengeville a modelé sa palette. Ils ont fini par se confondre, sous le même ciel, au bord des hautes falaises blanches et de la mer qui se dérobe au-delà des champs et des valleuses. Il y fit construire sa maison en 1929 et, jusqu'à sa mort en 1963, y passa la moitié de l'année. Trente-quatre années de travail, de marche, de fêtes en famille ou avec les amis: Miró, de Staël, Prévert, Char, Renoir (le cinéaste) et même Picasso.

    A Varengeville, il y avait la Bentley, mais aussi la Simca Grand Sport cabriolet. «Braque, se souvient Guy Blondin, le fils du garagiste qui entretenait les voitures du maître, il ne faisait de mal à personne. Il faisait son petit machin de son côté.»«Le petit machin», c'est-à-dire son œuvre de géant de la peinture moderne. Braque ne détestait pas les pointes de vitesse.

    La Bentley et la Simca Grand Sport s'arrêtent devant un portail bleu recouvert de mousse verte. La demeure de Braque ne se voit pas. Elle tourne le dos au regard, est enfouie sous la frondaison des arbres à travers laquelle passe un pinceau de soleil. La végétation dense recouvre la maison rectiligne de briques et de ciment, au toit de tuiles. Les herbes folles poussent dans le jardin. La propriété est inhabitée depuis la mort du peintre et de son épouse, Marcelle. Conçue selon une idée de Georges Braque - il la voulait simple, épurée -, d'après les plans de l'architecte d'origine américaine Paul Nelson, autre habitant de Varengeville. Sur une photographie de Mariette Lachaud, la gouvernante de la famille Braque, mais surtout une remarquable photographe, on voit Braque assis, entouré de Paul Nelson et des ouvriers du chantier. Braque n'a jamais oublié que son père était à l'origine peintre en bâtiment.

    Les falaises que Monet avait peintes naguère

    A côté de la demeure principale se trouve l'atelier avec sa verrière. Il y a encore quelques années, les enfants de Varengeville ou les admirateurs pouvaient y pénétrer et ramasser quelques pigments. Restent les troncs d'arbres émondés sur lesquels il aimait poser les blocs de craie qu'il travaillait, sculptait. Né à Argenteuil en 1882, Braque a passé toute son enfance au Havre avant de venir à Paris, de faire escale dans le Sud fauviste, d'être blessé à la tête à la guerre de 14 avec le grade de sous-lieutenant (cette proximité avec la mort si déterminante) et de s'implanter dans le pays de Caux, royaume de la craie, de la glaise, fouetté par une mer verte, grise, laiteuse selon les saisons. Il suffisait à Braque de sortir de chez lui, de traverser la route départementale, d'emprunter une sente herbeuse pour rejoindre la route de l'église, avant de descendre le sentier qui longe le presbytère, de passer devant la cabane du douanier peinte par Monet pour atteindre la gorge des Moutiers et la mer.

    Le «Grand intérieur à la palette», de 1942.

    Le «Grand intérieur à la palette», de 1942. Crédits photo : Photo Hicket-Robertson, Houston. The Menil Collectio,; Houston (c) Adagp, Paris 2013

    C'est un homme du grand air, un promeneur, un cycliste. Plus jeune, il arpentait à vélo les environs du Havre. Marcher, pédaler, se concentrer. Tous les témoins ont été fascinés par l'intensité de son regard comme s'il s'abîmait dans le paysage. «Braque était enraciné dans la terre», écrit son remarquable biographe, Alex Danchev, auteur de Georges Braque, le défi silencieux.«Je travaille avec la matière et non pas avec des idées»,justifiait-il. Ou comment être cubiste et paysan. La nature qu'il avale, digère dans le sillage de la baleine Moby Dick, une de ses grandes lectures. Du Normand, il a le goût du silence, de la spiritualité et la méfiance de l'engagement politique, des idéologies flamboyantes.

    Etre à l'unisson de la nature bien plus que la copier

    La terre de Varengeville, cette campagne à la mer, est cisaillée par quatre gorges qui s'ouvrent sur la Manche: Les Moutiers, Vasterival, Le Petit Ailly et Mordal. A l'entrée de l'une d'elles, un panneau d'interdiction de stationnement «sauf pêcheurs, artistes peintres, cinéastes professionnels».Avant la Seconde Guerre mondiale, les pêcheurs laissaient leur doris sur les galets, ces fameuses barques qui serviront de modèle à Braque. «Braque peint ses barques hors de toute présence humaine, le plus souvent échouées sur des galets, au pied des falaises crayeuses, devant des mers sombres et des ciels d'orage», écrit l'historien d'art Edouard Dor. On dirait en effet des morceaux de bois brûlé, des spectres. Braque sort son carnet, fait quelques croquis - il ne peint pas sur le motif. Il a une fascination pour le minéral. Aller au-delà des apparences, atteindre l'arête, la part sombre et dérobée de chacun, de chaque chose. Il a toujours aimé l'art étrusque. Et sur le mur d'enceinte de l'église Saint-Valéry qui domine la gorge des Moutiers, sa phrase qui sert presque de mot d'ordre pour le cinquantième anniversaire de sa mort:«J'ai le souci de me mettre à l'unisson de la nature, bien plus que de la copier.»

    Braque ne se limite pas à Varengeville, il va dans les villages alentour, à Saint-Aubin-sur-Mer (la plage de Saussemare), à Veules-les-Roses.«Il récupérait de grands galets, se remémore le galeriste Quentin Laurens, son héritier et filleul de sa femme Marcelle. On allait déjeuner au restaurant mais on allait également pique-niquer.»

    La mer mais aussi les champs. Sur les photographies de Mariette Lachaud - où l'on découvre un Braque intime, inédit -, exposées cet été à la mairie de Varengeville avant de rejoindre le Grand Palais, on le voit assis sur une charrue, l'air joyeux.«Il aimait les agriculteurs,affirme Yves Sagaert qui se souvient de Braque venant à la ferme de son père Norbert chercher du lait.De sa maison, il avait une vue magnifique sur la plaine.» Cette grande plaine du pays de Caux, royaume des oiseaux, des corbeaux, autre motif de Braque.

    De grands oiseaux volaient dans l'atelier de Braque

    Son lait, il allait le chercher aussi chez Paul Lavenu, son voisin, garde champêtre redouté, dont le képi et la haute taille lui donnaient une ressemblance avec le général de Gaulle. Sa femme s'appelait d'ailleurs Yvonne. Paul Lavenu entretenait le jardin de Braque:«Le samedi, Mme Braque emmenait tante Yvonne au marché de Dieppe dans la Bentley», se souvient Véronique Fredou, nièce des Lavenu, qui montre un fauteuil en osier au liseré rouge ayant appartenu aux Braque, offert à son oncle et sa tante. «J'ai des cartes postales de Mme Braque qu'elle envoyait avant leur arrivée à Varengeville. Elle utilisait le mot “maître” pour parler de son mari. Et s'assurait que le jardin était bien entretenu. “Le maître demande si Paul a bien planté les graines.”»

    Quand on interroge les Varengevillais sur le peintre, ils répondent en chœur: «Un homme discret.»«Il était assez secret, le père Braque, se rappelle Michel Viandier dont le grand-père, Louis, a construit la maison du peintre, voire un peu distant.»«On voyait surtout Mme Braque dans Varengeville, affirme Danièle Martin, infirmière retraitée. Elle était très généreuse avec les enfants de la commune.»

    Braque n'était en rien un personnage austère ou hautain.«Dans la maison de Varengeville ça rigolait beaucoup, se souvient Quentin Laurens. L'existence y était belle et simple. Le matin, Braque allumait un feu dans la grande cheminée. Je me souviens de belles flambées et de soirées au coin du feu et de la lumière orangée du salon, reflétée par un abat-jour de couleur safran. J'avais le droit aussi d'aller dans son atelier et de le regarder travailler. Il avait des oiseaux qu'il lâchait pour mieux les peindre. Il découpait et assemblait ses toiles lui-même car ses formats ne se trouvaient pas dans le commerce. C'est vrai, il aimait le silence! Mais le dimanche, par exemple, le curé, le père Lecoq qui avait de l'embonpoint, venait déjeuner. Et les fins de repas tournaient aux plaisanteries de caserne.»

    Marcelle Braque allait chaque dimanche à la messe. Elle y avait sa chaise.«Georges Braque a beaucoup fait pour la paroisse, assure le maire Patrick Boulier qui tient à ce que sa commune lui rende hommage grâce à des expositions, concerts et conférences.Il a non seulement créé des vitraux pour l'église Saint-Valéry et la chapelle Saint-Dominique, mais aussi participé à leur entretien.»

    Braque, ce n'est pas seulement un souvenir mais une sorte de saint terriblement vivant. «Je me suis souvent recueilli devant son vitrail, L'Arbre de Jessé,pour lui demander de l'aide», reconnaît le peintre Jean Renut dont la cote internationale a flambé en quelques années et qui a créé lui aussi un vitrail pour l'église, représentant le Christ sur sa croix.Je pense à Braque dix fois par jour. Quand j'avais une vingtaine d'années, je me suis même endormi une nuit devant sa tombe. Braque c'est toujours le patron!»

    Braque, enterré au cimetière marin dans le même caveau que son épouse et Mariette Lachaud. Braque, dont la tombe est veillée par un grand oiseau blanc sur une mosaïque bleue. Braque, fouetté par les très grands vents. Braque, le regard tourné selon les mots de Prévert«vers la mer étoilée, la mer entoilée»

    A lire: «Georges Braque, le défi silencieux», d'Alex Danchev (Hazan) et «Sur les barques de Braque», d'Edouard Dor (Editions Michel de Maule)..


    L'injure faite à Georges Braque

    Il est avec Picasso, l'inventeur du cubisme, mais c'est à l'artiste espagnol que la postérité a attribué la paternité du mouvement. Récit de l'une des grandes injustices de l'histoire de l'art. En présentant Braque à Picasso fin 1907, Apollinaire ne se doutait pas du dialogue créatif qui allait naître entre les deux peintres. Au moment de leur rencontre, Picasso et Braque occupaient des places très différentes dans le paysage artistique parisien. Picasso était déjà considéré comme une personnalité forte et indépendante. Des collectionneurs avaient acquis des toiles de ses périodes bleue et rose et l'intérêt qu'Ambroise Vollard, le marchand le plus clairvoyant du temps, portait à son œuvre, ne faisait qu'ajouter à son prestige. La carrière de Braque avait été moins précoce, et plus lente. Jusqu'à ses magnifiques toiles fauves exposées au Salon des indépendants de 1907 (La Baie de La Ciotat), il n'avait rien fait de particulièrement remarquable.

    C'est en 1908 que Picasso et Braque commencèrent à se voir quotidiennement, à visiter ensemble musées et expositions, à avoir de longues discussions et à se montrer leurs œuvres. Ils furent surpris de constater que leurs recherches allaient dans la même direction (Braque, Maisons à l'Estaque ; Picasso, La-Rue-des-Bois).

    Mais de quelles recherches s'agissait-il? On comprend l'ahurissement des contemporains devant ces toiles «cubistes» où Braque et Picasso semblent voir le monde à travers un miroir brisé. Les cubes eux-mêmes tendent à disparaître pour faire place à des angles aigus, à des plans stridents et brefs, à des triangles imbriqués les uns dans les autres (Braque, Joueur de mandoline). Les objets n'ont plus de contour et paraissent s'être cassés. La vision cubiste n'est plus celle de l'apparence, mais celle de l'esprit et de l'intelligence. Entre les deux artistes, les variations sont infimes: primauté de la figure humaine chez Picasso, qui cristallise la zone des visages ; obsession de la nature morte chez Braque, désireux de maintenir un contact avec la réalité. Ces grands duos permettent d'entrer dans le jeu d'échanges au jour le jour, de déceler la spécificité des démarches au sein de recherches communes, d'approcher deux tempéraments de natures contraires, qui sont allés prendre chacun chez l'autre ce dont il avait besoin pour avancer: Picasso, une aptitude à sérier les problèmes picturaux et de la rigueur ; Braque, de l'énergie et de l'imagination.

    A la déclaration de guerre, Braque dut rejoindre son régiment à Paris. Picasso l'accompagna à la gare d'Avignon. C'est là que prit fin leur dialogue de plusieurs années. Tout de suite, la plupart des écrivains et des critiques firent de Picasso le fondateur du cubisme. Pire: quand Braque était mentionné, on le citait comme simple disciple. Il aurait pourtant suffi de mettre en parallèle des toiles des deux artistes pour reconnaître leur parfaite connivence, mais les raisons de la primauté de Picasso aux yeux du public étaient évidentes: sa personnalité était plus flamboyante que celle de Braque. Tous voyaient en lui le chef de file de la peinture d'avant-garde. Ce n'est qu'après la guerre que l'on commença à comprendre le véritable rôle de Braque dans l'invention du cubisme. Daniel Henry Kahnweiler, qui fut leur marchand à tous deux, écrivit en 1920: «Dans l'élaboration du nouveau style, leurs apports à l'un et à l'autre furent étroitement entremêlés. Leur quête mentale mutuelle et parallèle a scellé l'union de deux tempéraments tout à fait différents.»

    Désormais séparés, les deux artistes continuèrent à s'informer l'un de l'autre, mais quelle différence entre Picasso, statufié de son vivant, qui transforme en or tout ce qu'il touche et Braque dont la vie, sans hardiesse, n'éclaire nullement sa peinture! Alors que Picasso a droit tous les ans à un cortège d'expositions des deux côtés de l'Atlantique, où la seule mention de son nom assure une cohorte de visiteurs, la rétrospective que le Grand Palais consacre à Braque cet automne est la première depuis près de quarante ans. Par bonheur, tout y est, ou presque, tout ce qu'on pouvait espérer, les chefs-d'œuvre et les œuvres clés. On y retrouvera la prédilection de Braque pour les intérieurs et les natures mortes, la lente et profonde réflexion qui n'a cessé de soutenir ses inventions plastiques et la sobre gravité de sa palette qui font de lui l'héritier des grands maîtres du classicisme français, de Nicolas Poussin à Paul Cézanne.

    Véronique Prat

    Grand Palais, du 18 septembre 2013 au 6 janvier 2014

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      À Varengeville, l'amour Braque

      REPORTAGE - Disparu il y a cinquante ans, le peintre cubiste fera l'objet à la mi-septembre, au Grand Palais, d'une grande et spectaculaire rétrospective ­- la première depuis 1973. Dans le petit village normand où il a vécu et travaillé jusqu'à sa son dernier souffle, personne ne l'a oublié.

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