Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Catégories : Jeux, La littérature

Un jeu littéraire de Dominique Noguez (2). Qui a dit?

Vous connaissez la plupart de ces phrases, mais savez-vous qui les a écrites ? L’écrivain Dominique Noguez vous raconte la véritable origine des plus beaux aphorismes

 

1. «Cordonnier, pas plus haut que la chaussure!»
a. Appelle de Cos
b. Boileau
c. Brumell


2. «Quand la borne est franchie, il n'est plus de limites»
a. Aristote
b. Christophe
c. Georges Pompidou


3. «Chassez la naturel, il revient au galop»
a. Boileau
b. Destouches
c. Horace


4. «La tolérance? Il y a des maisons pour ça»
a. Paul Claudel
b. Paul Léautaud
c. Jules Renard


5. «La politique est chapitre de la météorologie. La météorologie est la science des courants d'air»
a. Alphonse Allais
b. Edouard Herriot
c. Friedrich Nietzsche


REPONSES
1. Apostrophe du peintre grec Apelle de Cos à un cordonnier qui, après avoir donné son avis sur la manière dont il avait peint une sandale, se mêlait de vouloir juger une autre partie du tableau. (Rapporté par Pline l'Ancien, «Histoire naturelle», L. XXXV, § xxxvi, 85.) En latin: «Sutor, ne supra crepidam!»

2.
La phrase a effectivement été prononcée par Georges Pompidou lors d'une conférence de presse, mais elle n'est pas de lui. On la trouve dans le commentaire d'une vignette de «la Famille Fenouillard», bande dessinée de Christophe (pseudonyme de Georges Colomb, par allusion au découvreur de l'Amérique) publiée en 1893 chez Armand Colin après parution en feuilleton à partir de 1889. La vignette, située page 178 dans l'édition Armand Colin de 1947, représente les deux filles Fenouillard, Artémise et Cunégonde, en train de se crêper le chignon sur une banquise. La phrase, entre guillemets, est introduite comme suit: «Or, comme l'a dit judicieusement un auteur célèbre: «Quand la borne est franchie, il n'est plus de limites!»...» Il est très probable que l'auteur célèbre est Christophe lui-même. Cela dit, la proposition pourrait être d'Aristote ou de tout autre bon philosophe. Car elle n'est qu'en apparence une tautologie. Elle signifie que, lorsqu'on entre dans un territoire inconnu, on n'y a plus de repères. Ou que, si l'on transgresse une fois la norme, on ne se laissera plus arrêter par rien. C'est la définition de la démesure (hubris, en grec).

3.
C'est l'adaptation française par le diplomate, comédien et auteur dramatique Philippe Néricault, seigneur de La Mothe, plus connu sous le nom de Destouches (1680-1754), (1680-1754), d'un vers des «Epîtres» d'Horace (I, 10,24): «Naturam expelles furca, tamen usque recurret» ( «Tu peux chasser la nature (c'est-à-dire, ici, la végétation) à coups de fourche, elle n'en reviendra pas moins à toute allure »). Le vers de Destouches se trouve dans sa pièce «le Glorieux» (1732), acte III, scène 5. Lisette, dame de compagnie, s'adresse au Comte en lui reprochant son arrogance: «Je ne vous dirai pas: «Changez de caractère», /Car on n'en change point, je ne le sais que trop./Chassez le naturel, il revient au galop...»

4.
Prononcée par Paul Claudel, la phrase a été notée par Jules Renard dans son «Journal» le 13 février 1900. Au cours du déjeuner, Claudel parle du mal que l'affaire Dreyfus «nous fait à l'étranger». «Mais la tolérance? objecte Renard. - Il y a des maisons pour ça», gronde Claudel. Observant aussi que sa soeur Camille lit le journal antisémite «la Libre Parole», Renard écrit: «Ils éprouvent je ne sais quelle joie malsaine à s'abêtir (...). Ils ne connaissent pas le sourire de la bonté.» Sur Paul, il ajoute: «Cet homme intelligent, ce poète, sent le prêtre rageur et de sang âcre. (...) Son âme a mauvais estomac.»

5.
Cette double définition se trouve dans «Notes et maximes», recueil posthume d'inédits d'Edouard Herriot paru chez Hachette en 1961 et qu'on peut consulter à la BNF sous forme de microfiche (cote 16-Z-9567 L 1.40-MFC). On y trouve également le célèbre «la culture (...), c'est ce qui demeure dans l'homme, lorsqu'il a tout oublié».



Dominique Noguez

Le Nouvel Observateur - 2228 - 19/07/2007


Source:http://artsetspectacles.nouvelobs.com/p2228/a350323.html

Commentaires

  • Amusant et intéressant, merci!

  • Bonsoir Laura,
    Je n'aurais jamais trouvé... c'est impossible. Heureusement que tu as donné les solutions avec les explications.

    Moi je t'ai donné sur mon blog les explications pour ma liste de livre créée où j'ai mis mon recueil en photo. Mais je vois que tu as mis à ta manière une photo de tes deux livres. C'est bien aussi.

  • Merci Mesdames.

Les commentaires sont fermés.