Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Catégories : Des anniversaires

La Tate Modern turbine avec succès depuis dix ans

Lors de l'exercice budgétaire 2008-2009, on comptait ainsi 4,65 millions de visiteurs (en moyenne 13 000 par jour). Soit, pour la même période, plus que le Centre Pompidou - 3,53 millions de visiteurs - et que le MoMA - 2,8 millions. Elle est aujourd'hui la troisième attraction de Londres, après le British Museum et la National Gallery. La Tate Britain, restée dans les bâtiments de l'ancienne Tate, rive nord de la Tamise, et exclusivement consacrée aux artistes britanniques, a reçu quant à elle 1,58 million de visiteurs en 2008-2009.

Ce succès est le produit d'une conjonction de facteurs. D'abord, le bâtiment lui-même et sa situation dans un quartier de la rive sud, Bankside. L'extérieur de la colossale usine électrique construite jadis le long de la Tamise a été peu modifié, hors la création d'un balcon face au fleuve, avec vue sur la cathédrale Saint-Paul et les tours de la City. Mais l'intérieur a été intelligemment aménagé, d'une part en créant des plateaux vastes, lumineux et neutres pour les oeuvres côté fleuve, et d'autre part en faisant du Turbine Hall, haute nef désormais vidée de ses machines, le lieu d'interventions demandées à des artistes reconnus. Les Unilever Series, du nom du mécène, ont fait travailler Louise Bourgeois, Bruce Nauman, Olafur Eliasson ou Anish Kapoor. La spécificité architecturale, qui aurait pu être un embarras, a été tournée en avantage.

Autre adresse : la politique muséale que conduit Nicholas Serota, patron charismatique de la maison. Les collections permanentes sont loin d'être aussi riches que celles du Centre Pompidou et du MoMA. L'astuce est de les montrer d'une manière inattendue. Alors que ces musées préfèrent l'ordre chronologique et le classement par mouvements, ici a cours une répartition selon des notions telles que geste, matière, poésie ou nature. Les oeuvres sont supposées dialoguer plus librement. Ce principe, bien que d'une pertinence historique douteuse, séduit : parce que la Tate Modern est la seule à s'y tenir et parce qu'il donne au visiteur l'impression de flâner à sa guise et non de suivre une leçon. Avantage plus concret : les deux étages du musée sont d'accès gratuit, une exception en Europe.

FACES DE VERRE TRAPÉZOÏDALES

Une deuxième faiblesse est devenue une force. Jusqu'en 2000, les grandes expositions d'art contemporain international étaient rares à Londres et se tenaient soit dans les salles moroses de la "vieille" Tate, soit dans le triste béton de la Hayward Gallery. La Tate Modern s'est lancée dans un programme de rattrapage, en montrant tout ce qui ne l'avait pas été - ou mal - en Grande-Bretagne : Morandi, Warhol, Matisse, Picasso, Beckmann, Newman, Hopper, Kahlo, Rousseau, Kandinsky, Duchamp, Man Ray et Picabia parmi les morts ; Sigmar Polke, Bill Viola, Paul McCarthy ou Cy Twombly parmi les vivants. S'y ajoutent des expositions sur le surréalisme, l'arte povera italien ou le pop art en 2009. En octobre prochain, jouant de ce même ressort, la Tate célébrera Gauguin, qui n'a pas été vu à Londres depuis des lustres...

En une décennie, la ville a ainsi acquis un rang nouveau, l'une des deux ou trois capitales européennes de la création. On ne saurait oublier que l'action de la Tate, tout en étant déterminante dans cette évolution, est inséparable d'autres événements. L'émergence d'une génération d'artistes britanniques hyperactive - les Young British Artists, de Damien Hirst à Tracey Emin - s'est appuyée sur la puissance de la collection de Charles Saatchi, devenue Fondation Saatchi. Cette conjoncture a suscité la création en 2002 de Frieze Art Fair, foire d'art contemporain qui, après des débuts brillants auxquels les fortunes rapides de la City n'étaient pas étrangères, connaît des jours moins fastes.

Conséquence du succès, la Tate est à l'étroit dans son usine. Il lui faut une extension. Dessinée par le cabinet suisse Herzog & de Meuron, la Tate Modern Two, haute de 76 mètres, doit sortir de terre en même temps que le village olympique de l'East End. L'édifice, aux faces de verre triangulaires et trapézoïdales, sera accolé à la façade sud du bâtiment. Son ouverture doit être le moment culturel des Jeux olympiques de 2012 à Londres.

Le 6 janvier, le maire de Londres, Boris Johnson, a donné le coup d'envoi des travaux : démolir des réservoirs pour faire de la place et couler 165 piliers de soutènement jusqu'à 25 mètres de profondeur. Le coût est estimé à 215 millions de livres (247 millions d'euros). Pour l'heure, la Tate n'en a que le tiers, 76,5 millions de livres, dont 50 viennent du gouvernement, 7 de la London Development Agency et le reste du privé. Mais autorités et financiers n'ont pas oublié que l'investissement initial de 137 millions de livres en 2000 fut amorti dès la deuxième année. On estime aujourd'hui à 100 millions de livres la contribution annuelle de la Tate Modern à l'économie londonienne.

Le hall de la Tate Modern en 2000, peu après la reconversion de l'ancienne centrale électrique en musée.
AFP/HUGO PHILPOTT
Le hall de la Tate Modern en 2000, peu après la reconversion de l'ancienne centrale électrique en musée.

Vos réactions
  Je trouve qu’à Beaubourg il y a bcp plus de choses à voir c’est sur. A la Tate Modern il y a la ’déco’ sur un immense mur avec tous les différents mouvements de peinture qui me plait bcp. Les tarifs... je ne sais pas. Je vais à Londres ces jours ci et la Tate Modern ne me tente pas trop; il y a à Londres des galeries qui m’interessent davantage  
Philippe Dagen et Marc Roche

http://www.lemonde.fr/culture/article/2010/05/03/la-tate-modern-turbine-avec-succes-depuis-dix-ans_1345940_3246.html#xtor=EPR-32280229-%5BNL_Titresdujour%5D-20100504-%5Bderoule%5D&ens_id=1346004

Les commentaires sont fermés.