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Catégories : Des femmes comme je les aime

Celle que Matisse a peinte jusqu'à sa mort

Née en Russie en 1910, Lydia Delectorskaya était à Nice en 1932 quand elle trouva un emploi chez les Matisse. Elle fut dame de compagnie, garde-malade, assistante, mais surtout modèle de Matisse qui fit d'elle des centaines de dessins, et quelque 90 tableaux.

Certains font partie du meilleur de Matisse. Comme son portrait de 1942 où le visage est divisé en deux verticalement, bleu puis jaune - une adaptation radicale. Ou le Portrait de Madame Matisse à la raie verte, un des tableaux qui rendirent l'artiste célèbre en 1905. Ou encore Le Rêve, nu fameux du printemps 1935, accord des courbes roses de la peau et d'un quadrillage bleu suggérant un couvre-lit. "Je cherche, écrit Matisse, à introduire un deuxième ton dans ma surface qui ne la divise pas. J'ai déjà trouvé pour le bleu - il me reste à chercher le rose..."

Lydia fut une source d'interrogations pour un peintre sexagénaire, qui avait encore l'humilité de questionner son art. Matisse peint Lydia vêtue d'une blouse roumaine - au Cateau-Cambrésis, les vêtements originaux sont exposés dans des vitrines -, en caftan ottoman, en corselet très décolleté...

Correspondance amicale

Nue aussi, mais pas nécessairement : ce qui fascine le peintre, c'est moins le corps que les arabesques qu'il lui inspire. C'est un festival de courbes et de contre-courbes, de déformations. La beauté de Lydia en est parfois égratignée ; celle du dessin, jamais.

L'autre intérêt de l'exposition réside dans la documentation : ses lettres et des photographies d'Henri Cartier-Bresson et Hélène Adant, les fameux mots doux dessinés par Matisse, mais aussi une correspondance souvent amicale, parfois complice, avec Dominique Szymusiak, la pétulante directrice du musée du Cateau-Cambrésis.

"A l'origine, les élus du Cateau étaient venus en délégation à Nice pour demander à Matisse l'autorisation de donner son nom à une école de sa ville natale, explique-t-elle. Matisse était d'autant plus touché que son projet de donation à la ville de Nice était dans les limbes de l'administration locale."

Ils avaient aussi amené des reproductions de ses oeuvres, que l'un d'eux lui demanda de signer. Matisse répondit : "Je ne signe pas de reproductions. Mais si vous me trouvez un espace, je vous donnerai des originaux." Ainsi est né le musée. Lydia fut chargée par le maître de vérifier que tout se passait au mieux, ce qu'elle fit avec la passion et la rigueur que, quatorze ans après sa mort, en 1996, tous ceux qui l'ont connue tiennent à rappeler.


 

Lydia D, muse et modèle de Matisse, au musée départemental Matisse, Palais Fénelon, 59 360 Le Cateau-Cambrésis. Tél. : 03-27-84-64-50. Tous les jours sauf mardi, de 10 heures à 18 heures, jusqu'au 30 mai. Entrée 4,50 €. Catalogue 224 p., 39 €. L'exposition sera ensuite présentée, sous une forme différente, au Musée Matisse de Nice, du 18 juin au 27 septembre.

 

Harry Bellet

http://www.lemonde.fr/culture/article/2010/05/13/celle-que-matisse-a-peinte-jusqu-a-sa-mort_1350995_3246.html

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