Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Catégories : La littérature

En marchant, en écrivant

On n'écrit pas en marchant, évidemment, sauf peut-être pour noter au passage la magnificence d'une vallée ou l'adresse d'une taverne. Mais ce que constate l'auteur et qui semble indiscutable, c'est l'existence très ancienne de deux désirs assez particuliers, souvent observés chez ceux qui marchent : celui de partager, celui de conserver. Leurs extases, leurs enthousiasmes les amènent à une envie de raconter - parfois encombrante pour les proches : à quand un livre sur la femme du marcheur ? Ils les notent souvent pour s'en souvenir, pour meubler leur solitude à l'étape, mais aussi pour revivre plus tard, à la veillée, leurs craintes et leurs délices. Le désir de préserver une splendeur, une paix - ou une grosse frayeur - les pousse à écrire.

Les écrivains, de leur côté - au moins certains d'entre eux - ressentent le besoin d'un contact avec la nature ou, plus généralement, l'extérieur. Il peut s'agir d'un simple délassement, d'une pause dans la création, mais aussi parfois d'une tentative quasi religieuse d'entrer en relation avec le Grand Tout.

Au couple théorique du marcheur et de l'écrivain, il faut naturellement ajouter un troisième personnage : le lecteur, avec son bagage littéraire, qu'il soit mince ou pesant. Car c'est bien à nous que s'adresse ce passionnant florilège : de Pétrarque, qui escalada peut-être, jadis, le Mont Ventoux, jusqu'à Jacques Lacarrière, qui traversa la France en solitaire dans les années 1970, on y découvre des Chinois et des Ecossais, des Suisses et des Anglais. Une superbe collection d'écrivains marcheurs, touchants, grandioses, un peu farfelus parfois... ou figure même un roi : Louis XIV, infatigable arpenteur de ses jardins.

On referme le livre, on s'étire, ébloui par la science de l'auteur, flatté par une sorte de camaraderie qu'il entretient avec ses lecteurs. On vérifie : les souliers sont bien là. Penser à les graisser... Et regarder la météo.


L'Apprentissage de la marche, de Jean-Louis Hue, Grasset, 238 p., 17 €.

 

Jean Soublin

Les commentaires sont fermés.