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Pascal Lemaître, les volumes et la grâce

Le photographe Pascal Lemaître cherche « les meilleurs angles, les meilleures lumières » pour ent...

Passionné d’architecture, ce photographe consacre un livre et une exposition au patrimoine sacré des XXe et XXI siècles

7/5/15 - 09 H 00

« Lorsque je pénètre dans un édifice religieux, j’essaie de comprendre le geste architectural qui fut à son origine. Je cherche les meilleurs angles et les meilleures lumières, jusqu’au moment où je trouve ces points forts prévus par l’architecte, là où il se passe quelque chose de puissant, où l’on est en communion avec l’architecture et son auteur. Pour faire une bonne photo, il faut être ému », confie Pascal Lemaître qui vient de boucler son tour de France photographique du patrimoine sacré des XXe et XXIe  siècles pour un livre et une exposition du Centre des monuments nationaux (1).

Y figurent une soixantaine de sites sélectionnés avec son complice, Paul-Louis Rinuy, parmi les 6 000 édifices culturels bâtis depuis 1900 en France. Ses images traduisent l’émotion que transmettent l’élan donné aux piliers d’une synagogue à Paris par Hector Guimard (1914), la ferveur du ciment ocre de la mosquée Missiri à Fréjus (1928-1930), l’esthétique des poutres métalliques et des tôles proposées par Marc Leboucher à l’église Saint-Éloi à Paris (1968), ou encore le dépouillement bois et parpaing du temple protestant de Lagny-sur-Marne conçu par Sylvestre Monnier (1997).

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L ’expérience mystique de l’architecture de Le Corbusier

« C’est quand même plus motivant de concevoir une église qu’une barre HLM !, s’exclame-t-il. La période de la reconstruction dans les années 1950 puis celle qui suit Vatican II, où l’Église fait confiance aux architectes et leur laisse une grande liberté, sont particulièrement intéressantes. Jouant sur le béton, le métal, le vitrail, certains expérimentent de nouvelles formes. »

Un souvenir fort ? Une expérience quasi mystique avec l’architecture de Le Corbusier à Ronchamp ou encore à Firminy. « Une sensation extraordinaire, comme si des bulles vous emmenaient loin, très haut… Pas forcément un sentiment religieux mais une véritable transcendance. Comme le bol zen dont la perfection se définit par le vide, l’architecte définit un volume et, chez Le Corbusier, ses proportions par rapport au corps sont parfaites. »

L’humilité au cœur de son travail

Les photographies inspirées de Pascal Lemaître montrent aussi la créativité des sculpteurs, des peintres, des maîtres verriers dont les vitraux glissent alors vers l’abstraction. « Dans cette chapelle Sainte-Thérèse d’Hem (1958, Nord) où les vitraux sont signés Manessier, une peinture, Rouault, ou encore à l’église Saint-Julien de Caen, les couleurs et les volumes transportent dans une autre dimension, témoigne-t-il. De nombreuses personnes se sont initiées à l’art moderne en contemplant chaque dimanche, à l’église, un vitrail abstrait. »

Les qualités pour être photographe d’architecture ? « L’humilité pour comprendre comment l’architecture a été conçue sans essayer de mettre sa propre vision partout. »

C’est après un détour par le cinéma et par la pédagogie – il fut assistant de Jacques Rivette puis consacra dix ans à l’école de la Neuville qu’il avait cofondée en 1974 – que Pascal Lemaître est revenu à ses premières amours, répondant à une commande pour une exposition sur le patrimoine des Hauts-de-Seine.

Le sacré, de la Savoie à Paris

Il dresse le portrait des églises baroques puis des fortifications de Savoie (Pierres fortes de Savoie, 1993). Parfois commissaire d’exposition, il met en scène ses propres œuvres – séries sur les stations de ski (2006), l’architecture des sanatoriums du plateau d’Assy (2012) – mais aussi les clichés réalisés par André Kertèsz en Savoie (2005) ou encore lors de l’exposition collective « La Seine des photographes » à la Conciergerie (2008).

Ne s’éloignant jamais de l’architecture sacrée, Pascal Lemaître vient de réaliser un millier de photos de Notre-Dame de Paris et capte actuellement les jeux de lumières sur les volumes de la basilique Saint-Denis, à Saint-Denis (2).

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Son inspiration

Dans les écrits de son père

Pascal Lemaître porte en lui le désir de photographier le patrimoine sacré moderne depuis qu’en 1966 son père, Joseph Pichard, lui a commandé une photographie de l’église d’Antony (Hauts-de-Seine) pour accompagner un article dans la revue Art chrétien dont il était le fondateur.

Quelque temps auparavant, grâce à un collègue de sa mère documentaliste à l’ambassade américaine, le jeune homme héritait d’une chambre 4 x 5 inches et découvrait les objectifs à décentrement permettant de photographier l’architecture sans déformation. Pour son livre, il s’est replongé dans les écrits de son père sur l’architecture et le sacré, s’inspirant de celui qui, avec ses Propos sur l’art, fut aussi durant vingt-cinq ans chroniqueur à La Croix.

Armelle Canitrot

(1) Patrimoine sacré, XX e et XXI e  siècles, Éd. du Patrimoine, textes Paul-Louis Rinuy, photographies Pascal Lemaître, 232 p., 45 €. Exposition jusqu’au 28 juin, au palais du Tau, à Reims ; puis à l’abbaye de Cluny (Saône-et-Loire) du 10 juillet au 20 septembre ; et dans le cloître de la cathédrale de Fréjus (Var) du 6 septembre au 31 décembre.

(2) à paraître – Éd. La Nuée bleue.

7/5/15 - 09 H 00

 

http://www.la-croix.com/Culture/Actualite/Pascal-Lemaitre-les-volumes-et-la-grace-2015-05-07-1310064

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