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Saint-Quentin : un tramway nommé souvenir

895434363_B978759340Z.1_20160526142138_000_GBA6RRDKN.2-0.jpgSaint-Quentin : un tramway nommé souvenir

Publié le 26/05/2016

Par Olivier De Saint Riquier

Publié le 26/05/2016  Par Olivier De Saint Riquier

Les derniers tramways de la ville se sont arrêtés de rouler il y a 60 ans jour pour jour. Retour sur un demi-siècle d’une aventure épique.

C’était le 27 mai 1956. Sur la place de l’Hôtel-de-Ville, la population est invitée à assister « aux obsèques » du tramway. Sans nostalgie et même avec un certain sarcasme. À l’époque, ils ne sont pas nombreux à pleurer ces « tas de ferraille », devenus des obstacles aux automobiles alors en plein développement. Ce jour-là, les dernières rames ont descendu la rue d’Isle pour rentrer au dépôt. Des autobus rutilants en sont sortis. La fin brutale d’une époque. Le début du règne pétrolier.

Les rails n'ont pas été démontés et sont restés de nombreuses années comme un vestige de ce temps passé. Avant à leur tour de disparaître au fil des travaux de voirie.

L'idée du tramway avait été lancée par le conseil municipal en 1895 et le premier est apparu en 1899. La ligne reliait la gare au cimetière Saint-Jean en passant par le centre-ville. Elle est rapidement suivie par la création de la ligne Hôtel de ville/ Rocourt (Route de Paris). Un troisième itinéraire est mis en service dans la foulée allant du centre-ville vers le quartier Remicourt (place de Mulhouse). « Toutes les villes importantes se dotaient d’un tramway sinon c’était à pied ou à bicyclette mais ce n’était pas donné à tous », raconte Jacques Leroy de la Société académique et grand spécialiste de la question.

Les machines fonctionnent d’abord à air comprimé avec des motrices d’occasions achetées à Nantes. Le système fait ses preuves jusqu’en 1908 mais commence à avoir des ratés malgré la création d’une ligne vers le faubourg d’Isle en 1905. La propulsion n’est plus assez puissante, obligeant les conducteurs à foncer dans les descentes pour prendre de l’élan. Il n’est pas rare de voir des tramways dévaler à vive allure le boulevard Faidherbe pour pouvoir atteindre le passage à niveau en haut de la rue de Paris. « Certains oubliaient qu’il y avait une courbe place Dufour-Denelle, sourit Jacques Leroy. Il y a eu des déraillements à plusieurs reprises. »

La fée électricité viendra régler le problème. Face aux protestations de la population, une nouvelle compagnie est créée, le réseau est électrifié, et une ligne allant jusqu’aux casernes (actuellement stade Plein-Air) est inaugurée. Des prolongations sont menées sur d’autres axes. Les tramways saint-quentinois rouleront sans embûche jusqu'à la guerre (lire encadré). Au retour de l'exode en 1918, la population ne pourra plus utiliser ce moyen de transport. « Plus un n'était en état de fonctionnement. C'était davantage lié à des destructions volontaires qu'à des dégâts liés à la guerre », précise Jacques Leroy.

Il faut attendre 1925 pour revoir des tramways circuler dans les rues de la ville. Pour la première fois, il s'agit de matériels neufs inspirés des véhicules parisiens les plus récents. Dix-sept motrices et deux remorques sont fabriquées. La construction du pont de la gare en 1929 prend en compte ce moyen de transport et les rails sont érigés sur la chaussée. Pour la première fois, le Faubourg d'Isle est directement accessible depuis le centre-ville. Auparavant, la présence d'un passage à niveau empêchait le tramway de franchir l'obstacle, la ligne ne démarrait alors qu'en bas de la future rue du Général-Leclerc pour monter à la « patte d'oie ».

Cette fois, Saint-Quentin possède un vrai réseau. C'est l'âge d'or des tramways. L'activité liée à la reconstruction est foisonnante jusqu'au milieu des années 30. La crise se fait sentir et les mouvements sociaux de 1936 font baisser la fréquentation. La compagnie est déficitaire. Le personnel se réduit. Des dessertes sont supprimées comme celle des casernes. Étonnamment, la guerre ne va pas tellement bouleverser la donne. Le service s’arrête pendant quelques mois au moment de l'exode de 1940 « et deux heures pendant la libération », d'après Jacques Leroy.

Au début des années 50, la situation financière de la compagnie ne s'est pas améliorée. Le matériel est vieillissant. Et comme au début du siècle, les chauffeurs ont du mal à remonter la rue d'Isle. Le tramway est à bout de souffle. Surtout, il n'est plus à la mode. Il tiendra cahin-caha jusqu'en 1956 où il aura droit à son enterrement de première classe. C’était le 27 mai 1956. C'était il y a 60 ans.

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