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Catégories : La littérature

L'homme qui s'écrivait dans la vie(Lu dans le 23 avril 2009)

Walter_Benjamin.jpgD'une certaine manière, Tackels n'avait pas le choix : Benjamin fut un homme-oeuvre. Il est né, non seulement pour faire une oeuvre, mais pour être une oeuvre : pour faire oeuvre de tout, et tout le temps. Les femmes le disaient : il n'était pas corporel. Il était, non pas seulement cérébral, ou littéraire, ni désincarné, mais incarné autrement que nous : cet homme était quelque chose d'écrit. C'était un homme imprimé. C'était un homme qui s'écrivait dans la vie, qui s'imprimait dans son temps. C'était un homme-texte.

Walter Benjamin n'a pas laissé une oeuvre compacte au sens où elle ferait système : comme les existences sont chaotiques, ses oeuvres elles-mêmes expriment, par leurs formes éclatées, infiniment diversifiées, différentes, la beauté de l'accident jusque dans la pensée. Ne cherchons pas scolairement la « cohérence » de la pensée benjaminienne : elle est événement plutôt, elle fait sourdre, elle fait jaillir le sens de ce qui, en face de nous, hic et nunc, advient.

Le génie de Walter Benjamin aura bien été celui-là, que de donner à l'actualité sa dimension métaphysique éternelle, et de savoir lire dans les philosophies établies le conformisme des modes passagères. Cet homme n'était pas une subjectivité, mais une liberté. Il s'arrachait sans cesse au groupe : seule la solitude rend possible la réflexion, qui est d'abord courage. Le judaïsme ne l'intéresse, par exemple, que détaché de ce socialisme qu'est pour lui le sionisme. Comme Péguy (qu'il a lu et aimé), il déteste l'Université, trop étroite pour savoir penser : il lui préfère les voyages, Paris et les musées. Paris, pour lui, est une bibliothèque géante. Le Louvre ? Un lieu dans lequel on pourrait se laisser enfermer à vie, sans s'ennuyer une seconde, à contempler incessamment les quinze mêmes tableaux.

Benjamin est sans doute le plus grand penseur de l'art : non en esthète, mais en politique, en théologien, en philosophe. Il eût fait émerger d'une réflexion sur la photographie un projet de réforme de la démocratie participative ! Le sens de l'Histoire, la mort de la civilisation, les instincts criminels du monde moderne, les déflagrations à venir, Benjamin, qui n'est jamais paranoïaque mais dont les pseudopodes sont branchés sur tous les aspects de son temps, et tous ses domaines, tous ses visages, sont lus par lui en interlignes du quotidien. Aussi sa lucidité, exceptionnelle, son acuité, visionnaire, ses intuitions, prodigieuses, font-elles de lui le seul penseur du XXe siècle, peut-être, à avoir su rendre compte de l'irréversible - de la mort définitive de Dieu (quelque sens que l'on donne à ce terme).

Rien n'est annexe, rien n'est secondaire, rien n'est anecdotique pour le véritable philosophe : les accrocs du réel, les interstices des grandes dates, les miettes de l'Histoire. Aucun système ne saurait en rendre compte : aussi faut-il émietter la pensée elle-même, la fragmenter : alors, elle épousera les reliefs du réel, elle coïncidera avec ses aspérités, elle fera parler ses particularités.

C'est grâce à son microscope que Walter Benjamin est parvenu à inventer, non seulement une oeuvre, mais une vie d'homme, la première vie d'homme qui se confonde avec l'oeuvre de cet homme, à tel point que le biographe se doit, pour en exprimer la vérité et la complexité, de ne jamais les distinguer, tant décoller la chair de l'une est atrophier le corps de l'autre. La pensée de Benjamin est vivante. Parce que, grâce à Tackels, Benjamin l'est aussi.

À lire aussi : «Rêves» de Walter Benjamin, Éditions Le Promeneur (en librairie le 7 mai).

Walter Benjamin, une vie dans les textes de Bruno Tackels Actes Sud, 842 p., 29 eur .

http://www.lefigaro.fr/livres/2009/04/23/03005-20090423ARTFIG00414-l-homme-qui-s-ecrivait-dans-la-vie-.php

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3. Dernier récapitulatif de mon avant-dernier voyage :

 

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