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  • Les incroyables hôtels d'art

    Nice - Le Negresco - Pas une ride

     

     

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      Nice - Le Negresco - Pas une ride - 102 ans et pas une ride ! Situé sur la fameuse promenade des Anglais à Nice, le Negresco propose une immersion réjouissante dans l'art et l'histoire entre fauteuil Empire, lit à baldaquin vénitien, secrétaire Louis XV et décor médiéval. © DR
    • Nice - Le Negresco (oeuvres d'art)
      Nice - Le Negresco (oeuvres d'art) - En plus de posséder la plus importante collection de meubles d'époque de l'hôtellerie française, l'hôtel abrite plus de 6 000 œuvres d'art (!) de Louis XIII à nos jours, telle la Nana jaune de Niki de Saint-Phalle (photo). © DR
    • Mane - Le Couvent des Minimes - Lifting réussi
      Mane - Le Couvent des Minimes - Lifting réussi - Bien connu des inconditionnels de la Provence, le Couvent des Minimes s'offre un lifting des plus réussis, entre vieilles pierres, couleurs vitaminés et meubles design dernier cri. © Virginie Garnier
    • Mane - Le Couvent des Minimes (oeuvres d'art)
      Mane - Le Couvent des Minimes (oeuvres d'art) - Fort d'une architecture vieille de quatre siècles, l'hôtel favorise les va-et-vient entre art et histoire, des récitals lyriques proposés dans La Chapelle aux sculptures en bronze (photo) exposées dans les jardins. © DR
    • Saint-Tropez - La Messardière - Conte de fée
      Saint-Tropez - La Messardière - Conte de fée - Ouvert sur la pinède et la grande bleue avec d'une part, la baie de Pampelonne, et de l'autre, le golfe de Saint-Tropez, la Messardière ressemble à un château tout droit sorti d'un conte de fées. © Brice Charrue - DR
    • Saint-Tropez - La Messardière (Prix littéraire)
      Saint-Tropez - La Messardière (Prix littéraire) - Compétitions de golf, séances photo avec les studios Harcourt, concerts de musique classique, exposition de peintures et prix littéraire... L'établissement enchaîne les manifestations tout au long de la saison. © DR
    • Aix-en-Provence - Hôtel Renaissance - Déco très stylée
      Aix-en-Provence - Hôtel Renaissance - Déco très stylée - L’hôtel a beau faire partie du groupe international Marriott, il n’en affiche pas moins une atmosphère personnalisée et bien ancrée dans la ville. Comme en témoignent sa déco déclinant tons ocre, façades vitrées, bois couleur miel et faïence murale. © DR
    • Aix-en-Provence - Hôtel Renaissance (oeuvres d'art)
      Aix-en-Provence - Hôtel Renaissance (oeuvres d'art) - Le Renaissance entend placer l’art contemporain au cœur de l’hôtellerie haut de gamme. Résultat : 400 œuvres – peinture, art mural (photo), lithographie, sculpture… – dont 40 commandées en exclusivité pour l’établissement, se disputent l’espace dans le spa, les chambres et les parties communes. © DR
    • Paris - Hôtel Edgar (une tribu)
      Paris - Hôtel Edgar (une tribu) - Ovni arty-branché au coeur du Sentier à Paris, l'hôtel Edgar est avant tout une histoire de famille. Celle de Guillaume Rouget et de sa tribu (mère, frère, oncle, tante, cousins, copains...) qui signent ici 13 chambres toutes différentes et à leur image. © DR
    • Paris - Hôtel Edgar - Ambiance brousse
      Paris - Hôtel Edgar - Ambiance brousse - Artistes, photographes, graphistes, sculpteurs ou créateurs de mode, tous ont joué le jeu de l'anticonformisme et de l'autodérision, de l'ambiance brousse africaine à l'univers ranch du Nouveau Mexique. © DR
    • Marrakech - The Source - Voyage musical
      Marrakech - The Source - Voyage musical - Planté parmi oliviers et lauriers blancs, à quelques encablures de Marrakech, l'hôtel The Source convie à un voyage musical face à l'Atlas. Avec à l'appui : iPad mini, playlist personnalisées, instruments disposés çà et là et chambres décorées en hommage à un album culte. © Alexandre Chaplier
    • Marrakech – The Source - Style vintage
      Marrakech – The Source - Style vintage - Imaginé et géré par des mélomanes avertis, l'hôtel s'enorgueillit d'un véritable studio style vintage à la pointe de la technologie. S'ajoute à cela une arène de 200 places à ciel ouvert pour recevoir concerts, soirée jazz ou musique gnaoui. © Alexandre Chaplier
    • Saint-Barth - Eden Rock -The must
      Saint-Barth - Eden Rock -The must - Surplombant la baie de Saint-Jean, l'hôtel Eden Rock compte parmi les must de Saint-Barth. C'est aussi l'un des haut-lieux insulaires de l'art contemporain que l'on découvre dans les chambres, les parties communes et jusque sur la plage. © DR
    • Saint-Barth - Eden Rock (oeuvres d'art)
      Saint-Barth - Eden Rock (oeuvres d'art) - Outre sa galerie d'exposition, l'hôtel regorge d'œuvres issues de la collection personnelle des propriétaires et de celle d'artistes "coup de cœur" tel le créateur de mode, Jean-Charles de Castelbajac (photo). © DR
    • New York - Park Hyatt - Luxueux
      New York - Park Hyatt - Luxueux - Installé dans ce qui était encore, il y a peu, la plus haute tour de New York - la One 57 conçue par Christian de Portzamparc - le dernier des Park Hyatt déploie entre les 1er et 25e étages, élégance, sobriété, matériaux luxueux et art contemporain. © Park Hyatt
    • New York - Park Hyatt (oeuvres d'art)
      New York - Park Hyatt (oeuvres d'art) - De part et d'autre de l'hôtel (photo), pas moins de 350 œuvres réalisées par les meilleurs artistes new-yorkais s'offrent au regard des visiteurs. De quoi faire un peu d'ombre au MoMA situé à deux pas de là. © Park Hyatt
    • Kenya - Segera Camp - Lodge africain
      Kenya - Segera Camp - Lodge africain - Superbe propriété tout en pierre et bois, Segera Camp réinvente avec audace et élégance l'univers du lodge africain au Kenya. © DR
    • Kenya - Segera Camp (oeuvres d'art)
      Kenya - Segera Camp (oeuvres d'art) - Sculptures, tableaux, vidéos, land art (photo)... L'établissement s'impose contre toute attente comme une galerie d'art contemporain ouverte sur la savane et valorisant les artistes locaux. © Michael Poliza

     

     

     

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  •  LA BRETAGNE,PASSIONNÉMENT : PONT-AVEN

     LA BRETAGNE,PASSIONNÉMENT : PONT-AVEN
     
    Jean Puy, Barques vertes à Collioure, 1913. Huile sur toile, 60 x 73 cm. Collection P. Steffan, Lyon. © Amis de Jean Puy © Adagp, Paris, 2021
     
     
    Jean Puy, Barques vertes à Collioure, 1913. Huile sur toile, 60 x 73 cm. Collection P. Steffan, Lyon. Photo service de presse. 
    © Amis de Jean Puy © Adagp, Paris, 2021

    Une collaboration fructueuse
    À l’occasion du soixantième anniversaire de la mort de Jean Puy (1876-1960) et en partenariat avec le musée Joseph Déchelette de Roanne, ville natale de l’artiste, le musée de Pont-Aven consacre une exposition aux relations entre Jean Puy et son marchand, Ambroise Vollard, de 1905 à 1925. Installé en 1899 à Paris, Jean Puy se rapproche d’André DerainAlbert Marquet ou Henri Matisse. C’est à l’occasion du fameux Salon d’automne de 1905, qui donne naissance au fauvisme, que Vollard repère l’artiste et ses peintures aux couleurs vives et au dessin simplifié. Outre la richesse picturale des portraits, natures mortes ou paysages, notamment ceux de la Bretagne où Jean Puy revient régulièrement, l’exposition présente toute la diversité de la production de l’artiste, stimulé par Vollard, à l’instar des céramiques et des illustrations de livres. F.D.


    « Jean Puy (1876-1960) / Ambroise Vollard (1866-1939) », jusqu’au 2 janvier 2022 au musée de Pont-Aven, place Julia, 29930 Pont-Aven.

     
     
     

     CAP AU SUD : SAINT-TROPEZ

     
     

    Nadia Léger (1904-1982),
    une artiste à (re)découvrir

     

    C'est à l’éditeur et amateur d’art Aymar du Chatenet que l’on doit la remise en lumière de l’œuvre de Nadia Khodossievitch, née en 1904 en Biélorussie, plus connue sous le nom de Nadia Léger. Passionné par l’artiste, il est parti sur ses traces il y a une dizaine d’années et lui a consacré en 2019 une magistrale monographie (plus de 600 pages). La jeune femme qui quitte l’URSS en 1922, arrive à Paris en 1925 après s’être un temps arrêtée en Pologne où elle se marie. Dans la ville lumière, elle participe à toutes les avant-gardes. Pendant trente ans, elle sera l’assistante et la maîtresse de Fernand Léger dont elle dirigera l’atelier. 

     

    Elle épouse le peintre trois ans avant sa disparition et hérite de l’intégralité de son œuvre dont elle sera l’ambassadrice sans relâche, créant notamment le musée Fernand Léger de Biot. Mais Nadia Léger est d’abord une femme singulière d’une incroyable modernité, communiste engagée jusqu’à ses derniers jours. Créatrice au talent immense, elle a produit un œuvre protéiforme où la couleur règne en maître. Avec le concours des ayants droit de l’artiste qui détiennent l’intégralité de son travail, l’exposition aborde toutes les facettes de son art : une soixantaine de peintures, gouaches et dessins, mais aussi des sculptures et des bijoux. N.d’A.

     

    « Les couleurs de Nadia Léger », jusqu’au 14 novembre 2021 au musée de l’Annonciade, 2 place Grammont, 83990 Saint-Tropez. 

     
     

    Nadia Léger, Baigneuses. Huile sur toile, 162 x 114 cm. Collection particulière. Photo service de presse. © Adagp Paris 2021

     
     
     

     À L'ASSAUT DES ALPES : LAUSANNE

     
     
     

    Hans Emmenegger, Réflexion sur l’eau ou Petit bateau à vapeur se reflétant sur l’eau, 1909. Huile sur toile, 85,5 x 150,5 cm. Lucerne, musée d’Art, dépôt de la fondation BEST Art Collection de Lucerne. Photo service de presse. © Andri Stadler, Lucerne

     
     

    Surprenant Hans Emmenegger 

    Dans la série des artistes méconnus, tant en Suisse qu’en France, on compte Hans Emmenegger (1866-1940), un peintre pourtant fortement engagé dans la communauté culturelle suisse alémanique. Formé à l’école des arts appliqués de Lucerne, il poursuit ses études à l’Académie Julian et dans l’atelier de Gérôme à Paris. Plusieurs séjours à Munich lui permettent ensuite de pratiquer la gravure et de s’initier à la peinture de plein air. Au tournant du XXe siècle, il affirme un style propre et original. Il peint à de nombreuses reprises les sous-bois, la fonte des neiges, le jeu des ombres et des reflets sur l’eau au moyen d’aplats de couleurs contrastés, dans des cadrages serrés, parfois sans horizon, qui confèrent à ses toiles une atmosphère mélancolique et pourtant étrangement apaisante. À partir des années 1910, il se passionne pour la représentation du mouvement et réalise des œuvres inspirées par la chronophotographie, qui ne sont pas sans rappeler les recherches des artistes futuristesC.J.

     

    « Hans Emmenegger (1866-1940) », jusqu’au 31 octobre 2021 à la Fondation de l’Hermitage, route du Signal 2, 1018 Lausanne. 

     
     
     
     
     

     EN REMONTANT VERS LE NORD : LE TOUQUET-PARIS-PLAGE

     
     
    Niki de Saint Phalle en toute liberté
     

    C’est un voyage au cœur de l’univers radieux, coloré et libre de Niki de Saint Phalle (1930-2002) que propose cet été le musée du Touquet-Paris-Plage. Le parcours thématique de l’exposition retrace, à travers une quarantaine d’œuvres majeures, la carrière singulière de cette figure inclassable du XXe siècle, de ses premières réalisations dans le groupe des nouveaux réalistes au projet titanesque du Jardin des Tarots, en passant par l’exécution de ses fameux Tableaux-Tirs réalisés à la carabine. La présentation évoque également l’invention de ses Nanas, véritables égéries féministes du début des années 1960, interrogeant le spectateur sur la place et la représentation de la femme dans la société.

     

    Cette rétrospective aborde également sa production d’éléments mobiliers, une dimension souvent méconnue du travail de cette artiste autodidacte, reflétant pourtant l’un de ses vœux les plus chers : faire entrer l’art dans la vie. E.M.


    « Niki de Saint Phalle. La liberté à tout prix », jusqu’au 5 septembre 2021, au musée du Touquet-Paris-Plage, angle de l’avenue du Golf et du Château, 62520 Le Touquet-Paris-Plage.

     
     

    Niki de Saint Phalle, Dawn jaune, 1995. Résine polyester peinte, 140,3 x 115 x 61 cm. Photo service de presse. © Niki Charitable Art Foundation / ADAGP, Paris, 2021. Photo © Linda and Guy Pieters Foundation, Saint-Tropez

     
     
     

     UN ÉTÉ LITTÉRAIRE

     
     
     
    Ce copyright concerne mes textes et mes photos. Si vous souhaitez utiliser un de mes textes ou photos, merci de me contacter au préalable par e- mail et de citer mon nom et le mon adresse URL... comme je m'efforce de le faire pour les créations des autres.

    Mes essais

    tirés de mes recherches universitaires
    ISBN:978-2-9531564-2-3

    Notes récentes

    ISBN :978-2-9531564-9-2

    Avril 2024

    Victor Prouvé, reliure pour Salammbô, 1893. Cuirs incisés, pyrogravés et dorés, émaux, 42,5 x 62 x 6 cm. Nancy, musée de l’École de Nancy. Photo service de presse. © Nancy, mus

  • Mort du commissaire-priseur Pierre Cornette de Saint Cyr

     

    Dimanche 20 août, Pierre Cornette de Saint Cyr est décédé à Saint-Tropez. Le célèbre commissaire-priseur français avait 84 ans.

    Pierre Cornette de Saint Cyr, comme tous ceux qui m'intéressent, inspirent ce que j'écris à acheter ici

    Tout Paris connaissait ce visage au teint éternellement hâlé. Hier, dimanche 20 août, Pierre Cornette de Saint Cyr est mort dans la maison de retraite des Platanes à Saint-Tropez (Var) à l’âge de 84 ans, « des suites d’une maladie neurodégénérative », précise le quotidien « Le Monde ». Le commissaire-priseur français et ancien président du Palais de Tokyo (2003-2012) est connu pour avoir fondé la maison de ventes éponyme mais aussi pour avoir assisté à d’innombrables vernissages et participé aux mondanités de la capitale.

     

     

    Des études d’ingénieur à la vente de la succession de Foujita

    Pierre Cornette de Saint Cyr est né en 1939 à Meknès au Maroc. Après des études secondaires à l’école des Roches à Clères, il suit une formation d’ingénieur, puis d’avocat. Collectionneur de dessins anciens et de photographies, il ouvre finalement sa propre maison de ventes aux enchères en 1973, que ses fils Arnaud et Bertrand rejoignent plus tard. Entre 2003 et 2012, il est président du Palais de Tokyo à titre bénévole et développe le site de création contemporaine avec Pierre Restany, Nicolas Bourriaud et Jérôme Sans. En 2009, Pierre Cornette de Saint-Cyr reçoit le Prix de l’Excellence française. Le commissaire-priseur a aussi écrit plusieurs ouvrages tels que L’art c’est la vie : Souvenirs d’un commissaire-priseur (Éditions Michel Lafon, 2004).


    Les locaux de la maison de ventes aux enchères Cornette de Saint Cyr, avenue Hoche, Paris © Fatima Jellaoui

    Installée depuis 2008 avenue Hoche (Paris VIIIe arrondissement), la maison de ventes est spécialisée dans l’art contemporain et le design, mais aussi les arts premiers, les voitures, les bijoux et les montres. « Le nom de Pierre Cornette de Saint Cyr restera attaché aux premières ventes d’art contemporain chinois en France (…) et à celles de grandes collections dont celles d’art contemporain de Stéphane Collaro (2001), de tableaux modernes d’Alain Delon (2007), à la dispersion de la succession du peintre franco-japonais Kimiyo Foujita (2011-2013) », précise la maison de ventes dans un communiqué. Le contenu de l’hôtel Royal Monceau (2008) et la collection d’Hélène Rochas (2016) ont également été dispersés dans l’entreprise familiale. En juin dernier, la cinquième vente Alain Delon, qui comprenait des oeuvres d’art anciennes et modernes, a rapporté pas moins de 8 millions d’euros.


    Alain Delon, 1972, ©Jean-Pierre Bonnotte/GAMMA RAPHO

    En 2022, la maison de ventes est rachetée par la firme britannique Bonhams, qui cherche alors à se développer en Europe. La salle parisienne et celle située chaussée de Charleroi à Bruxelles deviennent alors une nouvelle entité : Bonhams Cornette de Saint Cyr, présidée par son fils Arnaud Cornette de Saint Cyr. « Ses qualités humaines, reconnues de tous, et son enthousiasme manqueront ainsi qu’à l’ensemble du marché de l’art. Toutes nos pensées vont à sa femme, ses enfants et sa famille. », décrit Bruno Vinciguerra, PDG de Bonhams.

    Commissaire-priseur de stars et d’œuvres caritatives

    Figure phare des soirées mondaines et associés à plusieurs ventes liées à des célébrités, Pierre Cornette de Saint Cyr est souvent immortalisé sur des clichés aux côtés de stars telles qu’Alain Delon, Nana Mouskouri ou encore Mireille Darc. Il en a également initié certaines au monde de l’art, à l’instar de son ancienne amante Marie Laforêt qui s’est reconvertie commissaire-priseur à Genève dans les années 1980 avec son aide. Le commissaire-priseur a aussi organisé ou participé à des œuvres de charité, comme en 2016 lors de la vente organisée par l’association Keliah au profit du service d’oncologie pédiatrique de l’hôpital israélien Rambam ou encore en 2021 lors de l’événement dont les bénéfices ont été reversés à l’Institut Chef Raoni.

     

    Sur les réseaux sociaux, de nombreuses personnalités lui ont rendu hommage, comme Jean-Pierre Lecoq, maire du VIe arrondissement de Paris : « Le commissaire-priseur Pierre Cornette de Saint Cyr vient de nous quitter. Hommage à un homme de grande culture, figure illustre de Saint-Germain-des-Prés, avec qui nous avons organisé plusieurs opérations de mécénat. », écrit-il sur X (anciennement Twitter).

    https://www.connaissancedesarts.com/depeches-art/deces/mort-du-commissaire-priseur-pierre-cornette-de-saint-cyr-11184774/

  • France Roche, celle qui découvrit Michel Audiard

    Home CULTURE Cinéma
    À gauche, France Roche dans une soirée déguisée en 1951. À droite, en 1992 sur France 2.

    À gauche, France Roche dans une soirée déguisée en 1951. À droite, en 1992 sur France 2.

    Journaliste, critique de cinéma, adaptatrice, dialoguiste, France Roche a consacré sa vie au septième art. Elle s'est éteinte dans sa quatre-vingt-treizième année, samedi 14 décembre à Paris.

    France Roche s'est éteinte samedi dernier à Paris. Pour les téléspectateurs qui ont plus de vingt ans, elle a été la grande spécialiste du cinéma de l'ancêtre de France 2, Antenne 2. De 1969 à 1986, les amoureux des salles obscures ne connaissent que son jolie visage et son excellente diction. Durant presque 20 ans, en direct du festival de Cannes, France Roche anime une chronique quotidienne aussi pertinente que pétillante souvent émaillée d'entretiens exclusifs avec les plus grandes stars. On se souvient notamment de sa rencontre avec Woody Allen en 1979.

    Née à Saint-Tropez le 2 avril 1921, la journaliste commence sa carrière sous la houlette du patron emblématique de France-SoirPierre Lazareff. Il faut se souvenir que, à cette époque bénie pour la presse quotidienne, le journal tire à plus d'un million d'exemplaires et peut avoir trois ou quatre éditions par jour. France Roche est la Madame Cinéma du plus puissant journal français.

    Quelques années auparavant, elle croise un jeune coursier, futur pigiste régulier des journaux parisiens. Il s'appelle Michel Audiard. Le flair de France Roche ne la trompe pas. Elle est l'une des premières à découvrir le talent de celui qui deviendra le plus grand dialoguiste français. Par la suite, elle travaille quatre fois avec le Petit Cycliste en tant qu'adaptatrice et scénariste dans La Française et l'Amour (Verneuil) , Les lions sont lâchés (Verneuil), Les Amours célèbres (Boisrond) et La Chasse à l'homme (Molinaro).

    Critique de cinéma, scénariste, journaliste, France Roche s'est aussi intéressée à l'art théâtrale. Elle a suivi, toujours pour la télévision, le grand festival d'Avignon. Dans les années 90, Michel Thoulouze et Pierre Lescure ont la brillante idée de lui confier une émission sur le cinéma à l'adresse des plus jeunes sur Canal Jimmy. Son érudition joyeuse fait merveille auprès des plus jeunes. Toujours aussi passionnée de son art favori elle anime Piment rose à France Inter et une virgule sur le court métrage à Ciné cinéma.

    France Roche a dédié sa vie à sa passion. Durant toute sa carrière, elle est resté très attentive aux nouveaux talents. Modeste, généreuse, elle possédait une qualité rarissime dans le milieu du cinéma: elle savait parler aux étoiles et garder les pieds sur terre.

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      France Roche, celle qui découvrit Michel Audiard

      Journaliste, critique de cinéma, adaptatrice, dialoguiste, France Roche a consacré sa vie au septième art. Elle s'est éteinte dans sa quatre-vingt-treizième année, samedi 14 décembre à Paris.

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      France Roche, celle qui découvrit Michel Audiard

      Journaliste, critique de cinéma, adaptatrice, dialoguiste, France Roche a consacré sa vie au septième art. Elle s'est éteinte dans sa quatre-vingt-treizième année, samedi 14 décembre à Paris.

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  • Régnier est mort, vive Régnier !

    Publié le 03 mai 2007

    Actualisé le 03 mai 2007 : 11h21
    Henri de Régnier, qui a occupé cette même place de feuilletoniste dans Le Figaro, est né en 1864 et mort en 1936, année qui n'était pas son genre. Cet homme mélancolique à longue tête de cheval représentait un type d'écrivain aujourd'hui disparu : aristocrate, académicien français, filiation Vigny. Dans le Journal d'un poète, Vigny dit à propos d'un autre ceci qui pourrait s'appliquer à lui : « Il avait un assez noble profil, des formes polies et gracieuses, il était homme du monde et homme de lettres, alliance rare, assemblage exquis. »
    Avant la mondanité, Régnier avait eu du talent. Il avait débuté, en écrivain sérieux et comme presque tout le monde en 1880, par la poésie. De la première génération symboliste, il faisait partie de la branche mallarméenne, l'autre étant la verlainienne, c'est-à-dire, je crois, la « décadente ». Bon poète, d'ailleurs, plein de beaux vers (« La dégradation douce d'un crépuscule »), à la prosodie discrètement savante, comme le beau « Si j'ai parlé... » qui pourrait être aussi célèbre que le « Qui j'ose aimer » de Musset. En prose, trop poli pour être un génie, Régnier pouvait être la fadeur même. La première partie du livre que l'on réédite le montre : Escales en Méditerranée est tout en périphrases, esquives pour ne pas dire grand-chose, souvenirs vaporeux. C'est comme s'il n'avait éprouvé aucune sensation. Pourtant, l'un des premiers livres peut-être à contenir le mot « yacht » (pas les yachts genre Saint-Tropez, les yachts genre Standart de Nicolas II), il aurait pu être original, ethnologique et curieux. Il y aurait peut-être fallu de la fiction.

    À la suite d'Escales en Méditerranée se trouve Donc..., avec les points de suspension, titre assez Guitry, trente pages de maximes qui en rendent l'achat indispensable. C'est un chef-d'oeuvre. Régnier ose y avoir la dent dure. Il se dissimule avec courtoisie derrière un « il » que nous pouvons remplacer par un « je ». « En parlant d'un mariage possible de M. H... et de Mme D..., il disait : »Ce serait répugnant, mais raisonnable.» » Il fait des observations sur le monde lui aussi disparu des vieilles nobles irascibles, et nous avons l'impression d'observer des perroquets oubliés dans une grande cage au fond d'un zoo sans visiteurs. Ainsi, celle qui déclare, d'un air digne et péremptoire : « Mon père, le marquis de B... - homme d'infiniment d'esprit -, disait qu'il faut se couper les ongles des pieds au carré. » Le relever est une forme d'humour qui a disparu avec la classe sociale qui engendrait cette sottise, chacune a la sienne, et, sans Régnier (et Proust), ces phrases nous sembleraient aussi opaques que des cartouches de hiéroglyphes. Cette classe avait aussi sa fantaisie : Régnier rapporte que, dans la forêt de Chantilly, restaient des bornes marquées d'une fleur de lis que le duc d'Aumale saluait toujours d'un coup de chapeau. Les hommes sont fous. C'est ce qui les rend supportables.
    Il faut un être aussi social que Régnier pour observer que « le renom d'habileté vient souvent de maladresses dont on a su tirer parti ». On dirait qu'il parle de Mitterrand. L'autre côté de la satire, c'est souvent la mélancolie. Pour Régnier, les feuilles d'automne semblent tomber « par fatalité ». C'est un tempérament à la Chamfort, désabusé par la férocité des hommes. « Le rêve secret de l'amitié est que nous puissions compter sur nos amis sans qu'ils aient le droit de faire fond sur nous. » Ce n'est pas parce qu'on le dit qu'on l'est, et Régnier rapporte avec admiration des propos de son défunt dieu Mallarmé. Il a eu envers lui une amitié immuable qui est la part vraiment noble de sa personnalité. Il croyait plus aux poètes qu'aux princes.
    Escales en Méditerranée d'Henri de Régnier Buchet-Chastel, 256 p., 16 € .

  • Le bonheur de peindre au soleil de la Méditerranée

    <i>Le Petit Paysan</i> de Cézanne

    Le Midi a été une source infinie d'inspiration pour les peintres. Une superbe exposition composée de deux volets présentés simultanément à Marseille et à Aix-en-Provence évoque cette terre de la modernité.

    L'exposition, présentée en deux volets à Marseille et à Aix-en-Provence, commence avec des oeuvres datées de 1880. La date n'est pas choisie au hasard. Les années qui suivirent allaient encore accentuer la désintégration du groupe impressionniste, ce mouvement qui avait jadis pris son essor dans la forêt de Fontainebleau, dans les allées du Salon des refusés, dans les brasseries et à la terrasse du café Guerbois.

    Les concepts qui s'étaient formés à ces différentes sources étaient apparus dans toute leur déconcertante nouveauté lors de la première grande exposition impressionniste de 1874. Moins de vingt ans plus tard, quand la huitième et dernière exposition fermera ses portes en 1886, Monet et ses amis vont s'éloigner sans regret, chacun choisissant alors de travailler de son côté.

    Si leur effort commun appartenait désormais au passé, une nouvelle génération entreprenait déjà de poursuivre la lutte pour des idées nouvelles. Le tournant du siècle sera donc l'histoire parallèle de deux générations: l'aînée, toujours en pleine vigueur et confiante dans ses forces, et la plus jeune, qui devait encore prouver toutes ses possibilités. Tandis que l'audace était souvent du côté des nouveaux, l'expérience restait l'apanage des anciens.

    Quelle est alors la situation? Gauguin était parti pour la Martinique, Renoir exposait ses Baigneuses, fruit de plusieurs années de recherche, Monet commençait à vendre ses toiles un bon prix. Van Gogh avait quitté Paris pour le Midi de la France où il espérait retrouver les couleurs de Delacroix, le contour net des estampes japonaises qu'il collectionnait et les paysages qu'il avait admirés dans les toiles de Cézanne. Il écrit à son frère Théo: «Au lieu de chercher à rendre exactement ce que j'ai sous les yeux, je me sers de la couleur de manière arbitraire, pour exprimer fortement mes impressions.» Comme en écho, Gauguin écrit à Vincent: «J'utilise une couleur assez loin de la nature, mais plus proche de mes sentiments.»

    <i>Le Petit Paysan</i> de Cézanne

    Le Petit Paysan de Cézanne Crédits photo : Tate, Londres, 2012

    Ce rôle primordial accordé à la couleur, en liaison avec les émotions du peintre comme composantes picturales, se reconnaîtra dans le fauvisme, ce «pot de peinture jeté à la figure du public», selon l'expression du critique Camille Mauclair. Le mouvement devra beaucoup à l'art de Van Gogh à partir de 1888, quand il quitte Paris pour Arles. Il prend le contre-pied de l'impressionnisme simplement en en inversant les termes: l'objectif de Monet, Renoir et les autres était de retranscrire sur la toile les sensations qu'ils recevaient du monde extérieur. Celui de Van Gogh, à l'inverse, sera de faire partager, via la toile, ce qu'il ressent (Champ de blé ; Vue sur Arles).

    La rétrospective de Vincent au Salon des indépendants de 1905 sera une révélation pour les jeunes peintres fauves qui adhèrent à l'autonomie de la couleur: Matisse et Derain, qui travaillent ensemble à Collioure, exécutent les premières toiles aux couleurs pures, puissantes, stridentes mises en contraste les unes avec les autres (Derain, Les Faubourgs de Collioure). Friesz et Braque, qui se retrouvent durant l'été 1907 à La Ciotat et à l'Estaque (Friesz, Cassis). Dufy, qui adhère au groupe dès 1905 (Paysage de Provence). Comme Van Gogh,

    Gauguin va s'opposer au flou de l'impressionnisme en introduisant des aplats de couleurs vives qui, par leur simplification, influenceront à la fin du siècle le mouvement nabi (Bonnard, Le Cannet) puis se retrouveront dans le jeu abstrait des formes et des couleurs. A cette révolution par la couleur s'oppose la révolution par la forme qui découle de la leçon de Cézanne, considéré avec Van Gogh comme le père tutélaire de l'art moderne. Ils se répondent lorsque l'on aborde la question débattue en peinture depuis le XVIIe siècle et toujours présente dans les préoccupations des artistes: la ligne est-elle plus importante que la couleur? Ce qui revient ici à s'interroger sur la manière dont les peintres modernes ont regardé tantôt du côté de Van Gogh, tantôt du côté de Cézanne pour trouver leur propre voie.

    «Je n'en suis qu'au début de mes recherches», disait Cézanne, deux ans avant sa mort

    La <i>Vue de Bordighera </i>de Monet

    La Vue de Bordighera de Monet Crédits photo : © Hammer Museum, Los Angeles

    Cézanne reprochait au mouvement impressionniste de réduire le rôle de l'artiste à la pure vision matérielle, de gommer la part de l'intelligence créatrice en faisant de la peinture un art imitatif. Il apparaîtra vite comme le principal maillon entre l'impressionnisme et la peinture du début du XXe siècle. Pour lui, la toile du peintre n'est plus le lieu où l'on simule une représentation de l'espace à l'aide de la perspective mais un domaine d'expérimentation basé sur la forme, le fractionnement des points de vue et des couleurs modulées en harmonie: «Quand la couleur est à sa richesse, la forme est à sa plénitude», affirmait-il.

    En organisant en 1895 la première rétrospective de l'oeuvre du peintre, le galeriste Ambroise Vollard déclenche un formidable mouvement d'opinion envers Cézanne. Les peintres sont bien sûr les premiers à comprendre que l'artiste est une référence. Matisse le considère comme «une sorte de bon Dieu de la peinture»; toute sa vie il refusera de se séparer d'une petite toile de Cézanne représentant des baigneuses, dont il disait: «Cette oeuvre m'a soutenu moralement dans les moments critiques de mon aventure d'artiste ; j'y ai puisé ma foi et ma persévérance.»

    <i>Le Faubourg de Collioure</i> de Derain

    Le Faubourg de Collioure de Derain Crédits photo : Collection Centre Pompidou, Dist. RMN-Philippe Migeat

    Et Picasso, indigné par un visiteur qui essayait de lui vendre un faux Cézanne, s'était exclamé: «Si je connais Cézanne? Il est mon seul et unique maître. Vous pensez bien que j'ai regardé ses tableaux... J'ai passé des années à les étudier.» L'ascendance cézanienne est en effet manifeste dans Le Nu bleu de Matisse comme dans Les Demoiselles d'Avignon de Picasso. Le peintre d'Aix aura contribué à mettre les artistes sur la voie du cubisme. Dans l'histoire de l'art, Cézanne est l'un des seuls maîtres qui rassemble autant de jugements et d'hommages des plus grands peintres de son temps comme des plus grands de ses successeurs. A la fin de sa vie, pourtant, Cézanne disait qu'il n'en était qu'au début de ses recherches! Un hommage posthume lui sera rendu au Salon d'automne de 1907: au-delà des fauves, des cubistes, de Picasso, de Matisse, de Bonnard, la plupart des peintres abstraits le prendront à leur tour pour référence.

    Dès 1892, les peintres sont les premiers à s'installer à Saint-Tropez

    Longtemps, les peintres qui faisaient le traditionnel «tour d'Italie» pour parfaire leur formation avaient traversé le sud de la France sans s'y arrêter. A partir des années 1880, le Midi sera au contraire leur terre d'élection. Séduits par les paysages, fascinés par la lumière, ils se réuniront le long du littoral, de Collioure à Saint-Tropez, qu'on ne pouvait alors atteindre qu'en bateau. Installé en Arles, Van Gogh, qui avait rêvé du Midi en homme du Nord, pensait avoir découvert un monde nouveau. C'est lui qui décrira en poète ce Midi que tous les peintres ont alors aimé: «Ici, même en fortifiant toutes les couleurs, y compris le rayonnement de soufre pâle du soleil et le bleu admirable de la coupole du ciel, on obtient encore le calme et l'harmonie. Il arrive quelque chose de semblable avec la musique de Wagner: bien qu'exécutée par un grand orchestre, elle n'en est pas moins intime.»

    Le Grand Atelier du Midi, musée Granet, place Saint-Jean-de-Malte, Aix-en-Provence et musée des Beaux-Arts, palais Longchamp, 2, rue de la Charité, Marseille, du 13 juin au 13 octobre 2013.

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      Le bonheur de peindre au soleil de la Méditerranée

      Le Midi a été une source infinie d'inspiration pour les peintres. Une superbe exposition composée de deux volets présentés simultanément à Marseille et à Aix-en-Provence évoque cette terre de la modernité.

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    <i>Antibes. Couchant rouge</i> (1918-1919), de Paul Signac.

    Antibes. Couchant rouge (1918-1919), de Paul Signac. Crédits photo : Piotr Trawinski/Collection particulière/Musée FabreMontpellier

    À Montpellier, la rétrospective du maître du pointillisme, organisée pour le 150e anniversaire de sa naissance, est un bain de couleurs.

    Envoyé spécial à Montpellier

    «Signac navigateur aimait la mer démontée et le vent ravageur», a témoigné Francis Jourdain, le fondateur des arts décoratifs modernes en France. Signac peintre préférait au contraire les eaux calmes. Celles qu'il pouvait saisir sur le motif par une aquarelle et recomposer méthodiquement, à l'huile, dans l'atelier. Elles lui ont offert leurs infinis et mouvants ­clapotis aux couleurs innombrables, jusqu'à l'achromie quand certains scintillements sont signifiés par de ­minuscules espaces laissés en réserve sur la toile ou le papier.

    C'est sur ce thème de l'eau - avec une prédilection pour la Méditerranée - que le Musée Fabre de Montpellier, à la suite de celui de Giverny, a construit sa rétrospective. Un bel hommage pour le 150e anniversaire de la naissance de cet artiste charnière entre le XIXe et le XXe siècle, comme le prouvent, à l'ouest, les actuelles expositions sur la Normandie impressionniste et, au sud, celles sur les artistes venus travailler dans le Midi, de Van Gogh à Picasso.

    À l'entrée, Signac accueille le public par l'entremise de son magnifique portrait exécuté par Théo van Rysselberghe, autre néo-impressionniste de poids. Main ferme sur la barre du mouvement pointilliste initié par Seurat mais théorisé par lui ; profil impérial se découpant sur la voile ; épaules dans l'axe de la bôme… Exceptée sa casquette bleue Signac n'a rien d'un capitaine Haddock. Il scrute le plan aqueux en connaisseur. La risée à l'arrière-plan, il a su avant Théo la rendre dans ses mille et uns éphémères détails ; ici par une myriade de points bleus et rouille.

    Autodidacte, il a cru percer le secret de la lumière, de l'atmosphère et de la perception de toute chose dans les ­livres de Blanc, de Chevreul et de Hood sur «les lois si simples du contraste ­simultané». Fort de cette théorie qui allait discipliner son pinceau, il a poussé plus loin, avec méthode et minutie, l'œuvre de Monet son modèle. «Pendant les dix minutes que dure le coucher de soleil, j'ai pu prendre huit renseignements écrits avec échantillon de teintes à l'aquarelle» se félicite-t-il en 1896. On croirait entendre le patriarche de ­Giverny.

    Les primaires doivent être divisées et organisées en fonction de leurs complémentaires pour, sur la toile, faire régner l'harmonie. Cet art qui repose sur un solide socle théorique a d'emblée été taxé d'intellectualisme. Mais il n'est jamais exempt de ce que Signac appelait «le sentiment», cette liberté instinctive du créateur dont il déplorait déjà l'effacement à son époque. En plaisance comme en peinture, on peut savoir lire une carte, dominer un courant, garder un cap mais, fort de cela, se laisser aller au gré des vents et des paysages.

    Un grand bonheur

    Or, venu par la mer, comment ne pas succomber à Collioure, Marseille, ­Cassis, Saint-Tropez, Antibes et puis encore à Gênes, Venise (200 aquarelles peintes sur le motif à elle seule), Constantinople… S'en suivra, à soixante-six ans passés, un tour systématique des ports de France. Avant il y avait eu aussi la Manche jusqu'à la Hollande. Et les canaux! Insatiable Signac? L'exposition, thématique, qui cabote ainsi, de site en site, pourrait le laisser croire.

    Mais ce caractère est trop solaire pour ne pas savoir qu'épuiser les ressources du paysage maritime équivaut à vouloir boire l'océan. Jamais de frustration donc dans cette œuvre. Rien qu'un grand bonheur. L'odyssée est à entreprendre, elle vous prendra plus que le temps des vacances.

    Jusqu'au 27 octobre au Musée Fabre, Montpellier. Tél.: 04 67 14 83 00. Catalogue Gallimard, 235 p., 35 €.


    Une splendide armada

    Au Musée Fabre, la rétrospective Signac débute sur les rives de la Seine, à quelques coups d'avirons de l'île de la Grande Jatte chère à Seurat, aux Andelys précisément où La Berge de 1886 entérine la première la révolution pointilliste. On fait escale dans les deux rotondes centrales étourdissantes. Exceptionnellement, y sont reconstituées les premières séries de tableaux ­telles que Signac lui-même les exposait aux Salons des indépendants à Paris et des XX à Bruxelles, en 1892. Saint-Briac et Concarneau y sont à l'honneur. Sable blond, eau azur, tons chauds, ensembles conçus comme des symphonies… On aborde 1903 et le choix de la dominante rose, mauve et bleu. Les contours deviennent évanescents. Le château Grimaldi d'Antibes se multiplie comme la cathédrale de Rouen avec Monet. Trente ans plus tard Picasso y posera d'autres couleurs. Nicolas de Staël aussi…

    Des œuvres à part entière

    On met le cap sur l'ensemble d'esquisses pour la décoration de la salle des fêtes de la mairie d'Asnières. Il a été intégralement restauré. Il date de 1900. Il n'avait pas été présenté au public depuis un demi-siècle. Signac a été le candidat malheureux de ce concours auquel participait Dufy, Friesz, le Douanier Rousseau et cent dix autres artistes. C'est finalement un petit maître marseillais, Henri Bouvet (1859-1945), qui avait été retenu pour cette synthèse, hommage à la Seine et à ses nombreux chantres modernes. Quelle erreur!

    Partout, les terre-neuvas, les thoniers, les tartanes, la nature à son comble ou le ballet de fumées industrielles. Partout les grands lavis d'encre et les aquarelles, dont plusieurs du fameux tour des ports de France. Ils sont accrochés avec la même attention que les huiles.

    C'est légitime puisque Signac les considérait comme des œuvres à part entière. Au total donc, excepté un anecdotique épilogue de variations contemporaines, voici un archipel de 160 pièces (soit 47 de plus qu'à Giverny), dont 35 inédites. Une splendide et impressionnante armada.

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  • Michel Polac, ”La vie incertaine”

    medium_polac.gifMes années Gallimard

    par Jérôme Dupuis

     Avant d'entamer sa longue carrière sur les ondes, l'animateur de Droit de réponse avait publié La Vie incertaine, un premier roman très autobiographique. A l'occasion de sa réédition, il se souvient de ses «fifties» et de sa - brève - aventure avec Françoise Sagan.

    Il extirpe délicatement le volume de la bibliothèque du merveilleux appartement parisien où il vient de s'installer. A travers une treille de glycines en fleur, on aperçoit en contrebas le Jardin des Plantes. Sous les fenêtres, donc, les braiments incongrus d'un baudet du Poitou. L'ouvrage exhumé est une rareté: parue en 1956 sous la couverture blanche de Gallimard, cette Vie incertaine était signée par un jeune inconnu de 26 ans, Michel Polac. Sûr de son effet, le maître des lieux en extrait une feuille soigneusement pliée. «Grâce à ma cousine, Florence Malraux, j'ai pu obtenir les notes ultrasecrètes du comité de lecture de Gallimard à propos de mon roman.» L'une d'elles, signée d'un certain Albert Camus, prévenait: «L'auteur est à suivre de près: il est intelligent, direct et parfois émouvant.» Son autre parrain dans la maison s'appelle Jean Paulhan. «J'ai eu la grosse tête et j'étais persuadé d'avoir le Goncourt. Quel naïf j'étais! J'en ai vendu 700 exemplaires...»

    Un demi-siècle plus tard, alors que l'on réédite cette Vie incertaine, on retrouve Michel Polac, 77 ans, tel qu'en lui-même. Ne manquent que la pipe et la moustache - «Je l'ai coupée, on me confondait avec Bellemare...» Mais le foulard, les lunettes en demi-lune et, surtout, la voix doucereuse, la célèbre voix de Droit de réponse, sont toujours là. Cette réédition l'amuse. En effet, cette Vie incertaine est un peu plus qu'une curiosité: un petit roman fifties légèrement démodé, mais non dénué de charme. «Je l'ai écrit dans une cabane perdue, en Norvège, au-dessus d'un fjord enneigé, alors que je montais vers le cap Nord en 2 CV.»

    Comme tout premier roman, celui-ci est très largement autobiographique. Première clef: «Un jour où ma mère était absente, j'ai retrouvé une liasse de lettres d'amour signées d'un certain Bob. Elles coïncidaient avec la période où j'avais été conçu. Pourtant, mon père, un ancien Croix-de-Feu qui avait eu la bêtise de se déclarer comme juif et a disparu en fumée à Auschwitz, était une icône pour moi. Mais, en relisant les lettres de plus près, je me suis aperçu qu'elles étaient écrites par une... femme! C'était une entraîneuse de boîte lesbienne avec laquelle ma mère a eu une brève aventure.» Episode suffisamment troublant pour nourrir la quête des origines qui traverse La Vie incertaine.

    L'autre versant du roman épouse la vie vagabonde du jeune Polac, qui, à 18 ans, a pris la route, encore sous le choc de Travaux, un récit de Georges Navel, anar engagé aux côtés des républicains espagnols. Il exerce mille métiers: ouvrier dans une usine de serrures frigorifiques à Saint-Ouen, agent d'assurances au porte-à-porte, mousse sur un bateau de pêche à Cassis... Et puis, alors qu'il fait les vendanges à Béziers, un ami lui téléphone: «Rentre vite à Paris! Ton projet d'émission de radio a été accepté!»

    C'est le début - à 22 ans! - d'une deuxième vie, plus parisienne et littéraire. «J'ai commencé par monter En attendant Godot sur les ondes. A l'époque, Beckett était inconnu. Il m'a pris sous son aile et a toujours été extrêmement chaleureux avec moi.» Suit Le Masque et la plume, qu'il crée en 1955, et puis, donc, cette Vie incertaine. Mais son deuxième roman est sèchement refusé par une lettre type signée Gaston Gallimard. Un choc dont il ne se remettra jamais vraiment.

    Alors, ce grand séducteur se console dans les bras des femmes. Il y a prescription, on peut donc évoquer son aventure avec... Françoise Sagan! Le misanthrope bougon et le feu follet. «C'était en plein succès de Bonjour tristesse. On allait à Saint-Tropez. Je me souviens encore du déjeuner où Otto Preminger a signé le contrat pour l'adaptation du roman. Le problème, c'est qu'à l'heure où elle sortait en boîte j'allais me coucher et que, lorsqu'elle rentrait au petit matin, je partais me baigner. Cela ne pouvait pas durer...» Ainsi prit fin la - très - brève période jet-set de Michel Polac.

    Cet inlassable lecteur de Dostoïevski (son vieil exemplaire rafistolé des Frères Karamazov est toujours là, dans sa bibliothèque) lance alors des émissions de télévision - Bibliothèque de poche, Post-scriptum... - où il interviewe son idole, Witold Gombrowicz, à Vence, quelques mois avant sa mort, mais aussi Jean Renoir ou François Mitterrand. «le futur président parlait de Barrès, Chardonne, Cocteau, bref de ses goûts d'honnête notaire de province, mais de façon très guindée. Son secrétariat m'a appelé pour que nous fassions une seconde prise. Nous l'avons faite. Il était toujours aussi raide.»

    Polac aime se brouiller avec ceux qu'il a lancés
    Mais le critique littéraire Polac - aujourd'hui à Charlie Hebdo - n'aime rien tant que faire découvrir d'illustres inconnus aux Français. «J'ai défendu Cioran dès 1960. Il m'invitait chez lui à boire le thé, manger des petits gâteaux, et voulait tout savoir sur les coulisses de la télé. D'ailleurs, lorsque Droit de réponse a été déprogrammé, il a signé une pétition en ma faveur, ce qui m'a beaucoup touché.»

    Parmi les auteurs qu'il a largement contribué à lancer, citons John Fante, Luis Sepulveda, Marc-Edouard Nabe ou Michel Houellebecq. «Après mon compte rendu élogieux d'Extension du domaine de la lutte, nous nous sommes pas mal vus avec Houellebecq. Il est passé avec son épouse me saluer dans ma bergerie des Cévennes. Un soir, il m'a même entraîné dans une boîte échangiste de Cap-d'Agde. Je suis resté entièrement habillé et il me l'a reproché...»

    Car, par-dessus tout, fidèle à sa réputation, Polac aime se brouiller avec ceux qu'il a lancés: Nabe, Houellebecq et même Kundera, après un retentissant article, Kundera, go home!, où il conseillait au romancier d'origine tchèque d'écrire dans sa langue natale plutôt que directement en français! Il excelle - ou exaspère - encore aujourd'hui dans ce rôle de tonton flingueur, au côté de Laurent Ruquier, aux heures tardives du samedi soir sur France 2. Tapie et Doc Gynéco ont même quitté le plateau sous les assauts de cet atrabilaire. Il en sourit: «Oh, vous savez, moi, tant qu'on me laisse parler de littérature et réciter des poèmes coréens, même entre deux starlettes...»

    La Vie incertaine
    Michel Polac
    éd. Neige, Ginkgo

    258 pages
    15 €
    98,39 FF


    http://livres.lexpress.fr/portrait.asp/idC=12746/idR=5/idG=8

  • VENISE

    A Venise, on danse partout

    Muriel Steinmetz
    Lundi, 6 Juillet, 2015

    boris.jpg

    La chorégraphe belge Anne Teresa de Keersmaeker et le Français Boris Charmatz, en duo sur la scène de la Cour d'honneur du Palais des papes sur la «Partita N³2 de Bach en 2013.
    DR
    Dans l’intervalle de la biennale qui n’a pas lieu cette année, Virgilio Sieni qui dirige la manifestation a tenu à remette un Lion d’Or à Anne Teresa de Keersmaeker et invité Boris Charmatz, entre autres.
    Venise, envoyée spéciale. Venise arbore ses façades écaillées de lumière.  Le Lido rivalise avec Saint-Tropez. La vieille  Cité lacustre que Proust voyait comme le « haut lieu de la beauté  » se débat avec des hordes de touristes. L’eau noire des canaux  battue en neige  par les hélices des paquebots  monstres ronge la base des  palais. Les vestibules sont inondés. Les escaliers couvets d’algues vertes et glissantes. En cette année creuse pour la biennale de la danse, des événements dévolus à cet art ont toutefois eu lieu récemment dans la Sérénissime. Virgilio Sieni qui préside à la manifestation a remis un Lion d’Or à la chorégraphe belge Anne Teresa de Keersmaeker.
     
    Au Théâtre Alle Tese de l’Arsenale, elle a dansé « Fase. Four mouvements to the Music of Steve Reich » ( 1982),  une suite de prouesses physiques répétitives. Reich qui a regardé l’oeuvre en son temps a dit: “Jamais  je n’avais vu une telle révélation chorégraphique à partir de mon travail ».  Dans le premier mouvement intitulé «  Piano Phase »,  Anne Teresa de Keersmaeker et Tale Dolven, vêtues de robe gris perle, chaussures et socquettes blanches aux pieds, évoluent d’abord sur une ligne latérale en gestes simples, toujours les mêmes. Dans « Come out », en pantalons gris avec poches sexy, chemise beige et bottines noires, elles sont assises sur des tabourets. Depuis cet axe fixe, elles effectuent des gestes répétitifs des bras et du buste tandis que leurs jambes sont au chômage.
     
    La chorégraphe au gouvernail compte à voix haute les changements de registres. On dirait des ouvrières prises dans les rouages d’un mouvement perpétuel.  Dans «  Violin Phase », Keersmaeker est seule (robe grise, socquettes de collégienne) à se mouvoir autour et dans un cercle de lumière, balançant parfois la jambe, montrant sa culotte comme une petite fille. Avec « Clapping Music » enfin, les deux interprètes s’avancent de profil en demi pointes, légers rebonds et claquements de mains. C’est à la fois minimaliste, bondissant, hyper structuré et sensuel.
     Dans ce même théâtre, on a pu assister à « Roman photo », courte pièce de Boris Charmatz  (à la tête du Musée de la danse/ Centre chorégraphique national de Rennes et de Bretagne) et Olivia Grandville, dansée par des interprètes amateurs italiens choisis sur place via une vidéo envoyé au chorégraphe. Ils n’ont eu que 70 heures pour répéter ! Les gestes complexes sont précis, pas plus d’une minute chacun. La pièce se donne sous la forme d’un regard en coin jeté sur l’œuvre de Merce Cunningham. Tandis qu’Olivia Granville au pupitre tourne lentement les pages d’un livre de David Vaughan (« Merce Cunningham, un demi siècle de danse »), les interprètes reproduisent les figures photographiées dans l’ouvrage. Tout est performé du début à la fin.
    Ils portent les fameux justaucorps qui constituent l’une des marques de fabrique du maître de la post-moderne danse américaine, un brun plus colorés. Ce mini-event constitue une vraie prouesse et l’on salue à plein le résultat.
    Par ailleurs, Virgilio Sieni, très attaché à ce que la danse soit partout chez elle à Venise, multiplie les rencontres où le mouvement s’épanouit en plein air ou dans la stricte rigidité des demeures historiques. Il a ainsi donné l’occasion à des amateurs d’interpréter in situ des œuvres de chorégraphes choisis par eux. La durée des pièces n’excède jamais vingt minutes.
    On a ainsi vu notamment « Nous serons tous des étrangers » du  franco-tunisien Radhouane El Meddeb,  dansé par six interprètes sur le « Campo san Trovaso », petite place devant une église près de laquelle un canal passe sous un pont de marbre. Les danseurs qui miment la révolte, sont observés par le public volontaire ou involontaire qui passe et s’arrête : boutiquiers, artisans, employés de commerce. Sur le Campo Sant’Angelo, vaste place d’où l’on voit sur les balcons sécher des draps blancs, et où chacun remarque une cage d’oiseau suspendue entre deux pots de fleurs, sept danseurs donnent « Dirty hands and beauty », conçue par le Catalan Cesc Gelabert. Ce sont des mimes prodigieux. Les doigts au bout des mains complotent. Le visage de chacun est une comédie et une tragédie. Pièce forte qui joue le désir. Ils plongent leurs bras dans de l’argile liquide et leurs gesticulations se figent et durcissent à vue d’oeil devant un public médusé.  On apprécie la volonté de Virgilio Sieni d’ainsi vouloir essaimer dans la ville des créations de qualité contrastée offertes à tous.
     

  • La Banque, le nouveau musée des cultures et du paysage à Hyères(nouvelle catégorie même si nous y sommes allés il y a qu

    En mettant les collections de son musée dans l’ancienne Banque de France de la ville et en organisant une première exposition dédiée à la lumière du Midi, Hyères met l’art à la banque et réussit son pari haut la main. par Guy Boyer

    Un joli fonds XIXe

     

  • Ouverture du musée Pierre Bonnard au Cannet le 25 juin 2011

     

    Le 25 juin 2011, le premier musée au monde consacré à Pierre Bonnard ouvre ses portes au Cannet, ville de prédilection du peintre. A cette occasion, une exposition inaugurale est organisée “Bonnard et Le Cannet. Dans la lumière de la Méditerranée”.

     

     

    Le Cannet comme une évidence

    Tout comme Giverny pour Claude Monet, Nice pour Matisse, Le Cannet était un lieu prégnant pour Pierre Bonnard. Il y acheta en 1926 la villa Le Bosquet et y passa plus de vingt ans. Véritable source d’inspirations, lieu de recueillement artistique... la ville et l’environnement de sa maison l’inspira au point qu’il y réalisa ses plus belles oeuvres. Encore trop méconnu du grand public, Bonnard a fait partie des 7 artistes qui ont représenté la France à l’exposition universelle de Shanghai en 2010. C’était donc légitime que Le Cannet célèbre Bonnard en lui offrant son premier musée.

    Un hommage pérenne

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    Pierre Bonnard, Autoportrait (Le Boxeur), 1931 huile sur toile, 54 x 74 cm, Paris, musée d’Orsay, don de la Fondation Meyer, 2000 © Adagp, Paris 2011 © RMN (Musée d’Orsay) / Michèle Bellot

    Tout en prenant en compte la totalité de la carrière de Pierre Bonnard, le contenu scientifique du musée est essentiellement centré sur sa période du Cannet (1922-1947). En dehors de l’exposition inaugurale « Bonnard et Le Cannet. Dans la lumière de la Méditerranée » le musée met en place deux expositions par an, une exposition d’envergure et une exposition de type dossier. Enrichissement de la collectio n Les oeuvres de Pierre Bonnard sont trés recherchées et donc rares sur le marché. Chaque année un budget est consacré à l’acquisition d’oeuvres. A ces achats, s’ajoutent des dons qui sont une belle preuve de confiance de la famille du peintre d’une part, et de mécènes d’autre part, tels que la Fondation Meyer pour le développement artistique et culturel.

    L’exposition inaugurale : Bonnard et Le Cannet, Dans la lumière de la Méditerranée

    26 juin – 25 septembre 2011 - inauguration le 25 juin

    « Cette exposition est reconnue d’intérêt national par le ministère de la Culture et de la Communication/Direction générale des patrimoines/Service des musées de France. Elle bénéficie à ce titre d’un soutien financier exceptionnel de l’État » Le thème de la première exposition s’est naturellement imposé par rapport au territoire, mais aussi parce que les oeuvres réalisées au Cannet entre 1922 et 1947 constituent la singularité et la marque de Pierre Bonnard. Elle réunira une quarantaine de peintures et près de 20 oeuvres sur papier réparties autour de 4 chapitres, et se déploiera sur l’ensemble des espaces d’exposition. Des chefs-d’oeuvre aussi incontournables que L’Autoportrait en boxeur, l’Atelier au mimosa, La Terrasse ensoleillée, Baignoire ou L’Amandier en fleurs feront partie de ce premier événement.

    « Ce peintre », écrira son neveu Charles en 1927, « qui ne veut peindre que des bonheurs n’est pas l’homme gai que l’on pourrait croire. […]. Il promène sur le monde un regard qui ne lui laisse échapper aucune de ses douleurs, aucune de ses incompréhensibles lois. » Aucune des deux guerres mondiales qu’il a connu comme la crise économique des années 30, ne sont évoquées dans cette oeuvre magistrale qui se déroule en parallèle au temps qui passe.

    L’oeuvre inclassable de Bonnard est intemporelle et détachée du temps. Sa relecture et la création d’un musée qui lui est dédié participent à sa reconnaissance.

    1 . La Découverte du Midi

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    Pierre Bonnard, Sur la côte, Antibes, 1912, huile sur toile, 29 x 35 cm, bequest 1932 by Föreningen för inköp av svensk och fransk konst the Nationalmuseum, Stockholm © Adagp, Paris 2011 © The Nationalmuseum, Stockholm

    Pierre Bonnard découvre le Midi très tôt, dès 1904 à Saint-Tropez où séjournent ses amis Édouard Vuillard et Ker-Xavier Roussel. Il rend visite à Valtat et Signac, lequel reçoit la même année celle de Matisse et Derain en route vers le Fauvisme. Invité par Manguin, Bonnard reviendra à Saint-Tropez durant un plus long séjour à l’été 1909 qui lui permettra de peindre quelques toiles. Il ne cessera d’alterner des voyages entre Paris, la Normandie et le Midi jusqu’en 1914. Dans le Midi, Bonnard découvre une lumière et une végétation qu’il ne connaît pas ; la couleur des eucalyptus, oliviers, amandiers et mimosas se révèle sous la lumière de la Méditerranée. L’impact sur Bonnard est immédiat ; il écrira à sa mère une phrase désormais célèbre : « J’ai eu un coup des Mille et Une Nuits. La mer, les murs jaunes, les reflets aussi colorés que les lumières ... ».

    2. La Vie intérieure – Nus, natures mortes et intérieurs

    « La peinture doit revenir à son but premier, l’examen de la vie intérieure des êtres humains ». P. Bonnard Pierre Bonnard choisit Le Cannet dès 1922 pour venir passer plusieurs mois par an et s’imprégner de l’atmosphère de sa lumière et de ses couleurs en différentes saisons. Mais ce n’est qu’en 1926 qu’il acquiert Le Bosquet, une maison sur les hauteurs de la ville qui lui offre une vue dominante sur la baie de Cannes et le massif de l’Estérel.

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    Pierre Bonnard, Le Bain ou Baignoire, 1925 huile sur toile, 86 x 120,6 cm, Tate, Londres : Presented by Lord Ivor Spencer Churchill through the Contemporary Art Society, 1930 © Adagp, Paris 2011 © Tate, Londres, 2011

    Cette maison, dans laquelle il réalise plusieurs transformations, telles que la création d’une salle de bains, d’un atelier, d’un balcon etc. - sera un environnement privilégié et lui fournira le sujet de nombreuses compositions. Certaines font partie des standards de sa peinture. Récurrence de certains thèmes, jeux de miroirs et de reflets, atmosphère habitée, etc, tout est là pour signifier la profondeur des sentiments et le silence des attitudes.

    3. Paysages - Un monde de sensations

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    Pierre Bonnard, La Forêt de pins, 1924, huile sur toile, 56 x 47 cm, Fondation Bemberg, Toulouse © Adagp, Paris 2011

    « J’ai acquis une âme de paysagiste ayant fini par me débarrasser du pittoresque, de l’esthétique et autres conventions dont j’étais empoisonné [...] » écrit Bonnard à son ami Vuillard en 1935. Le paysage a joué un rôle très important dans la pratique picturale de Bonnard. C’est par ce genre que le peintre se distingue des différents mouvements d’avant-garde. Ses premiers paysages peints au Cannet montrent combien le peintre a une vision classique et moderne à la fois , peu à peu gagnée par la synthèse. En 1940, il distinguera 4 types de paysages : « paysage à espace avec fonds intéressants, paysage intime avec objets expressifs, paysage effet de lumière prédominant, paysage décoratif peu de ciel et meublé ». Chaque tableau rend compte de son originalité face au sujet, au format rarement standard, à l’importance donnée à la couleur et à la lumière, tout comme à l’expression de la sensation.

    4. La couleur a le pouvoir de l’abstraction - OEuvres ultimes

    - Paysages et autoportraits Les paysages ultimes de Bonnard peints en pleine guerre ne contiennent aucune trace du drame que l’Europe traverse. Dans ce contexte particulièrement sombre, et comme pour conjurer la réalité, il n’y a jamais eu autant de jaune et d’éblouissement coloré dans sa peinture. À l’opposé, ses autoportraits faits pour lui seul indiquent « sa part d’ombre ». « Celui qui chante n’est pas toujours heureux » écrit-il trois ans avant sa mort. 15 autoportraits scandent l’analyse qu’il fait de lui-même de 1889 à 1946, à chaque fois, à des moments clefs de l’évolution de sa pensée et de sa peinture, souvent des moments de crise. Quatre de ces autoportraits seront présentés à l’exposition. À la différence du corps de Marthe, le corps représenté de Bonnard vieillit, trahit les traces du temps et des songes. Restant à la surface de la peau chez Marthe, il entre dans les plis et les rides de son propre corps, comme pour mieux entrer en lui. Ces autoportraits sont à juste titre des références incontestées de ce genre dans l’histoire de l’art du xxe siècle. Qu’il apparaisse face au spectateur, en boxeur, le poing levé, les pinceaux à la main, ou en ermite, le regard absent ou si profond, que chaque autoportrait dit l’intensité de ses réflexions et l’opacité de l’être. Bonnard livre un combat avec lui-même et avec la peinture, tout en continuant à s’émerveiller à coup de taches colorées devant la beauté des paysages du Cannet qui l’entourent, et son paradis, sa maison. « Le tableau est une suite de taches qui se lient entre elles et finissent par former l’objet, le morceau sur lequel l’oeil se promène sans aucun accroc. » déclarait Bonnard à Tériade en 1942.

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    - Pierre Bonnard, La terrasse ensoleillée, 1939-46, huile sur toile, 71 x 236 cm, collection particulière © Adagp, Paris 2011

    Informations pratiques

    4 473 553 € : Coût des travaux de réhabilitation, d’extension et de muséographie. Le conseil général des Alpes-Maritimes participe à 30 % dans le cadre du contrat de plan département-ville du Cannet. Le conseil régional de Provence-Alpes-Côte d’Azur pour 10 %

    1. Le musée Bonnard en quelques dates

    - 1983 Michèle Tabarot, Adjoint à la culture de la ville du Cannet noue les premiers liens avec la famille de l’artiste.
    - 1995 Michèle Tabarot est élue Maire du Cannet.
    - 1998 Acquisition par la ville de l’Hôtel Saint-Vianney. 2001 Exposition Pierre Bonnard sous la lumière du Cannet à l’Espace Bonnard. Suivent chaque année des expositions consacrées à Pierre Bonnard où son environnement artistique.
    - 2003 Le Conseil municipal approuve le principe de création d’un musée sur le site de l’Hôtel Saint-Vianney. Premières acquisitions de la Ville du Cannet et premiers soutiens. Création d’un Comité scientifique placé sous l’égide de Françoise Cachin, honorée Directeur des musées de France.
    - 2004 Renaud Donnedieu de Vabres - Ministre de la Culture et de la Communication, lors de sa visite sur le site de l’Hôtel Saint-Vianney, exprime son soutien au projet.
    - 2005 Un concours de maîtrise d’oeuvre est lancé.
    - 2006 1er trimestre : L’équipe d’architectes est retenue : Frédéric Ferrero et Sylvie Rossi sont associés à Birgitte Fryland pour la muséographie et Jérôme Mazas, paysagiste. Décembre : Sur proposition du Haut Conseil des musées de France, le musée Bonnard obtient le label musée de France. Le musée reçoit par l’entremise de la Fondation Meyer pour le développement culturel et artistique, une première promesse de dépôt de l’État : Paysage soleil couchant, Le Cannet, v. 1923 Le musée prête 3 oeuvres à l’exposition Del Complesso del Vittoriano à Rome.
    - 2007 Mars : La maison de Bonnard, Le Bosquet et son jardin sont classés Monuments historiques.
    - 2008 Seconde promesse de dépôt de la Fondation Meyer : Vue du Cannet, 1927 Achat de la ville du Cannet avec l’aide de l’État de la peinture Les Baigneurs à la fin du jour, v. 1945, anc. Coll. Tériade

    Historique du musée

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    ndré Ostier, Portrait de Pierre Bonnard (Le Cannet), 1941, épreuve gélatino-argentique d’époque, musée Bonnard, Le Cannet, achat 2006

    - 2009 Janvier : La ville du Cannet participe au vernissage de l’exposition Bonnard The Late Still Lifes and Interiors au Metropolitan Museum à New-York et annonce l’ouverture prochaine du musée Bonnard. Des liens privilégiés sont créés avec la Collection Phillips à Washington. Juillet : Début du chantier. Novembre : Accord de principe pour le dépôt du musée d’Orsay, La Salle à manger au Cannet, 1932 Prêt de 5 oeuvres à l’exposition Bonnard, guetteur sensible du quotidien au musée de Lodève.
    - 2010 Janvier : Achat par la ville du Cannet avec l’aide de l’État et du mécénat privé, Nu de profil, v. 1917. Mars : Achat par la ville du Cannet d’un rare exemplaire de La Promenade des nourrices, frise de fiacres, lithographie en 4 panneaux. Septembre : Le musée Bonnard prête deux oeuvres majeures à l’exposition Bonnard Magier der Faber au Von der Heydt Museum à Wuppertal. Décembre : Identité visuelle par Vincent Hanrot, agence Bik et Book, Marseille.
    - 2011 Samedi 25 juin : inauguration du musée Bonnard, premier musée au monde consacré à cet artiste, avec l’exposition Bonnard et Le Cannet. Dans la lumière de la Méditerranée.

    2. De la villa du Bosquet au musée Bonnard : une profonde légitimité

    « Dans la lumière du Midi, tout s’éclaire et la peinture est en pleine vibration. Portez votre tableau à Paris : les bleus deviennent gris. » P. Bonnard , 1946 Bonnard a séjourné au Cannet par intermittence de 1922 à 1947. Il loue trois villas entre 1922 et 1926 avant d’acquérir en 1926 Le Bosquet, une maison sur les hauteurs de la ville où il se retire définitivement de 1939 à sa mort. Les paysages du Cannet et la lumière du Midi sont pour lui des sources d’inspiration inépuisables. C’est durant cette période qui dure près de 22 ans qu’il peint ses tableaux les plus inspirés, ceux dont les spécialistes s’accordent à dire qu’ils sont ses plus belles oeuvres. Le paysage environnant agit en profondeur sur Bonnard au même titre que la Sainte-Victoire pour Cézanne ou Giverny pour Monet, comme des territoires prégnants. C’est cette histoire de lien et d’identité entre Bonnard et Le Cannet qui donne sa profonde légitimité au musée.

    3. Le Bâtiment

    Un des derniers témoignages de l’architecture Belle Époque, l’Hôtel Saint-Vianney, 1908. Typique des constructions du début du siècle, cette villa porte le nom du fondateur de l’église Sainte Philomène, Jean-Marie Vianney - patron de tous les curés - canonisé en 1925. Construite en 1908 par M. Lauthaume, elle sert d’habitation à usage privé jusqu’en 1935. 11 dossier de presse du musée Bonnard Une société immobilière en fait l’acquisition et confie à l’architecte Briet le soin d’en modifier la façade et de surélever la partie ouest. La villa devient alors une pension de famille, puis de 1943 à 1947, un commissariat de police et reprend son activité hôtelière jusqu’en 1990. Sauvée de la démolition par l’intervention de l’architecte des Bâtiments de France, la ville du Cannet l’achète en 1998 dans l’intention de créer un musée. L’implantation du musée vient s’intégrer dans un projet urbain plus vaste qui prévoit une requalification des abords. Un projet de parking attenant est en cours de consultation.

    4. Le Musée

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    Projet © Frédéric Ferrero/Rossi

    Le musée Bonnard a un statut municipal, il bénéficie du label musée de France. À ce titre, il est contrôlé par l’État. Intégralement climatisé et accessible aux handicapés, le musée se développe sur cinq niveaux avec d’importants espaces d’accueil du public, comprenant boutique, salle pédagogique, salle de projection ainsi qu’une terrasse ouverte sur le jardin. Les collections se déploieront sur les trois niveaux d’exposition. Durant les expositions temporaires, une partie ou l’ensemble de cet espace sera investi. Chaque salle sera équipée de fiches de salle et il sera possible de louer un audio-guide multimedia avec une version spécifique pour le jeune public ainsi qu’une version en langue des signes française. Des écrans multimédias permettront de consulter les carnets ou agendas de Pierre Bonnard.

    5. Le Parti architectural

    Le projet s’inscrit dans un maillage urbain et paysagé à partir d’une logique multi-sites structurée comme une promenade sur les pas de Bonnard. La réhabilitation du site de la villa Hôtel Saint-Vianney développe près de 890 m2 de surface utiles, dont 495 m2 à partir du bâtiment existant. Une extension correspondante aux surfaces supplémentaires (395 m2) est réalisée dans le dénivelé du terrain et permet de créer un important espace d’accueil, une salle pédagogique et une boutique ainsi qu’une vaste terrasse. La façade est largement ouverte sur le boulevard Sadi Carnot et marque l’entrée du musée. L’édification d’une colonne vitrée, contenant une cage d’escalier et un ascenseur décollés du bâtiment existant par une passerelle, permet l’accès aux personnes handicapées, tout en offrant une vue imprenable sur le paysage. La structure interne de la villa Hôtel Saint-Vianney est reprise dans sa totalité, les espaces sont redistribués afin d’offrir des espaces d’accrochage les plus importants possibles. Les installations techniques (gestion de la température, de l’hydrométrie et de l’éclairage) répondent aux exigences muséales édictées par la Direction des musées de France et sont conformes aux réglementations internationales. Le parti pris préserve l’esprit des lieux.

    6. Parcours pédestre Sur les pas de Bonnard….

    Le sentier de découverte du canal de la Siagne constitue un élément important du projet muséographique du musée Bonnard. Outre sa vocation de

  • Le tour de France des expositions

    Par Valérie Duponchelle Mis à jour le 03/07/2012 à 12:26 | publié le 03/07/2012 à 06:00 
    <i>Parade</i>, 1917, ce monumental rideau de théâtre est le plus grand Picasso du monde. Il est exposé au Centre Pompidou-Metz.<i></i>
    Parade, 1917, ce monumental rideau de théâtre est le plus grand Picasso du monde. Il est exposé au Centre Pompidou-Metz. Crédits photo : Succession Picasso, 2011/ Christian Bahier et Philippe Migeat - Cetre Pompidou, MNAM-CCI/Dist. RM-GP

    Sélection des plus belles haltes sur les routes des vacances, de Chambord à Nantes, de Quimper à Ajaccio.

     VENCE. La collection Burda au Musée Granet

    Toute la peinture allemande du XXe en 50 chefs-d'œuvre, d'August Macke à Gerhard Richter. Avec, aussi, De Kooning et Picasso. Jusqu'au 30 septembre.

    COLMAR. Matthias Grünewald et Adel Abdessemed

    À côté du retable d'Issenheim, le tableau absolu de Grünewald (vers 1512-1515), le Musée d'Unterlinden présente les Christ d'acier d'Adel Abdessemed, jusqu'au 16 septembre.

    LANDERNEAU. Gérard Fromanger pop à la Fondation Leclerc

    Couleurs vitales et conscience très politique avec ce peintre joyeux de la figuration narrative. Jusqu'au 28 octobre.

    NANTES. «Le Voyage à Nantes»

    Toute la ville et son estuaire sont«renversés par l'art», du Serpent d'océande Huang Yong Ping à l'Observatoire des marais de Kawamata. Jusqu'au 19 août.

    NÎMES. Vera Lutter au Carré d'Art

    Négatif? Positif? La photographe allemande transforme le Carré d'Art en camera obscura, boîte transparente et lumineuse. Jusqu'au 16 septembre.

     

    <i>L'Artiste Marcella</i>, 1910, Ernst Ludwig Kirchner et «Die Brücke», à Quimper.
    L'Artiste Marcella, 1910, Ernst Ludwig Kirchner et «Die Brücke», à Quimper. Crédits photo : Brücke-Museum, Berlin

     

    QUIMPER. Les peintres sauvages de Die Brücke

    Après le Musée de Grenoble, ces peintres dans le vent expressionniste sont en Bretagne, du 11 juillet au 8 octobre.

    SAINT-PAUL-DE-VENCE. Gasiorowski tout fou à la Fondation Maeght

    «Fou de peinture», «le plus peintre d'entre nous», selon Jacques Monory, Gérard Gasiorowski a disparu en 1986, à 56 ans. À redécouvrir jusqu'au 30 septembre.

    MONACO. L'art «Extra large» au Forum Grimaldi

    Le Centre Pompidou expose ses artistes en «Extra large»: Miró, Dubuffet, Matta, Soulages, Stella, Yan Pei-Ming, Beuys, Sol LeWitt, Anish Kapoor ou Bill Viola. Jusqu'au 9 septembre.

    CHAMBORD. La chair de Rebeyrolle au château

    Tous les corps à corps en matière de Paul Rebeyrolle (1926-2005) envahissent Chambord sous l'œil vif de Jean-Louis Prat. Jusqu'au 23 septembre.

    TOURS. Les clichés de Bourdieu

    Exposition au château de 150 photos de la société algérienne prises par le sociologue pendant la guerre d'Algérie. Jusqu'au 4 novembre.

    METZ. «1917» en guerre au Centre Pompidou

    Que répond l'art à la guerre? Coupe transversale dans les combats et les ateliers, plus de 1000 œuvres en tourbillon dans une scénographie en spirale. Jusqu'au 24 septembre. On peut aussi s'éblouir devant Doug Wheeler au Frac Lorraine, jusqu'au 11 novembre

     

    Jean Prouvé devant sa maison à pans modulables, vers 1955, à Nancy.
    Jean Prouvé devant sa maison à pans modulables, vers 1955, à Nancy. Crédits photo : Adagp, Paris

     

    NANCY. Jean Prouvé, retour au pays natal

    Il est l'héritier direct de l'École de Nancy, mouvement Art nouveau dont son père Victor Prouvé est l'un des chefs de file, et son parrain, Émile Gallé, le fondateur. Nancy lui rend de multiples hommages jusqu'au 28 octobre.

    AVIGNON. La collection Lambert

    En 2011, Yvon Lambert a confirmé la donation de sa collection à l'État et son dépôt permanent à la ville d'Avignon. Voici donc ses artistes mus par un désir de rupture (Lawrence Weiner, Serra, Marden, Mangold) face à ceux qui s'approprient le passé (Serrano, Douglas Gordon, Lavier, Basquiat, Lavier, Zilvinas Kempinas). Jusqu'au 11 novembre.

     

    <i>Grondin volant</i>, 1998, Nakanishi, nature japonisante et technique indirecte, à Concarneau.
    Grondin volant, 1998, Nakanishi, nature japonisante et technique indirecte, à Concarneau. Crédits photo : Monaco, Musée océanographique de Monaco, Fondation Albert 1er, Prince de Monaco.

     

    BRETAGNE. Le Japon à l'Ouest

    Cet été, la Bretagne est à l'heure japonaise avec sept expos. Le Musée de la pêche de Concarneau présente l'art du Gyotaku. Les beaux-arts de Brest, le japonisme et son influence sur les peintres français. Les beaux-arts de Rennes, estampes et kimonos. Jusqu'en septembre.

    ÉVIAN. «L'art d'aimer» au Palais Lumière

    Boucher, Courbet, Ingres, Henri Martin, Maurice Denis, Picasso, Chagall, Rouault, Foujita, Tamara de Lempicka, Henri Lartigue, Doisneau, Man Ray, Pierre et Gilles dessinent la carte du tendre. Jusqu'au 23 septembre.

    SAINT-TROPEZ. Les peintres sculptent à l'Annonciade

     

    Gerard Fromanger, <i>En Chine à Hu-Xian</i>, 1974.
    Gerard Fromanger, En Chine à Hu-Xian, 1974. Crédits photo : Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. RMN / Philippe MIGEAT

     

    Daumier le premier, Degas, Renoir, Gauguin sont à la poursuite du mouvement. Bonnard, Vallotton, Matisse, Picasso, Braque, Giacometti, Arp… N'en jetez plus! Du 7 juillet au 8 octobre.

    AJACCIO. Le Parmesan en clair-obscur au Musée Fesch

    Maniériste exacerbé, Francesco Mazzola (Parme, 1503-Casalmmaggiore, 1540), dit Le Parmesan, se révèle dans son chef-d'œuvre La Vierge au long cou (1534-1539), gloire divine des Offices à Florence. Jusqu'au 1er octobre.

    BOURG-EN-BRESSE. Gustave Doré au monastère de Brou

    Sombre et lumineuse, réaliste et visionnaire, la peinture de Gustave Doré (1832-1883) est exaltée, onirique, spirituelle. Rêver devant 40 de ses huiles et aquarelles, jusqu'au 16 septembre.

     

    <i>Ecce Homo</i>, vers 1605, Le Caravage, sensualité et clair-obscur, à Montpellier.
    Ecce Homo, vers 1605, Le Caravage, sensualité et clair-obscur, à Montpellier. Crédits photo : Genova Musei di Strada Nuova

     

    MONTPELLIER et TOULOUSE. Le Caravage et ses grands disciples

    Événement estival incontournable que cette double exposition au Musée Fabre et au Musée des Augustins, qui tisse les liens entre le génie de l'extase et ses émules, Ribera, Valentin de Boulogne ou Terbrugghen. Jusqu'au 14 octobre.


    Multipliant les références à l'histoire de l'art, les artistes ravivent les visions surnaturelles de Bruegel, Valckenborch, Verhaecht, Momper. Télescopage contemporain via Fantastic/Lille3000, jusqu'au 14 janvier.

    TOULOUSE. «La vie des formes» aux Abattoirs

    Géométrie avec Mona Hatoum. Cadrage avec Charlie Chaplin. Déploiement avec Yayoi Kusama. Croissance avec Michel Blazy. Ça bouge au Frac Midi-Pyrénées, jusqu'au 2 septembre.


    Pour sa 43e édition, les Rencontres fêtent les 30 ans de l'École nationale supérieure de la photographie (ENSP) en 60 expos. Jusqu'au 23 septembre.


    La découverte d'un procédé permettant la reproduction de la réalité (1839) pousse des artistes à acquérir des photos, à passer commande à des photographes (Courbet, Ingres) ou à pratiquer (Friant, Muenier, Degas). Jusqu'au 1er octobre.

    LIRE AUSSI:

    » L'été continue à briller pour les grandes expos 

  • Suite à une note d'Elisabeth

    http://boulevarddesresistants.hautetfort.com/archive/2011/06/13/louis-valtat-peintre-fauve-1869-1952.html

    J'ai eu envie d'en savoir plus et j'ai lu un hors série de revue d'art tel que celle-ci:

    Valtat à l’aube du fauvisme


     

    Lodève, Musée Fleury, du 1er juin au 16 octobre 2011

    Louis Valtat (1869-1952)
    Femme au cabaret ou L’Estaminet, 1896
    Huile sur toile - 136 x 191 cm
    Angers, Musée des Beaux-Arts
    Photo : Musée des Beaux-Arts d’Angers
    © ADAGP Paris 2011

    Alors que le musée Fleury de Lodève consacre une importante exposition à Louis Valtat (commencée le 2 juin), le musée Paul Valéry, à Sète, présentait (jusqu’au 7 mai) les œuvres de… Louis Valtat. Il n’y a eu apparemment aucune concertation entre les responsables de ces deux manifestations organisées pourtant à quelques kilomètres l’une de l’autre et à quelques semaines d’intervalle. C’est d’autant plus étonnant (mais peut-être ceci explique-t-il cela ?) que Maïté Vallès-Bled, conservatrice du musée de Sète, a été jusqu’en 2009 à la tête du musée de… Lodève, dont l’actuelle directrice, Ivonne Papin, travaillait à l’époque avec elle comme conservatrice adjointe.
    Il est bien dommage que les deux musées n’aient pas réussi à s’entendre pour conjuguer leurs efforts, car la plupart des œuvres visibles à Sète, issues notamment de deux importantes collections privées, n’ont pas été montrées à Lodève et réciproquement. Les deux expositions auraient pu au moins se dérouler en même temps et en partenariat. Par ailleurs, deux catalogues ont été publiés. Celui de Lodève reproduit 190 œuvres, mais n’a malheureusement aucune notice ; l’absence d’index et l’agencement thématique assez complexe rendent par ailleurs sa consultation difficile. Pourtant les archives ont été méticuleusement dépouillées pour cette exposition, tandis qu’Ivonne Papin a pisté des tableaux dans des ventes aux enchères et obtenu les prêts de nombreuses œuvres inédites issues de collections privées européennes et américaines, en plus de celles de collections publiques (Orsay, le Centre Pompidou, le musée des Beaux-Arts de Bordeaux...).

     

     

    Le parcours, à la fois thématique et chronologique, privilégie les années 1892-1914 et met en avant les grands motifs qui ponctuent l’œuvre du peintre. Une première partie intitulée « Fin de siècle » réunit quelques chefs-d’œuvre des années 1892-1896 où perce l’influence de Toulouse-Lautrec (avec qui Valtat collabora pour un décor au théâtre de l’Œuvre) à travers le thème des filles de joie, les unes patientant Sur le boulevard, les autres dans un Estaminet (ill. 1), tableau dont on a trouvé une étude préparatoire dans une collection particulière. Des toiles comme Les Parapluies rouges, Mère et enfant ou La Lecture, très belle peinture du Musée de Bernay, relèvent davantage des recherches esthétiques des Nabis que Valtat a fréquentés.
    Une deuxième partie aborde les arts décoratifs : Valtat orna des céramiques d’André Metthey qui furent exposées au Salon d’automne de 1907, puis s’essaya à la sculpture en 1909 et 1910, avant de réaliser en 1922-1923 des cartons de tapisseries pour Aubusson ; il exposa enfin en 1932 Les Mahonias, tapisserie de basse lisse. Certaines toiles révèlent elles aussi le talent décoratif du peintre, marquées par un contraste de couleurs vives et des touches larges, tel le Coin de massifs fleuri dans un jardin de Provence (prêté par les Arts décoratifs de Paris) qui n’est pas sans rappeler les tapisseries de Maillol.
    La section consacrée aux dessins (où l’on retrouve le monde du cabaret et du théâtre notamment) et aux estampes est particulièrement séduisante. Bois gravé, lithographie, eau-forte, Valtat expérimenta toutes les techniques et collabora avec les revues de son temps. Une série de dessins aquarellés et de pastels évoque ses séjours à Arcachon (1895-1896) au cours desquels apparut un motif cher à l’artiste, les écaillères d’huitres, comparable au thème des paysannes que Gauguin peignit à Pont-Aven.


    Louis Valtat (1869-1952)
    Les Rochers rouges à Agay, 1903
    Huile sur toile - 65 x 81 cm
    Collection Fondation Regards de Provence
    Photo : Fondation Regards de Provence
    © ADAGP Paris 2011

    Valtat découvrit aussi la lumière du Sud, d’abord à Banyuls en compagnie de George-Daniel de Monfreid et d’Aristide Maillol en 1894-1895 puis à La Ciotat et à Marseille en 1902. Les vues qu’il peignit sont construites par la couleur et ses touches morcelées relèvent du néo-impressionnisme.
    Il voyagea ensuite à Milan et Venise, puis Alger en 1906, dont il rapporta esquisses et tableaux pittoresques. Mais il s’attacha aussi au charme des plages de Normandie, et de Ouistreham notamment, à la poésie du lac du Bois de Boulogne lorsqu’il s’installa avenue de Wagram en 1914, et à la grâce de la vallée de Chevreuse lorsque il acquit en 1924 une propriété à Choisel. Valtat peignit également des natures mortes, parmi lesquelles on retiendra Pomme et tulipes qui s’inspire des recherches cézaniennes, ainsi que des femmes occupées à coudre ou à broder, autre thème cher au peintre qui cherchait à traduire ce monde domestique paisible et clos.
    L’exposition s’achève sur Agay et Anthéor, où l’artiste séjourna régulièrement entre 1899 et 1914 ; les rochers rouges d’Agay, motifs qui inspirèrent aussi Georges d’Espagnat ou Guillaumin, constituent une véritable série. Des silhouettes féminines se fondent parfois dans des paysages escarpés ou luxuriants, exprimant une symbiose de l’homme et de la nature. A Anthéor, Valtat côtoya Renoir qui se trouvait à Cagnes et Signac qui habitait Saint-Tropez. Il fréquenta également Théo van Rysselberghe, Henri Edmond Cross et Georges d’Espagnat avec qui il séjourna à Magagnosc près de Grasse. Renoir le recommanda à Vollard qui devint son marchand exclusif entre 1902 et 1911 ; quelque 680 œuvres du peintre furent notées dans l’inventaire après décès du marchand. Il faut dire que si Valtat ne fut guère bavard sur son art, il fut prolifique ; il sombra pourtant dans l’oubli et l’on tente aujourd’hui de le ranger tant bien que mal dans un mouvement ou dans un autre. Les tons purs et les couleurs éclatantes de ses œuvres d’Arcachon encouragèrent certains à en faire un précurseur du fauvisme. Pourtant Georges Duthuit ne l’intègre pas dans son livre de 1949 et dans le catalogue de l’exposition, Claudine Grammont rappelle que les préoccupations de Valtat ne sont pas celles de Matisse ou de Derain : il est loin de l’art tribal et du primitivisme. Ses vues d’Agay en revanche, ont probablement eu un impact sur les fauves, présentant quelques similitudes avec les vues de Collioure de Matisse et Derain.
    Valtat se laisse surtout attirer par le néo-impressionnisme comme en témoigne des tableaux tels que Femme au bord de mer(vers 1904) et il expose en 1900 aux côtés de Signac, Luce, Cross, Van Rysselberghe. L’exposition tente d’illustrer ces amitiés et ces affinités artistiques en présentant ça et là les œuvres d’autres artistes comme Maximilien Luce, Georges d’Espagnat, George-Daniel de Monfreid, Henri-Edmond Cross, Aristide Maillol, Armand Guillaumin… Malheureusement leurs peintures dispersées dans le parcours ne sont pas clairement séparées de celles de Valtat ce qui peut provoquer certaines confusions auprès du visiteur distrait.


    Collectif, Louis Valtat à l’aube du fauvisme, Editions midi-pyrénéennes, 2011, 350 p., 42 €. ISBN : 9782953760217.

    Commissaire général : Ivonne Papin-Drastik. Commissaires scientifiques : Claudine Grammont et Ivonne Papin-Drastik.

    Informations pratiques : Musée Fleury, Square Georges Auric, 34700 Lodève. Tél : +33 (0)4 67 88 86 10. Ouvert tous les jours sauf le lundi de 10 h à 18 h, le mardi du 4 juillet au 23 août jusqu’à 22 h. Tarif : 7 € (réduit : 5 €).

     

     

    Comme j'ai gagné 2 entrées gratuites pour cette expo...

     

     
     
  • Bernar Venet

    Chez Bernar Venet, l'architecture sert d'écrin à l'art

    Au Muy, les reliefs de Stella ont induit l'architecture.

    Au Muy, les reliefs de Stella ont induit l'architecture. Crédits photo : Venet foundation/archives Bernar Venet

    Dans sa nouvelle fondation au domaine du Muy, près de Saint-Tropez, le sculpteur a inauguré la chapelle imaginée par Frank Stella pour accueillir ses œuvres monumentales.

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    Il y a des lieux magiques, hors du temps, où l'architecture est un superbe écrin pour l'art. Pour sa fondation de droit américain qu'il vient d'inaugurer dans sa résidence secondaire au Muy, Bernar Venet a toujours rêvé secrètement d'un espace de méditation conçu par un de ses amis artistes. Quand il a vu chez l'Américain Frank Stella ses grands reliefs composites, il a tout de suite eu le coup de foudre. Il est finalement reparti avec six de ses œuvres monumentales sans savoir quel emplacement il pourrait leur consacrer.

    Leurs dimensions imposantes (environ 450 x 250 x 150 cm) avait découragé les institutions de les prendre en dépôt. Au fil des discussions entre les deux hommes, l'idée de la chapelle est née, sur le modèle de celle de Rothko construite dans les années 60 à Houston au Texas pour le célèbre couple de collectionneurs franco-américain Jean et Dominique de Menil. Celle-ci abrite quatorze peintures noires aux subtiles nuances de couleurs créées spécialement pour l'endroit, selon les exigences de ses commanditaires.

    Vue extérieure de la chapelle.

    Vue extérieure de la chapelle. Crédits photo : Venet foundation/archives Bernar Venet

    Au Muy, les reliefs de Stella qui ont induit l'architecture. Techniquement, le bâtiment est une prouesse. Sur ce site classé qui n'est pas à l'abri des inondations - la dernière a emporté le pont en acier imaginé par Venet au fond de la rivière! -, il n'est pas possible de construire ce que l'on veut. Au départ, l'architecte Rudy Ricciotti installé à Bandol, dans le Var, et connu pour ses dentelles de béton du Mucem, avait imaginé une haute tour de plusieurs dizaines de mètres.

    Le projet n'était pas recevable et a laissé la place à celui dessiné par Frank Stella lui-même sur pilotis pour laisser passer l'eau au cas où. Il s'agit d'une création inédite car, s'il s'était déjà intéressé à l'architecture - en témoignent les maquettes qui furent exposées dans sa «rétrospective works» au musée de Wolfsburg -, aucun de ses bâtiments n'avait été réalisé jusqu'alors.

    L'édifice hexagonal de 15 mètres de diamètre accueille un de ses amoncellements métalliques sur chacun de ses murs qui ont dû être redressés après installation en raison de leur poids. la structure comme un champignon géant planté dans la nature est chapeautée par une toiture innovante en fibre de verre et toile de bateau ayant la forme d'un étrange œil dessinée lui aussi par Stella lui-même en collaboration avec la jeune architecte Veronika Schmid dont l'agence est basée à New York (Impossible-Productions). Dans cette boîte blanche et noire ouverte sur la nature, le visiteur déambule librement.

    La chapelle est le point d'orgue d'un parcours à travers le parc parsemé d'arches métalliques de Bernar Venet. Un jeu de courbes et contre-courbes si cher à l'artiste qui a impressionné une fois de plus ses invités avec sa toute nouvelle création, Effondrement, à l'entrée de la fondation, dans l'usine réhabilitée en espace d'exposition: 200 arches de 7 mètres de long et d'une tonne chacun se superposant les uns aux autres dans un magique équilibre.

    Pour inaugurer sa fondation que l'on pourra visiter en privé sur rendez-vous, Bernar et sa femme Diane nous avait promis une magnifique soirée entre amis, parmi lesquels Jacques et Lise Toubon, Bernard Blisten du Centre Pompidou, les anciens galeristes Jérôme et Emmanuel de Noirmont, Jean Todt et bien sûr la star du jour, Frank Stella dont on connaît l'amour pour les cigares. L'orage menaçant toute la journée s'est évincé comme par miracle pour permettre à chacun de se promener dans cet immense musée à ciel ouvert résultant de 25 ans de travaux d'agrandissement et d'embellissement.

    On commence par le Moulin où l'on peut voir les coups de cœur de Bernar: la compression de sa voiture par César, la «poubelle» d'Arman, son ami des premiers jours, les installations lumineuses de Morellet et Dan Flavin, les pièces minimalistes de Richard Long et Carl Andre et surtout les wall drawings de Sol Lewitt, allant du salon à la salle à manger où trône une table peinte du même Lewitt. «L'histoire de cette collection est celle de mon amitié avec les artistes», explique le propriétaire des lieux. La visite se termine au fond du parc de 4 hectares avec une nouvelle œuvre conçue pour l'occasion par Daniel Buren et dont Bernar fera peut-être l'acquisition. Le pari de ce nouveau lieu est réussi. Et l'émotion garantie!

    Effondrement (2014), une pièce monumentale de 200 tonnes d'acier, dans l'ancienne usine reconvertie en hall d'exposition.

    Effondrement (2014), une pièce monumentale de 200 tonnes d'acier, dans l'ancienne usine reconvertie en hall d'exposition. Crédits photo : Venet foundation / archives Bernar Venet New York.

    Bernar Venet : «Je dois tout à l'Amérique»

    Bernar Venet a inauguré sa Venet Foundation dans sa propriété varoise samedi par une garden-party sans pareille. Son Moulin du Muy, qui longe la Nartuby, est le royaume de l'art américain des années 1960 à 1980. En entrant, on marche sur Carl Andre, on s'assoit à une table Sol LeWitt dont deux Wall Drawings rappellent le talent in situ, on s'éclaire avec Dan Flavin. Partout, art et amitié rappellent, entre deux sculptures géantes de Bernar Venet, son arrivée de jeune Provençal à New York.

    http://www.lefigaro.fr/culture/2014/

  • L'île d'Yeu de Marie Billetdoux

    Par Marie Billetdoux, Stéphan Cladieu
    20/08/2010 | Mise à jour : 18:25

    Les îliens ne sont pas des gens comme les autres. Marie Billetdoux non plus. En 1991, une demi-heure avant de reprendre le bateau, elle achète une maison sur l'île d'Yeu. Depuis, son histoire d'amour ne s'est jamais démentie, comme en témoigne cette évocation élégiaque.

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    <strong>Sous la bienveillante garde de Notre-Dame-de-Bonne-Nouvelle</strong>, la plus ancienne chapelle de l'île, le petit port de La Meule, unique refuge de la côte sauvage, accueille dans son ventre de granit des embarcations telles ce vieux petit cotre de pêche ou ce corsaire tirant sur son amarre.
    Sous la bienveillante garde de Notre-Dame-de-Bonne-Nouvelle, la plus ancienne chapelle de l'île, le petit port de La Meule, unique refuge de la côte sauvage, accueille dans son ventre de granit des embarcations telles ce vieux petit cotre de pêche ou ce corsaire tirant sur son amarre. Stéphan Gladieu / Le Figaro Magazine

    C'est une fière, une pudique, une qui ne se donne pas le premier soir, ils arrivent non prévenus ou malmenés par une mer verdâtre, à «cinq lieues» du continent, remettent pour premier tribut à la sortie du bateau leur sac à vomissement et, laissés seuls, absolument seuls en un instant, valises aux pieds, tandis que s'éloignent bruyamment à l'entour 2 CV bleu pâle ou rouge framboise, jeeps, Méharis, emportant par familles entières les habitués et leurs connaissances, ils vont attendre là, sur le quai de Port-Joinville, le retour des deux seuls taxis partis surchargés, par chemins et venelles, déposer devant leur portail les propriétaires de résidences secondaires, plus nombreuses aujourd'hui que les maisons des Islais...

    C'est une violente, une qui a du chien, une qui charme au premier œil, ils ont pris l'aller-retour pour la journée ou pour la semaine, mariés devant Dieu à la fleur de l'âge ils sont prêts tout à coup à s'endetter, à se ruiner pour elle, royaume pour les enfants, vrai livre animé où se lèvent par surprise des mini-reliefs, des moulins, des puits, des tirettes, des petites portes et des volets multicolores qui s'ouvrent et qui se ferment...

    Tantôt île, tantôt presqu'île il y a quelques millions d'années selon le niveau de l'océan, longtemps coupée du monde (« Certains jours on ne voit plus le continent » alors résonne la corne de brume) mais toujours convoitée, assaillie avant les estivants par les envahisseurs de toutes sortes, barbares, pirates, corsaires (assiettes en étain et longs pistolets de bois à guirlandes d'argent giseraient par centaines de mètres de fond) - longtemps elle n'a pas fait parler d'elle. Encore stupéfait de son triomphe à Ré, Satan offre toujours, contre une âme, ses ouvriers contrefaits pour 25 km de pont, mais n'a pas réussi à conclure, manque l'enfant, dit-on, - « un garçonnet de 4 ans de préférence » - à emmurer vivant dans les premières fondations pour leur solidité comme à Rosporden (Finistère) celui, tout nu, une chandelle bénite dans une main, un morceau de pain dans l'autre, qu'on entend, la nuit, appeler sa mère...

    Posée dans l'océan à la proue de l'Europe, l'air d'un jeune chat assis, de dos, fixant les Anglais, oreille gauche dressée (la Pointe du But) oreille droite moussue (la Pointe de la Gournaise), le bout de la queue à la Pointe des Corbeaux, faisant gros dos du côté du large (la Côte sauvage), accueillante par où justement elle est vulnérable et par où on l'aborde depuis toujours, elle est faite de la pierre dont elle a fait ses églises et du bois de ceux qui n'ont (n'avaient) besoin de personne, hors la protection de Notre-Dame-du-Port, patronne des marins.

    Elle est là, fragile et forte à la fois, brutalité de la lumière, rose des hortensias, bleu vif des coques dansant au bas des quais, jaune des genêts et des mimosas, vert noir des hauts cupressus, mais aussi soumission, consci ence perpétuelle de celle avec les humeurs de qui chaque matin il faut compter, traiter ou pactiser; celle qui, par gros temps et grosse lune, renverse les navires, libère des hordes de chevaux blancs étincelant soudain comme les rubans des danseuses chez Degas dans le vaporeux du tulle, qui courent, courent à sa surface tout en poussière d'eau se fracasser contre les rochers; celle qui la cerne de sa présence parallèle, qui la nourrit, mais lui prend ses enfants, et d'où s'élèvent, « chaque fois que la lame en fureur roule leurs ossements dans ses plis et les éloigne du rivage », les gémissements des âmes des naufragés... (la zone la plus touchée des côtes de Vendée).

    Nombre de bateaux ont été perdus «corps et biens», sans autre explication que la violence des tempêtes, un long passé d'attente, de courage, de sauvetages la Norvège reconnaissante »), puis de deuils a marqué une population de femmes, d'enfants, d'anciens et de malades restés à terre, tandis que les hommes « prenaient service en mer comme mousses dès l'âge de 10 ans »... Ceux dont l'océan n'a pas rendu le corps - il faut 9 jours, dit-on -, chaque fois qu'une porte grince, sont toujours attendus.

    Mais nombre de miracles aussi ont jalonné l'histoire de cette terre, terre enfantine et impétueuse où il faut faire avec les astres, avec le vent, avec les flots et les esprits: « Vierge, tes marins et tous leurs enfants / jamais n'oublieront tes bienfaits touchants / car cent fois ton bras menant au rivage / leur fit éviter un triste naufrage /... Reine du port, chantent depuis près de deux siècles (au temps où on chantait en mer) les marins en chœur, nous te saluons ! » Il n'est que de voir la photo prise du côté des Chiens-Perrins, au large de la Pointe du But, pour être parcouru d'un long frisson chargé d'effroi: la force de la houle là-bas est telle que l'écume épaisse, devenue jaune, semble charrier des ballots de coton brut... C'est alors (1620) qu'un maître d'équipage et un vicaire de la paroisse, après avoir ordonné de « couper les mâts », vouèrent le navire « à la glorieuse sainte Anne » et le navire... se releva! Mais aussi le Bienheureux Louis-Marie Grignion de Montfort qui réussit à déplacer, seul (1712) un énorme rocher. Mais aussi l'abbé Théophile Poirier et l'instituteur Edouard Moreaux - « nous partions quatre en excursion... » -, qui furent « à deux doigts de la mort » sauvés du lieu-dit «le Trou d'Enfer» le soir du 8 décembre 1921 par Notre-Dame-du-Perpétuel-Secours...

    J'ai compté, sur une carte simplifiée, 4 trous, 6 grottes, 1 cap, 3 phares, 2 becs, 10 anses, 19 pointes, 2 églises dont un clocher tronqué par la foudre, 4 cloches, 2 cimetières et... 23 plages: il y a celle où tout de suite on n'a plus pied, celle où il n'y a jamais de vives (ou «épines de Judas»), celle où les petits ne risquent pas de se perdre, celle où « il n'y a personne », celle éclairée comme à Venise par un soleil dans le dos, celles dont on revient seul, à bicyclette au soleil couchant, ébloui, avec des mines d'explorateur de terres encore vierges, celle où les jeunes, aplatis en étoiles sur le sable en fin d'après-midi, nous préparent la société future tandis que les vagues, en rouleaux tout à coup, déchainées, trouant le sol sous les pieds, retirent leur culotte aux enfants, médailles de baptême, croix d'or en pendentifs ou boucles d'oreilles car les dames, ici, surtout plage des Vieilles (c'est un poisson), se baignent avec bijoux.

    Mais quand la mer le matin est plate, presque laiteuse, on peut voir ces dames immobiles au milieu, une cuisse levée, puis l'autre, une main en cuiller ramenant rapidement un peu d'eau sur les bras ou la nuque, parlant à une autre semblable se découper sur l'horizon et l'air aux échos de cathédrale, par bribes alors, porte aux oreilles les évènements de l'hiver: « Domitille a quitté Noé... Elle m'a dit : "Ma-man-je-ne-le-sup-porte-plus !..." » et cela peut durer un temps infini. C'est là, dans l'île, qu'on a connu tant de «premières fois»: la première fois que, pour suivre les autres, on s'est lancé à l'eau du haut de la falaise; la première fois qu'on a chanté à grande voix, «Chez Tintin», à Saint-Sauveur - les bébés en pyjama sur les épaules des papas debout dans la petite rue - des chants de marins; ou des chansons fleuries (entendez gaillardes) «Chez Jeannette», au bar de l'Escadrille, jusqu'à 3 heures du matin et foulé la rosée de Vendée; la première des «premières fois», derrière les dunes, attirée là par le séducteur de l'été (du latin seducere, conduire à l'écart) qui s'est marié deux ans plus tard avec une autre, car, de Paris, d'Angers, du Mans, d'Amboise on vient à Yeu s'épouser. Noces en juillet amènent les regrets; en août, époux jaloux; mariage retardé, mariage faussé; mais combien de mariages, aussi, sous la pluie? Si les mariés se mouillent les pieds, ils seront trois dans l'année: la première fois, alors, qu'on remorque son bébé en carriole jusqu'aux plages; la première fois qu'on lui met sur la langue un doigt trempé de pineau, des miettes de tarte aux pruneaux (pâte semi-feuilletée au beurre salé, 5 cl de rhum pour 200 grammes de pruneaux, cannelle, sucre, croisillons de pâte dorée au jaune d'œuf, 25 minutes à 220 °C) pour la tête qu'il fera; la première fois que, ligoté sur le porte-bagage de la bicyclette, on va l'emmener par les chemins creux à travers la lande couchée par le vent essayer, à son tour, de basculer la Pierre tremblante dans la mer; la première fois qu'on voit se vendre des poissons entiers, bars, turbots, dorades, ou des langoustines par kilos dans la balance: « Cinq kilos, ça vous fait trop ? » devant tout le monde, songeant à part soi « C'est sans doute ça, le bonheur »; la première fois que, ruisselant de larmes assise sur la plage, n'ayant plus le temps ni de courir ni de crier, les yeux fixés dans le ciel au sommet de la falaise où progresse en file indienne vers le vide une dizaine de jeunes gens nus, vous priez pour votre grand qui va sauter. Mais qu'un Islais en visite l'aperçoive un peu plus tard sur le canapé: « A feurm'ses eilles pir qu'ine peutonc ! » (il dort bien!).

    Maisons du bourg et fleurs des rues, hantées encore par les silhouettes noires des dentellières et des gaufreuses en quichenotte, ou maisons avec terrain, marguerites et résineux? Il y a ceux qui trouvent vulgaire la rose trémière, - une roturière qui se prend pour une aristo (al et fagotée comme une maraîchine), une m'as-tu-vu qui fait sa pimbêche au pied des façades (a leuve un nez pir qu'in chin qu'emporte ine tripe), et ceux qui la révèrent pour les mêmes raisons, sa solitude et son indépendance. Il y a ceux qui se souviennent des forts caractères qu'a produit cette île: l'abbé Tournemire qui réglait les différends entre paroissiens à coups de poings, mort à la guerre, ou la veuve Dumonté, née Félicie Bernard: « Je donne et lègue tous mes biens aux pauvres et malades de la commune de l'île Dieu (sic)... Le nom de M. Dumonté sera mis en relief sur la porte d'entrée [de l'hôpital], si on n'accepte pas cette condition, je ne donne rien ! », il y a 134 ans... Et il y a ceux qui oublient qu'elle a dû conquérir tout de haute lutte pour sa survie (l'électricité par câbles sous-marins en 1954, l'eau courante idem en 1961 seulement, coupures mémorables par «cargos non identifiés», etc.), une île qui se réveille ahurie de s'entendre appelée, depuis quelques étés, «le Saint-Tropez de l'Atlantique».

    Et pourtant... Visite de maisons à vendre (un jeune notaire vient d'arriver), mais aussi concours de surf-casting, sorties en voilier pour la journée ou le coucher de soleil, école de plongée, championnats et tournois de foot pour benjamins et poussins, défilés de chars fleuris à la Pentecôte, Fêtes de la sardine, dédicaces à la Maison de la presse, après-midis patois par l'association « Y vl'ons parler îlas », trail sur 45 ou 23 km organisé par les pompiers de l'Extrême, florilège d'airs et de duos d'opéras, et même, même, saut en «chute libre», de l'hélico OYA VENDÉE, 15 minutes de vol (+ le film): « Avec une mariée aussi ? » fis-je, voyant déjà la robe, le voile, les petits pieds dans le ciel comme un Chagall: « Mariée, divorcée, pacsée... J'emmène tout le monde ! »


    Les bonnes adresses de Marie Billetdoux


    Crédits photo : Le Figaro Magazine

    Le restaurant La Meule (barbecue sur la terrasse en juillet-août, 02.51.59.57.32).

    Le restaurant «Les Bafouettes» (spécialités de la mer, 02.51.59.38.38).

    Le café «A l'abri des coups de mer» (Chez Tintin), à Saint Sauveur, (pour ses tables en merisier «polies par les manches des marins» et son ambiance, (02.51.58.52.31). On ne réserve pas, on entre, on prend un verre.

    La crêperie Snack-Martin (pour ses patagos à l'ail et au vin blanc, 02.51.58.52.68.)

     

    Par Marie Billetdoux

  • Pierre Sarkozy : celui dont on ne parle pas

    PAR JACQUES BRAUNSTEIN
    12/05/2010 | Mise à jour : 18:56
    Réactions (5)

    Producteur de rap d'une extrême discrétion à Paris, Pierre Sarkozy n'hésite pas à se montrer à l'étranger. Comme ici, le 1er février dernier, à Cologne, où il se produisait comme disc-jockey lors d'une soirée mode. Crédits photo : SCHROEWIG/ABACA
    Producteur de rap d'une extrême discrétion à Paris, Pierre Sarkozy n'hésite pas à se montrer à l'étranger. Comme ici, le 1er février dernier, à Cologne, où il se produisait comme disc-jockey lors d'une soirée mode. Crédits photo : SCHROEWIG/ABACA

    L'autre fils du chef de l'Etat se tient à l'écart de la politique. Fou de musique, producteur de disques, il s'est fait une place et un nom - Mosey - dans un milieu, celui du rap, qui ne passe pas pour être sarkozyste.

    La scène se déroule à Neuilly par une nuit calme. Jacques Chirac est encore à l'Elysée, Nicolas Sarkozy est son ministre de l'Intérieur. Pierre, son fils aîné, est chez lui en compagnie d'une amie venue écouter des «sons» qu'il a produits. Il est tard, et le garçon, bien élevé, craint de déranger ses voisins. Afin de pouvoir profiter des morceaux à plein volume, il décide de descendre et de s'installer dans la voiture de la jeune femme. La musique est à fond. Une patrouille de police s'arrête. Contrôle d'identité. Mais Pierre, dans sa précipitation, a oublié de prendre ses papiers avec lui. Les policiers fouillent longuement le véhicule, puis repartent. L'apprenti producteur remonte chez lui chercher sa carte d'identité. Lorsqu'une seconde patrouille s'arrête, quelques minutes plus tard, il la tend à l'officier. En voyant le nom du jeune homme, le policier la lui rend bien vite. A aucun moment Pierre n'a indiqué qu'il est le fils du ministre de l'Intérieur. Et toutes les anecdotes qu'on vous rapporte sur Pierre Sarkozy vont dans le même sens. Il fait profil bas, la discrétion même.

    Pierre et Jean Sarkozy à l'Elysée en 2007. Depuis son entrée en politique, Jean, lui, s'est coupé les cheveux. Crédits phot o : MEHDI FEDOUACH/AFP
    Pierre et Jean Sarkozy à l'Elysée en 2007. Depuis son entrée en politique, Jean, lui, s'est coupé les cheveux. Crédits phot o : MEHDI FEDOUACH/AFP

    «Le fils de Sarkozy fait du rap»…Lorsqu'on a entendu pour la première fois cette phrase, il y a quelques années, personne n'y a cru. C'était trop énorme. Une sorte de pied de nez qui sentait bon la légende urbaine. Le fils du ministre de l'Intérieur aurait choisi le genre musical qui n'hésite pas à traîner dans la boue le nom de Sarkozy. En fait, le fils de l'ex-premier flic de France ne «fait» pas du rap : il en produit. Il compose, échantillonne, construit des bandes électroniques sur lesquelles on peut chanter. Du rap violent dans le cas de Poison, le premier artiste pour lequel il a«fait du son». Du rap plus doux et «Sarkocompatible» dans le cas de Doc Gynéco, dont il a composé l'album l'an passé. Comment un fils de Neuilly s'est-il mis à produire le son du ghetto ? C'est ce qui fait l'originalité du parcours de Pierre Sarkozy, l'autre fils du président de la République, celui qui ne fait pas parler de lui. Voilà l'histoire improbable et profondément moderne de celui que Puff Daddy, le roi des rappeurs américains, a surnommé«The Prince of France». Elle commence en 1985. Pierre est le premier enfant de Nicolas Sarkozy et de Marie- Dominique Culioli. Son frère Jean naîtra l'année suivante. Les deux garçons feront leurs études à Sainte-Croix de Neuilly, puis au lycée Pasteur. Pour eux, leur père veut le meilleur, même s'il n'a pas beaucoup de temps à leur consacrer. A propos de la prise d'otages de Neuilly en 1993, dans laquelle le futur Président se taille la stature d'un homme d'action, Pierre aura cette phrase dans le Vanity Fair espagnol : «Mon frère et moi étions jaloux, car nous avons vu notre père avec un enfant dans les bras et que ce n'était pas nous.»

    Avec Daniel Cohn- Bendit lors d'un match de gala : Pierre joue avec l'équipe des politiques contre le Variétés Club de France. Crédits photo : G.MÉRILLON/LE FIGARO MAGAZINE
    Avec Daniel Cohn- Bendit lors d'un match de gala : Pierre joue avec l'équipe des politiques contre le Variétés Club de France. Crédits photo : G.MÉRILLON/LE FIGARO MAGAZINE

    Car Nicolas Sarkozy a quitté la maisonnée en 1989 pour vivre avec Cécilia Ciganer-Albéniz, leur future belle-mère, avec laquelle ils ne s'entendront jamais vraiment. Leur père, ils le verront un week-end sur deux et pendant les vacances, comme beaucoup d'enfants du divorce. Très jeunes, les deux frères s'intéressent à la musique. Mais, chez Pierre, cela tourne à l'obsession. Il aime la soul, le funk, Curtis Mayfield, Marvin Gaye et les grands artistes noirs américains des années 70. Peu à peu, il se met au rap. Avec une préférence pour celui de la côte Ouest des Etats-Unis, plus doux, moins revendicatif, mais aussi plus tourné vers la mythologie des gangsters : Dr. Dre, Snoop Doggy Dogg… C'est un vrai passionné, il connaît les notes de pochettes par coeur, débusque les producteurs obscurs derrière les stars bling-bling…

    Il adopte le look qui va avec, pantalon baggy, casquette à l'envers… Mais pas quand il voit son père. Nicolas Sarkozy est un ministre très occupé, alors, de temps à autre, il fait d'une pierre deux coups et fait ajouter une chaise et un couvert pour lui dans ses déjeuners avec les journalistes. Ceux-ci se souviennent d'un garçon calme au regard vif, qui écoutait sagement son père expliquer son action. Car, avec Nicolas Sarkozy, c'est toujours la politique d'abord. Sait-il seulement que son aîné a monté un groupe avec des copains ? Celui-ci n'a pas dû s'en vanter au début : «Nous étions tellement nuls que personne ne voulait composer pour nous. J'ai donc dû apprendre à le faire moi-même.»

    Parallèlement, Pierre est plutôt bon élève, il passe un bi-Deug à Nanterre, une licence de droit, commence une maîtrise... comme le souhaite son père, avocat de formation. Ces diplômes que l'on reproche tant à son frère Jean de ne pas avoir, lui, il les a. Mais peu importe. «Je préfère être un musicien sans avenir qu'un brillant avocat», tranche-t-il, toujours dans le Vanity Fair espagnol. Une provocation contre un père à la personnalité imposante ? Peut-être. Mais pas seulement. Il n'est pas le seul garçon d'origine bourgeoise à apprécier cette musique. Rockin'Squat, du groupe Assassin, est le frère de Vincent Cassel, et donc le fils de l'élégant acteur Jean-Pierre Cassel. Et le producteur de reggae Frenchie n'est autre que le fils de Claude Allègre. Quand Nicolas Sarkozy apprendra que son fils veut faire du rap un métier, il aura cette phrase : «OK pour le hip-hop (...), tant que tu continues tes études. Mais, attention, je ne te donnerai pas un rond.» Devant les journalistes qui le suivent, il préférera ironiser sur les choix de son fils : «Pierre a des dreadlocks et sort avec une Noire ! On ne pourra pas dire que j'ai brimé mes enfants !» Depuis, Pierre a coupé ses dreadlocks, et il garde secrète sa vie privée.

    La bande-son des boîtes chics de Neuilly

    Aujourd'hui, dans les médias, les rôles semblent bien établis. Pierre l'artiste, Jean le politique. En fait, ça n'a pas toujours été aussi clair. Jean aussi se voyait bien artiste. Son professeur de comédie, Jean-Laurent Cochet, le décrit comme un élève doué. Il a composé quelques chansons qu'il a déposées à la Sacem… Mais dans un genre plus variété, puisqu'il a été, un temps, question d'une collaboration avec Didier Barbelivien. Jean a changé de voie, Pierre, lui, s'est obstiné. Au départ, il ne sait pas comment entrer dans ce monde de la musique qu'il ne connaît pas. Il placera d'ailleurs ses premiers «sons» comme générique d'une émission pas vraiment rap, présentée par les frères Bogdanov. Il fait également un stage dans une maison de disques, AZ Universal, sous le nom de sa mère : Culioli.

    C'est qu'il n'est pas facile de s'intégrer dans un milieu qui affiche sa détestation de la droite et de la police, quand votre père est désormais ministre de l'Intérieur. Et surtout quand il promet de passer une cité au Kärcher ou de débarrasser une autre de ses «racailles». Avec ces mots, Nicolas Sarkozy est devenu la tête de Turc du monde du rap. C'est dans les boîtes de nuit où la jeunesse dorée de Neuilly se retrouve que Pierre Sarkozy, qui se fait désormais appeler Mosey, noue ses premiers contacts avec le milieu qui l'intéresse. Aussi curieux que cela puisse paraître aux non-initiés, cela fait bien longtemps que le rap américain est la bande-son des boîtes chics.

    Olivier Amiel (alias DJ Sub Zero), son ami d'enfance qui travaille encore aujourd'hui avec lui, passe régulièrement des disques dans des endroits comme le Queen, sur les Champs-Elysées. Pierre, lui, sympathise avec JC Sindres, DJ house. C'est lui qui lui présentera la journaliste et productrice Fatou Biramah : «C'était un jeune homme de 20 ans, avec de drôles de cheveux longs, des boutons. Il était attachant et ne faisait rien pour ressembler à un rappeur… Il avait une chambre de petit garçon avec un lit une place, mais équipée comme un vrai studio de pro.» Pierre ne lui cache pas qui il est. Et, d'emblée, elle lui fait comprendre que, dans ce milieu-là, ce n'est pas un «plus» : «J'avais envie de l'aider. On passe notre temps à se battre contre les a priori sous prétexte qu'on s'appelle Mamadou, et nous, on va lui fermer notre porte parce qu'il s'appelle Sarkozy ? Il ne faut pas lui faire ce qu'on n'aime pas qu'on nous fasse.» Avec ses deux acolytes (Sub Zero et J Looz), Pierre forme le groupe Da Cream Chantilly, qui commence à se faire un nom dans le milieu du rap… Des DJ influents dans le microcosme jouent leurs sons, comme Cut Killer, El Matador ou Spank (le DJ de Joey Starr). Ils composent également la musique du DVD Jamel, 100 % Debbouze. Ou, plus tard, celle du DVD de Seuls Two, le film d'Eric Ramzy. Bref, tout va bien pour eux.

    L'accession de Nicolas Sarkozy à la présidence de la République, le 6 mai 2007, va changer la donne. Les projecteurs sont désormais braqués sur ses enfants. La France entière se familiarise avec leurs visages. Le soir de la victoire, à l'entrée du Showcase, une boîte de nuit où les jeunes de l'UMP font la fête, Pierre s'avance vers les journalises pour mettre les choses au clair : «Moi, j'appartiens au domaine du privé, de l'intime, je ne veux pas me mettre en avant (...). Je vous le dis à vous, parce que, comme ça, vous le saurez pour les cinq ans à venir : aucune interview, rien du tout, j'espère que vous le comprendrez.» Profession de foi un peu naïve à l'heure du tout-people.

    «Je vais vous l'envoyer en stage, il a besoin d'autorité»

    Pierre Sarkozy ne se montre pas, mais ne se cache pas non plus. En 2008, il accompagne son père en voyage officiel en Chine. Nicolas Sarkozy aura cette phrase en le présentant à Hu Jintao, le président chinois : «Je vais vous l'envoyer en stage, il a besoin d'autorité…» Manière de dire que, s'il a accepté le choix de carrière de son fils, il n'en pense pas moins. Les journalistes qui étaient du voyage ont le souvenir d'un jeune homme très proche de sa grand-mère, présente elle aussi, qui respecte le programme de la délégation et ne fait pas de vagues.

    S'il a choisi la musique, il ne se désintéresse pas pour autant de la politique, notamment à Neuilly, la ville où il a grandi. Lors des dernières municipales, il apporte un soutien discret à David Martinon, que son frère Jean soutient encore «à fond». Il est responsable du groupe Solidarité et partage des jeunes UMP de Neuilly-sur-Seine. Lors d'une rencontre avec des militants, le 16 décembre 2007, il se présente ainsi : «Je suis Pierre Sarkozy, on me confond souvent avec mon frère, mais c'est moi l'aîné.» Et il enchaîne sur la question du logement : «A chaque fois qu'on parle de Neuilly dans les médias, on parle de ces fameux 20 % de logements sociaux qui ne sont pas respectés dans notre ville.»Lui est favorable à ce que la mairie achète des «appartements sociaux» dans des immeubles indifférenciés. C'est une proposition, pas une critique frontale de la politique municipale familiale… Mais quand même. Après l'éviction de David Martinon, Pierre retourne à son grand amour, le rap.

    L'anonymat n'étant plus de mise, Pierre Sarkozy va donc se rapprocher du seul rappeur à ne pas être sarkophobe : Doc Gynéco, qui a soutenu le candidat UMP en se mettant à dos pas mal de ses anciens amis. Celui-ci raconte : «J'ai rencontré Pierre lors d'un cocktail au siège de l'UMP, pendant la campagne de 2007, à un moment où Nicolas avait des soucis personnels et avait besoin d'être avec ses enfants.»Très vite, ils parlent musique, mais le Doc n'y voit qu'une simple conversation mondaine.«Je ne l'ai pas pris au sérieux tout de suite. Des mecs de son âge qui font du son et le mettent sur My- Space, il y en a des milliers.» Ce n'est que plus tard, en découvrant les maquettes de Pierre, que Gynéco envisage une collaboration :«Il maîtrisait les machines. Sa musique était tellement loin du son des cavernes du mauvais rap !» L'album Peace Maker sort en novembre 2008, mais ne marche pas. Pourtant, la production est ciselée, le son plutôt original. Mais, comme le dit le journaliste et écrivain Olivier Cachin : «Le match était perdu d'avance. Entre l'image de Doc Gynéco, son amitié avec Sarkozy, et la participation de Johnny Hallyday, le disque était inaudible.»

    Depuis, Mosey et sa bande travaillent, toujours discrètement, dans leur studio vers Pigalle. Ils ont embauché une manageuse qui retransmet ses refus aux demandes d'interviews. Ils ont postulé pour une subvention sans l'obtenir. L'intervention malencontreuse d'un conseiller de l'Elysée dans le dossier n'a sûrement pas arrangé les affaires de Pierre Sarkozy. C'est finalement dans la presse people qu'on voit le plus Pierre, fan de concerts et de fêtes. Il est shooté par les photographes à chaque apparition. Et s'il la joue profil bas dans l'Hexagone, Mosey redevient Pierre Sarkozy à l'international. «Les rappeurs US, qui sont plus bling-bling, sont fiers de le connaître, constate Doc Gynéco. Ils aiment la notoriété, la réussite, ils sont moins dans le jugement. Pour eux, c'est le fils du roi de France. Je ne serais pas étonné que Puff Daddy le signe un jour sur son label. D'ailleurs, sur la Côte d'Azur, ils sont tout le temps fourrés ensemble.» On a ainsi vu Pierre Sarkozy au Festival de Cannes, à Saint-Tropez, à Munich lors des MTV Europe Music Awards, ou à New York aux côtés des producteurs américains les plus influents. En mars dernier encore, il était photographié au VIP Room à Paris avec Puff Daddy. Plus récemment, il est apparu dans le vidéoclip Download Me I'm Free de Laszlo Jones, chanteur haut en couleur et rigolo, qui n'a rien d'un rappeur. Vêtu d'un costume, les cheveux gominés en arrière et de grosses chaînes bling-bling autour du cou, Pierre Sarkozy est présenté comme «le prince du hip-hop». En produisant cet album, il démontre que, si son avenir est bien dans la musique, ce n'est pas forcément du côté du rap. Dans la seule interview qu'il ait accordée à la presse française (VSD), le fils aîné du chef de l'Etat affiche sa sérénité : «Je n'ai pas envie d'entrer dans le champ de la complainte. Il y a pire, dans la vie, comme départ, que d'être le fils du président de la République.»

    http://www.lefigaro.fr/politique/2010/05/12/01002-20100512ARTFIG00632-pierre-sarkozy-celui-dont-on-ne-parle-pas.php

  • Françoise Sagan: dernières révélations

    f3b65e6ab24976758904b117880bffe5.jpgpar Tristan Savin
    Lire, février 2008

     Trois ans après sa disparition, le «charmant petit monstre» fait de nouveau l'actualité, à travers un film de Diane Kurys dont la sortie en salle est prévue au printemps, l'adaptation par Florian Zeller de Château en Suède pour la télévision et plusieurs ouvrages. Le purgatoire n'aura pas été long. Sauf de son vivant: vingt ans de souffrances et d'oubli en librairie, après vingt ans de succès mondial. Lire a mené l'enquête pour faire la lumière sur un écrivain dont la vie flamboyante ne doit pas occulter l'oeuvre.

    "Je ner pas beacou de chose à te dire parce que jan é pas beaucou invanté dans ma tête ma chère maman.» Ce mot d'enfant de cinq ans pourrait résumer à lui seul Françoise Sagan: franche mais portée sur le mensonge, espiègle, peu diserte quand il est question de parler de soi. On peut aussi y voir la définition - précoce - d'un écrivain. Françoise est née Quoirez, dans le Lot, en juin 1935. Son père, ingénieur, dirige une compagnie d'électricité. Sa mère, frivole, toujours gaie, laisse à sa gouvernante les tâches domestiques et l'éducation des enfants. L'éditeur Jean Grouet fit la connaisance de Sagan à ses débuts, avant de devenir son secrétaire: «Elle aimait beaucoup ses parents. Elle habitait encore chez eux trois ans après le succès de Bonjour tristesse. Son père était insupportable, un peu hussard, Françoise le trouvait très drôle. Sa mère était exquise... mais un peu réac.» Ils avaient des principes bourgeois, rapporte aujourd'hui Denis Westhoff, le fils unique de Sagan (voir l'entretien page 32): «On ne prononçait pas de gros mots, on ne devait pas dire du mal de quelqu'un. A table, il était interdit de parler de politique, de religion ou d'argent.»

    Françoise n'est pas seulement la petite dernière des trois enfants Quoirez. Sa naissance, miraculeuse aux yeux de ses parents, survient après la perte d'un bébé. Du coup, père et mère lui passent tous ses caprices. Sa soeur Suzanne confie à la biographe Marie-Dominique Lelièvre: «Elle était une enfant pourrie-gâtée. Toute sa vie, elle a joui d'une totale impunité.» A neuf ans, elle peut conduire la voiture de son père. La secrétaire de monsieur Quoirez doit lui apprendre à taper à la machine. L'écriture, la vitesse. La légende commence à germer. Sa mère racontera plus tard à son petit-fils, Denis: «A deux ans, elle s'emparait d'un livre pour essayer de le lire. Mais elle ne le tenait pas dans le bons sens. Très tôt, elle a inventé des contes de fées et s'est mise à écrire un roman de chevalerie, en vers. Elle pouvait citer Le Cid par coeur.» La petite princesse adore amuser ses proches avec ses jeux de mots. Paradoxe, pour une intellectuelle: c'est aussi un garçon manqué, un meneur de bande. Adulte, gâtée par le succès, elle restera un Petit Poucet androgyne, qui sème des trous de cigarettes partout sur son passage.

    Ses meilleurs amis, qui constitueront sa garde rapprochée toute sa vie, ont pour nom Florence Malraux et Bernard Frank. Même âge, mêmes origines bourgeoises, même amour des livres. A cette différence près: ils sont juifs. La lucidité, face aux horreurs du monde, aux mensonges des adultes, les rapproche tous les trois. «J'avais tout compris à douze ans», déclarera Bernard Frank. Françoise aussi. Mais elle semble taraudée par la culpabilité: «Elle disait que son père avait été résistant, ce qui n'était pas vrai. Elle m'en a toujours voulu de l'avoir démentie à ce sujet au cours d'un dîner», rapporte Jean Grouet. Avant de lâcher, dans un sourire complice: «Elle était menteuse.» Sur ce point, la honte est légitime: la fillette imaginative resta hantée toute sa vie par la découverte des camps de la mort, à travers un film d'actualité projeté dans un cinéma quand elle avait dix ans. Comment ne pas faire le rapprochement avec le début de l'occupation allemande lorsqu'elle avait cinq ans? Comment composer avec une famille qu'elle perçoit comme banalement antisémite?

    Expulsée du couvent des Oiseaux pour «dégoût de l'effort», la jeune fille extralucide au visage de musaraigne fuira à sa manière un milieu trop rigide. D'abord en séchant les cours de la Sorbonne, à la rentrée 1953. Et en écrivant, sous Maxiton, son premier roman, en partie inspiré par Gatsby le magnifique. Puis en changeant de patronyme. «Tu ne mets pas mon nom sur ton livre», lui aurait dit son père. Elle en choisit un dans A la recherche du temps perdu. Et brouille déjà les pistes: s'identifie-t-elle au dandy Boson de Talleyrand-Périgord, prince de Sagan? Ou à la princesse de Sagan?

    La femme pressée
    En 1954, François Nourissier était lecteur chez Denoël. Il reçoit le manuscrit de Bonjour tristesse mais ne l'ouvre pas. Quelques jours plus tard, il finit par le lire sur les conseils d'une amie. Trop tard. Sagan vient de signer chez Julliard. Elle a demandé 25 000 francs, au hasard, mais René Julliard lui en a offert le double. L'éditeur a flairé en elle un nouveau Raymond Radiguet, qui avait fait la fortune de la maison. Rien n'est laissé au hasard: le bandeau du livre, sorti le 15 mars 1954, porte la mention «Le diable au coeur». Le succès est immédiat, grâce au prix des Critiques. Parmi les jurés: Georges Bataille, Marcel Arland, Maurice Nadeau, Jean Paulhan et Roger Caillois. La lauréate est trop jeune, 19 ans, pour toucher le chèque de 100 000 francs. Qu'à cela ne tienne, on les lui verse en espèces.

    Une semaine plus tard, le Prix Nobel de littérature, François Mauriac, évoque dans sa chronique du Figaro la «férocité lucide» de la «terrible petite fille», dont le talent littéraire «n'est pas discutable». L'autre consécration vient du clan des Hussards, quand Jacques Chardonne écrit à Roger Nimier: «Cette jeune fille est de bonne famille. La famille des grands écrivains.» La presse grand public s'empare du phénomène. Le Vatican met à l'index ce «poison qui doit être tenu à l'écart des lèvres de la jeunesse». Le scandale fait vendre: en un an, 500 000 exemplaires vont partir. Michel Déon, reporter à Paris Match, visite le prodige en vacances - et tombe amoureux. Premier «écrivain people», Sagan lance la mode Saint-Tropez avec Juliette Gréco, avant Brigitte Bardot. Elle passe ses nuits chez Régine, s'affiche avec Trintignant, se lie avec Jacques Chazot, Jules Dassin. Otto Preminger adapte son roman au cinéma.

    Etait-ce la bonne vivante que l'on a dit? Jean Grouet se souvient des fameux repas de la bande à Sagan: «Elle se foutait complètement de manger et demandait toujours l'avis de Bernard Frank pour le vin. Elle était habile pour conduire, pas pour cuisiner.» Ses bolides symbolisent son mode de vie et contribuent à fixer la légende: Jaguar X/440, Mercedes, Gordini, Ferrari 250 GT achetée grâce au succès de La chamade. Mais - à l'instar de Roger Nimier - c'est avec une Aston Martin qu'elle a son accident, en 1957. Coma, fractures du crâne, du bassin, du thorax... Une rescapée. «Rien ne paraît désespérément souhaitable que l'imprudence», écrivait-elle un an plus tôt dans Un certain sourire. Le rapprochement avec La fureur de vivre est facile. Mais l'écrivain a pris James Dean de vitesse: son succès le devance d'un an. «Sans Sagan, la vie serait mortelle d'ennui», écrit Bernard Frank.

    Dans l'existence de Françoise Sagan, la drogue a très tôt côtoyé l'ivresse de la vitesse. Elle en est aussi la conséquence. A la clinique, pour calmer ses douleurs, on lui a administré de la morphine, des mois durant. Après une première cure de désintoxication, elle se met à boire. «Je suis une bête qui épie une autre bête, au fond de moi», note-t-elle dans Toxique. Elle confiera à son ami Massimo Gargia avoir continué à se droguer à cause du succès: «La curiosité de la presse l'a écrasée. La drogue lui donnait du courage. Elle était timide, à ses débuts», précise Gargia. Celle qui incarnait la femme libre de l'après-guerre est devenue dépendante.

    L'adrénaline lui sert de moteur. Le jour de ses vingt et un ans, elle découvre le jeu. L'impassibilité vitale du joueur lui convient: il faut dissimuler ses sentiments. Elle en abuse au point de se faire interdire de casino en France. «J'ai une vision très romanesque de ma ruine éventuelle», confie-t-elle à Télérama. Son chiffre fétiche: le huit. Après avoir tout misé sur lui, en 1958, elle gagne 80 000 francs en une nuit. A huit heures du matin, elle achète ainsi le manoir du Breuil, à Equemauville, près de Honfleur. Elle vit d'excès, y compris dans le travail, devient dramaturge (Roger Vadim adaptera Château en Suède), critique cinéma à L'Express, joue les figurantes aux côtés d'Ingrid Bergman et d'Yves Montand dans l'adaptation d'Aimez-vous Brahms..., écrit le scénario de Landru pour Claude Chabrol. Sagan cherche les émotions fortes, elle les aura toutes. En 1961, elle signe le manifeste des 121, approuvant l'insoumission des appelés en Algérie (voir l'encadré page 24). Peu après, l'immeuble de ses parents, boulevard Malesherbes, est plastiqué. Denis Westhoff se souvient du témoignage de son grand-père: «Il avait aperçu un étrange paquet dans le hall. Il le laisse, monte chez lui. Juste après avoir fermé la porte de l'appartement, il entend une explosion. Tous les carreaux de l'immeuble ont volé en éclats. Ce jour-là, ma mère s'était absentée...» Rescapée, à nouveau.

    L'insupportable solitude
    Ses frasques amoureuses, également menées tambour battant, défraient la chronique, de son idylle avec l'homme d'affaires Pierre Bergé à son projet de mariage avec le play-boy italien Massimo Gargia. «Je l'ai rencontrée en 1965, se souvient ce dernier. Coup de foudre. Elle était très jolie, très gentille. Elle voulait s'amuser avec moi. On ne parlait surtout pas de littérature! Elle voulait oublier ses problèmes...» Elle a aussi du goût pour les femmes. En 1955, Florence Malraux organise une rencontre avec Juliette Gréco. L'égérie de Saint-Germain-des-Prés chante déjà Prévert, Queneau et Sartre. Sagan lui écrit quatre chansons, dont Sans vous aimer, première déclaration chantée d'anamour, dix ans avant Serge Gainsbourg. C'est aussi le titre d'un livre de Michaël Delmar (voir l'extrait p. 37) consacré à la rencontre de la chanteuse avec l'auteur de La femme fardée. «Nous étions deux jeunes femmes insouciantes et nous aimions l'amour. Nous le faisions souvent et pas toujours avec le même partenaire», y déclare Juliette Gréco. «Françoise a toujours eu dans le privé ce mélange de gravité innée et d'humour acide. On a immédiatement trouvé un langage commun et partagé une complicité d'enfants.»

    L'écrivain lui offre un tigre en peluche. «Je l'ai gardé longtemps, jusqu'à ce que les mites le dévorent.» Delmar a fréquenté l'entourage de Sagan pendant vingt ans: «Je ne l'ai pas connue autrement que lesbienne. Elle a longtemps vécu avec la styliste Peggy Roche, qui ressemblait à Juliette. C'est frappant. Sagan ne le reconnaissait pas facilement, elle n'aborde pas non plus la question des rapports féminins dans ses romans, contrairement à Colette. Pour elle, c'était honteux.» Prêche-t-il pour sa paroisse? Massimo Gargia dément: «Elle a eu beaucoup d'hommes. Elle a même eu une histoire avec Delon. Ce n'était pas une lesbienne, contrairement à Garbo, qui ne supportait pas l'organe masculin. Françoise était très portée sur le sexe, très active, avec beaucoup d'imagination. Elle m'emmenait dans les hôtels de passe. Toutes les expériences l'amusaient. Elle voulait même faire du parachute...» On s'est longtemps interrogé sur la nature de la relation entre Françoise Sagan et l'écrivain Bernard Frank, qui a presque toujours logé chez elle. Le mieux placé pour répondre est sans doute son ami Jean Grouet, qui l'a soigné jusqu'à sa disparition en 2006: «Bernard était pudique, il ne m'en parlait pas mais je suis certain qu'il ne s'est jamais rien passé entre eux. Ils n'étaient pas le genre l'un de l'autre. Ils s'engueulaient souvent mais s'adoraient. Pour ma part, Sagan a été la femme de ma vie, de manière spirituelle. Le jour où je lui ai juré que je ne coucherai jamais avec elle, elle m'a montré la porte...» Quand ils ont fait connaissance, Grouet assistait Vadim sur le tournage d'un film avec Bardot. Françoise travaillait avec le réalisateur à un projet de ballet, Rendez-vous manqué. «Elle m'a dit: "Vous connaissez la danse? Moi non plus. On va faire semblant." Elle voulait Picasso pour le décor. Mais gratuitement. J'ai réussi à le joindre et il a refusé. Elle a finalement pris Bernard Buffet.»

    Capricieuse, Sagan s'avère également une séductrice manipulatrice, parfois perverse. Annick Geille (voir ci-contre), séduite par son «allure de garçonnet avec sa chemise de cow-boy et son ceinturon de cuir», en fera les frais. Françoise est infidèle, elle ne peut jamais se passer de compagnie. Michaël Delmar, que Sagan avait interrogé sur l'influence des astres, rappelle qu'elle est née le même jour que Sartre, à trente ans d'écart: «Ils sont Gémeaux, donc très joueurs. Elle est dans la duplicité, elle se masque, reste fuyante.» La franchise de ses textes parle pour elle. L'amour? C'est comme l'argent: «Il se dépense. Et plus tard, il se pense.» Après avoir analysé l'un de ses livres, Romain Gary écrira: «Françoise est complètement dépourvue de culpabilité.1»

    Coup de théâtre: un beau jour, Sagan épouse l'éditeur Guy Schoeller, plus âgé mais réputé grand séducteur. Explication de Massimo Gargia: «Il la protégeait, comme un père.» Schoeller dira plus tard au biographe Jean-Claude Lamy: «On n'a jamais pu la prendre en flagrant délit de bêtise.» Leur entente est brève, un homme d'affaires ne peut pas suivre sa femme au casino... L'espiègle Lili (le mot est de Sartre) se marie en 1962 à un beau sculpteur américain. Jean Grouet l'a fréquenté à l'époque: «Bob Westhoff était homosexuel. Il a vécu avec François Gibault, le biographe de Céline. Françoise s'est retrouvée enceinte de lui, il lui fallait se marier vite. C'était un bon père. Mais il est mort à cause de l'alcool.»

    Ancien soldat, acteur puis mannequin, ce personnage de roman fut, aussi, l'un des traducteurs de Sagan en langue anglaise. De leur union naquit un fils, Denis. «Elle voulait vraiment cet enfant, elle n'aurait pas pu vivre sans en faire un,» estime Massimo Gargia. Modeste, sensible et courtois, l'enfant a aujourd'hui 45 ans et ressemble à sa mère, surtout quand il sourit. Il conserve le souvenir d'une femme toujours présente: «Elle savait en permanence où j'étais. Elle s'inquiétait pour moi.» Irresponsable pour elle-même, elle ne l'était pas avec lui et l'éleva selon ses principes: «Quand elle a réalisé que je traînais un peu trop dans les bars, elle a tenu à ce que je fasse mon service militaire.» Sans omettre une bonne instruction: «Elle m'a fait lire ses romans préférés, en commençant par La chartreuse de Parme. A la maison, il y avait des livres partout.»

    L'écriture, malgré tout
    La légende de la «mademoiselle Chanel de la littérature», comme l'a surnommée Frank, a souvent occulté l'oeuvre, pourtant placée dès les débuts sous les auspices de Proust et de Stendhal. Bertrand Poirot-Delpech l'avait rappelé: Sagan est d'abord, et surtout, un écrivain. Et ses livres n'ont pas vieilli, soulignait dans Lire en 2004 notre regretté confrère Jean-Jacques Brochier. Réputée oisive, Sagan publia un livre tous les dix-huit mois - sans compter les scénarios, les poèmes, les chansons. On ne la voyait pas écrire car elle remplissait ses cahiers Clairefontaine la nuit. A partir de 1970, elle dicte ses textes et n'hésite pas à convoquer sa secrétaire à quatre heures du matin. Laure Adler se souvient de ses débuts aux côtés de l'éditeur Christian Bourgois, en 1991: «J'ai travaillé avec Sagan sur son roman La laisse. Elle était très demandeuse, aimait être lue, discutée, corrigée. Pour elle, les critiques étaient nécessaires, vitales. La forme littéraire n'était pas le fruit du deuxième ou du troisième jet mais de ce work in progress, ce chantier en construction. Elle réécrivait beaucoup, redemandait des relectures et corrigeait encore au moment où le texte partait à l'impression. On avait une impression de grande incertitude, d'humilité. En fait, c'était une petite fille. Perdue.» Le genre de femme qu'on a envie de protéger, tellement elle semble s'excuser de sa gloire. Le phénomène Sagan? «Il s'agit avant tout d'un phénomène sociologique», répondait l'intéressée. Pourtant, elle intimidait Simone de Beauvoir. A cause de l'acuité de son regard, peut-être... «Rien ne lui échappait. J'avais l'impression qu'elle percevait tout», se souvient Annick Geille. Sagan aurait même fait la conquête d'Ava Gardner, révèle Marie-Dominique Lelièvre: «Par la force de l'esprit, elle avait séduit une des plus belles femmes du monde.»

    L'intelligence revient sans cesse à son propos. La définition qu'elle en donnait dans Répliques, le recueil d'entretiens édité par Grouet, est celle du coeur: «Avec de l'imagination, on se met à la place des autres, et alors on les comprend, donc on les respecte. L'intelligence, c'est, d'abord, comprendre au sens latin du terme.» Elle applique elle-même ce principe, atteste Laure Adler: «Elle avait un rapport simple, modeste et direct avec les gens. Elle se mettait à égalité avec vous. Même si vous n'étiez rien.» Annick Geille nuance: «Elle avait un tel souci de ne blesser personne qu'elle déployait des trésors d'hypocrisie pour faire croire au moindre raseur que son commerce était divin.» Pourtant, quand Sagan s'ennuie trop, c'est-à-dire souvent, il lui arrive d'abandonner ses invités pour bouquiner. Cette curieuse solitude imprègne toute son oeuvre. Les écrits lui servent de refuge. «Quand nous habitions ensemble à Rome, rapporte Gargia, elle passait des heures à lire devant le Colisée.» Parmi ses «milliers de livres préférés»: Les palmiers sauvages de Faulkner, Adolphe de Benjamin Constant et Les mots de Sartre. Elle se rêve en héroïne proustienne - d'où son attirance pour les noms à consonance aristocratique, comme les Rothschild. Mais depuis le duc de Guermantes, l'époque a changé: avec Bernard Frank, elle forme une sorte de couple à la Scott et Zelda Fitzgerald. Zelda n'est-il pas le nom de l'héroïne de sa pièce Il fait beau jour et nuit? Sagan a toujours aimé le théâtre. Et la chanson. Elle admire Billie Holiday, Orson Welles, Tennessee Williams. Elle se lie avec eux lors de ses séjours américains et en brosse de mémorables portraits dans Avec mon meilleur souvenir. Elle s'entend avec les écorchés car, au fond, elle leur ressemble. «Aux yeux des filles de ma génération, poursuit Laure Adler, c'était l'icône de la liberté sexuelle, de la rapidité d'écrire (avec grâce), elle conduisait à tombeau ouvert, aimait le sable chaud et les beaux mecs. Mais dans la réalité, elle n'avait pas ce côté solaire qu'on a tant décrit. Elle n'était pas sûre d'elle - et ce n'était pas de la fausse modestie, elle ne composait pas. Elle était dans la déchirure de l'être.» Et n'était rigoureuse que dans l'écriture.

    Aimer perdre
    Vingt ans après Bonjour tristesse, toujours en avance sur son époque, Sagan mène une existence de punkette boulimique. Amphétamines, anxiolytiques, cocaïne, piqûres de morphine, crises de delirium tremens, asile. Elle devient intime avec la veuve d'un gangster, fréquente des toxicomanes. La brigade mondaine perquisitionne chez elle. L'égérie de Sartre se réveille avec la nausée. Entre-temps, elle s'est fâchée avec Flammarion. «Il a retiré tous ses livres de la vente, allant jusqu'à casser les plaques d'impression», raconte Denis Westhoff. Massimo Gargia la retrouve en 1985: «Elle était déjà fatiguée à quarante ans, n'avait plus la force de sortir. Elle ne supportait plus les boîtes de nuit, les mondanités. Elle n'aimait pas ce milieu de la jet-set, au fond. Comme Bardot, elle préférait vivre dans la simplicité, le désordre.»

    Les années Mitterrand seront son chant du cygne. A l'époque, Laure Adler est conseiller culturel de l'Elysée: «Ils étaient très liés, Mitterrand et elle. Nous avons fait ensemble des voyages en hélicoptère. Elle arrivait en retard et faisait attendre tout le monde, y compris le Président. Cela l'amusait. Ils avaient une relation très tendre - pas amoureuse. Il me parlait d'elle avec admiration, il avait lu tous ses livres.» Cette amitié vaudra à Sagan de nombreux déboires. Et contribuera à brouiller un peu plus son image auprès du public. En 1985, tombée dans le coma lors d'un voyage officiel du Président en Colombie, elle est rapatriée d'urgence. Les médias évoquent une overdose, Jack Lang parle de mal d'altitude.

    En 1991, André Guelfi, l'un des protagonistes de l'affaire Elf (sous le nom de Dédé la Sardine), demande à l'écrivain d'intervenir auprès de François Mitterrand pour favoriser l'activité de la compagnie pétrolière en Ouzbékistan. Endettée jusqu'au cou, Sagan accepte, contre la promesse d'une commission de 5,5 millions de francs. Selon Marc Francelet2, qui servit d'intermédiaire, seule une partie de la somme aurait été versée, sous forme de travaux dans son manoir normand, qu'elle omet de déclarer aux services fiscaux. «Elle avait un petit côté coquin et aimait les filouteries. D'ailleurs, Mitterrand l'a un jour comparée à Mata Hari. Mais, dans cette histoire, on s'est servi d'elle pour blanchir de l'argent. Les travaux ont été facturés quatre millions de francs, il y en avait à peine pour le tiers...» plaide son ayant droit Denis Westhoff. En février 2002, Françoise Sagan est condamnée à un an d'emprisonnement avec sursis pour fraude fiscale et doit rembourser, aggravés des pénalités, les revenus dissimulés. «Elle a dû vendre ses bijoux et les plus beaux cadeaux qu'elle avait reçus dans sa vie. Les droits sur ses derniers livres partaient directement aux impôts», témoigne Massimo Gargia. Amie des grands de ce monde, elle se croyait au-dessus des lois, la voici officiellement insolvable.

    Jean Grouet, à la fois agent et éditeur, tente d'endiguer les problèmes financiers: «Françoise écrivait quand elle était acculée par les dettes. Elle m'a fait vendre trois fois la même nouvelle. Elle avait toujours besoin d'argent. Quand elle m'en empruntait, elle disait: "Je ne vous le rendrai jamais mais je ne vous en voudrai pas." CBS a accepté de payer 20 000 dollars une interview d'elle avec Brigitte Bardot. Le problème, c'est qu'elles n'avaient rien à se dire...» Massimo Gargia garde le souvenir d'amusants trafics: «Françoise revendait les cadeaux en or, en argent ou en cristal de sa grande amie Marie-Hélène de Rothschild, qui avait financé sa pièce Château en Suède. Le jour où Marie-Hélène s'en est rendu compte, elle s'est mise à lui offrir de fausses fourrures. Et lorsque Françoise a préfacé le livre d'une amie très riche, elle a demandé à être payée au noir...»

    Pourtant, l'oeuvre de Sagan généra longtemps des sommes colossales, aux quatre coins du monde. Bonjour tristesse fut un best-seller en Italie, dans sa version... française. Et se vendit à deux millions d'exemplaires aux Etats-Unis, où la Fox déboursa 100 000 dollars pour les droits du roman Le garde du coeur. Traduite en Corée du Sud et en Chine, Sagan fut aussi l'un des seuls écrivains français autorisés en Russie pendant la guerre froide. Le journaliste Guillaume Durand est l'un de ses ardents défenseurs: «Ce n'était pas une tricheuse. Elle ne s'est pas installée en Suisse, comme d'autres. Elle distribuait son argent à ses copains. Elle ne possédait rien à part ses voitures et une maison bizarre. Tellement de gens ont profité d'elle, chacun se prétendait son meilleur ami.» Tous les proches de l'écrivain conservent le souvenir de sa grande générosité. «Sa table était toujours ouverte, avec les meilleurs vins et du caviar», précise Gargia. Elle offrait bijoux, vêtements... jusqu'à ses propres manuscrits. Son fils n'en a récupéré qu'un seul, un inédit illisible. Bonne joueuse, elle se contentait de proclamer, à propos des biens matériels: «J'aime perdre.»

    A la fin de sa vie, la star déchue loge avenue Foch, chez son amie Ingrid Mechoulam, épouse d'un millionnaire. Ruinée, privée de chéquier, elle peut à peine s'acheter ses cigarettes. «Cette amie l'a soignée, emmenée à l'hôpital et sauvée financièrement - mais elle l'a coupée du monde, juge Denis Westhoff. Massimo Gargia défend l'amie qu'il présenta à Sagan: «On est possessif, quand on est amoureux. Ingrid l'a quand même soutenue pendant douze ans, jusqu'à la fin... "Il n'y a que des preuves d'amour", disait Cocteau!» Guillaume Durand fréquente l'écrivain déchu à cette époque, pour un projet de livre: «Sa principale blessure venait de cette histoire avec le fisc. Elle se sentait coincée. Elle s'est enfermée dans un désenchantement élégant. Démunie, au bout de sa vie, dans un écrin de luxe. Et personne n'a rien fait, soi-disant à cause de ses problèmes de cocaïne. Elle avait une ébriété à l'égard de l'argent. Ce n'est pas toléré par la société. Charasse (NDLR: alors ministre du Budget) s'est vanté de ne pas l'avoir aidée!» Selon Laure Adler, la Présidence aurait eu les moyens d'annuler une dette, mais l'ancienne conseillère n'en dit pas plus. Gargia est plus explicite: «Quand Mitterrand est tombé, c'est devenu très dur pour Françoise.» Durand poursuit: «Seuls des amis un peu voyous lui ont tendu la main. Francelet lui a fait vendre une chanson à Johnny.» Ce sera son dernier texte... «Elle déclinait physiquement et devenait très difficile d'accès. La porte ne s'ouvrait plus, même pour François Mitterrand.» Pour Durand non plus: son livre d'entretiens ne sortira jamais. «Elle restait en pyjama, lisait les grandes romancières anglaises et écrivait au lit, sa célèbre Kool à la main. Elle demeurait pourtant pudique et coquette, se remaquillait un peu avant de me recevoir.» Laure Adler se rend avenue Foch au même moment: «Elle était affaiblie et bouleversante. Elle marchait à petits pas, mettait un temps fou à ouvrir la porte. Je venais pour écrire une biographie mais je n'osais pas prendre de notes... Je me souviens de conversations sur des sujets profonds, comme la religion. A la fin de la journée, elle continuait à parler dans l'obscurité, elle n'allumait même pas la lumière.»

    Françoise Sagan s'éteint le 24 septembre 2004, à Equemauville, d'une embolie pulmonaire. Elle repose désormais auprès de Peggy Roche. Juliette Gréco, présente aux obsèques avec les derniers fidèles, en a donné l'explication au Monde: «Elle a demandé à être enterrée à Cajarc (Lot), dans le pays où elle est née, qu'elle aimait, avec une femme qu'elle a aimée et qui l'a aimée jusqu'au bout.» Pourtant, le nom de ce grand amour n'est pas inscrit sur la tombe. Pudique jusqu'au bout. A propos de Sarah Bernhardt, dont elle se fit la biographe, Sagan écrivait: «Ce que j'aime en elle, c'est cet humour qu'elle a gardé jusqu'au bout. Elle a eu une vie gaie et heureuse et elle n'a pas été punie parce qu'elle avait plein d'amants.» Souhaitait-elle, secrètement, qu'on en dise autant d'elle?

    1) Cité par J.-C. Lamy dans Sagan. 2) Cité par M.-D. Lelièvre dans Sagan à toute allure.

    Sans vous aimer par Michaël Delmar, 192 p., Scali, 16 euros 5, rue des Italiens par Bernard Frank, 714 p., Grasset, 24,50 euros Les femmes qui écrivent vivent dangereusement par Laure Adler et Stefan Bollmann, 150 p., Flammarion, 29 euros Sagan par Jean-Claude Lamy, 340 p., Mercure de France, 22 euros

    Les oeuvres complètes de Françoise Sagan sont publiées par Robert Laffont, dans la collection Bouquins créée par son premier mari, Guy Schoeller.

    http://www.lire.fr/enquete.asp?idc=52055&idR=200&idG=

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