Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Pendant notre séjour à Venise, j'ai lu:"Chérie noire", de Caryl Féret, illustré par Charles Berbérian

Le Monde.fr | 04.07.2013 à 12h33 • Mis à jour le 11.07.2013 à 10h12 | Par Yann Plougastel et Christine Ferniot

La couverture de "Chérie noire".

Le petit monde du roman noir

Chasser le naturel, il revient au galop. Surtout lorsque les mouettes lancent leurs "piou piou" au-dessus de la rade de Brest. Milena en sait quelque chose. Elle est écrivain et jolie comme un coeur. Son premier roman, L'Enfer rouge, sur les misères subies lors de son adolescence dans la campagne roumaine du temps de Ceausescu, a remporté un beau succès. Elle est à Brest pour participer avec les huit meilleurs auteurs de romans noirs de la planète à La Route du blanc, une course autour du pôle Nord. Avec ses robes de star et son décolleté, elle sait bien que ces hommes, tout aussi écrivains soient-ils, ne peuvent que succomber à son charme. Mais, elle a bien des choses à cacher et, dès que sa part d'ombre risque d'être dévoilée, l'affaire se corse...

 Une illustration de Charles Berbérianpour "Chérie noire".Une illustration de Charles Berbérianpour "Chérie noire". | Le Monde

Une boucle à l'oreille gauche, un beau regard d'écumeur des mers, Caryl Férey, 46 ans, a longtemps vécu en Bretagne. A trop écouter les Clash, il voulait être guitariste de rock. Mais, en lisant Bleu comme l'enfer, de Philippe Djian, l'écriture lui parut une voie à prendre de toute urgence. Il y croisa la tendresse de John Fante et le foisonnement de James Ellroy. Après avoir travaillé pour le Guide du routard et effectué des escapades en Australie, puis en Nouvelle-Zélande, il publia, en 1994, son premier polar, Delicta Mortalia : péché mortel (Balle d'argent). Les choses sérieuses ne vinrent que des années plus tard avec Haka (Baleine, 1998) et Utu (Gallimard, 2004), enquêtes autour d'une série de meurtres chez les Maoris. Il y forgea ce qui allait devenir sa marque de fabrique : 1. Ecrire sur l'homme, et plutôt sur celui qui est opprimé. 2. Défendre les peuples autochtones. 3. Dénoncer l'oppression. "J'adore la vie, il y a de belles étincelles. Mais l'humain est désespérant dans sa globalité", explique-t-il. Ses deux livres les plus aboutis, Zulu (2008) et Mapuche (2012), publiés dans la "Série noire", qui se passent en Afrique du Sud et en Argentine, sont des plongées dans les pays où ils se déroulent et où Caryl Férey prend soin de s'immerger des mois avant d'écrire.

Chérie noire est une nouvelle à l'humour décapant, qui se moque gentiment du petit monde du roman noir, pour une fois victime de ses propres turpitudes. Le dessinateur Berberian, lui aussi venu du rock, a croqué une Milena au naturel exubérant. Y. P.

 

Retrouvez les "Petits Polars du Monde" sur la boutique en ligne du Monde

Retrouvez l'adaptation radiophonique des "Petits Polars du Monde, avec SNCF" chaque samedi de 21 heures à 22 heures, du 29 juin au 28 septembre, sur France Culture. A réécouter et podcaster sur Franceculture.fr

 

  Charles Berbérian et Caryl Féret, vus par Charles Berbérian. Charles Berbérian et Caryl Féret, vus par Charles Berbérian. | Le Monde

L'auteur: Caryl Férey

 Né à Caen en 1967, Caryl Férey grandit en Bretagne, se préparant à faire le tout du monde tout en écoutant les Clash en boucle. 
Après avoir fait ses gammes avec deux premiers romans chez l'éditeur rennais Balle d'argent, Caryl Férey publie Haka chez Baleine, en 1998. Les souvenirs de son séjour en Nouvelle-Zélande nourrissent ce polar noir et lyrique ayant pour personnage central Jack Fitzgerald, un flic d'origine maorie. Il entre alors à la Série noire et publie Utu, suite de Haka, se déroulant cette fois en Australie. Il obtient le Prix SNCF du polar en 2006.

C'est ensuite vers l'Afrique du Sud qu'il se dirige avec Zulu, toujours en Série noire, un roman situé à Cape Town, ville corrompue par ses gangs, ses trafics de drogue et son racisme latent, post-apartheid.  Il reçoit en 2009 le Grand Prix des lectrices de Elle et une bonne dizaine d'autres médailles. Zulu vient d'être adapté au cinéma par Jérôme Salle, avec Forest Whitaker.

Passionné de musique punk-rock, Caryl Férey écrit des chansons, imagine des spectacles comme Crevasses, où se mêlent théâtre, musique, rap et slam. Fidèle à sa passion pour les Clash, il rédige La Jambe gauche de Joe Strummer (Folio policier), une fiction-hommage au leader du groupe mythique.

Avec Jour de colère, La Cage aux lionnes ou Krotokus Ier, roi des animaux, le romancier fait quelques incursions dans la littérature jeunesse. Il signe aussi un essai qui lui va fort bien : Petit éloge de l'excès (Folio "2 euros").

Au printemps 2012, Caryl Férey retrouve la Série noire après un long voyage en Argentine et trois ans d'écriture. Son livre Mapuche est à la fois un thriller, un regard politique et sociologique et un cri de colère qui met en scène une jeune Indienne Mapuche et un détective privé. En attendant de poursuivre son voyage littéraire du côté du Chili, il vient de signer un roman autobiographique et humoristique : Comment devenir écrivain quand on vient de la grande plouquerie internationale (chez Points).  Chr. F.

L'illustrateur: Charles Berbérian

Né en 1959 à Bagdad, Charles Berbérian passe sa jeunesse au Liban avant de faire ses études aux Arts appliqués de Paris. Il publie ses premières bandes dessinées dans des fanzines puis rencontre Philippe Dupuy en 1983. Commence une collaboration -une complicité -, entre les deux artistes. Sous le nom de Dupuy-Berbérian, ils entrent à Fluide glacial, réalisent Red, Basile et Gégé, qui deviendra l'album Graine de voyous. Puis vient Le Journal d'Henriette , chroniques d'une adolescente pétrie de complexes.  

C'est en 1990 qu'ils créent l'irrésistible Monsieur Jean : un personnage qui leur permet de raconter des histoires à la fois personnelles, amicales et sans contraintes. Le tome 4 obtient en 1999 le Prix du Meilleur Album au Festival d'Angoulême. Ils composent également des carnets de voyages.  En 2008, ils sont récompensés par le Grand Prix de la Ville d'Angoulême. Au fil des années, ils ont publié ensemble plus de vingt-cinq ouvrages ainsi que de nombreuses illustrations pour des couvertures de livres, des films et pour la publicité.

Dessinateur et illustrateur, certes, mais aussi passionné de musique rock, Charles Berbérian est un érudit en la matière. Il illustre des pochettes de disque, joue de la guitare en compagnie du dessinateur Jean-Claude Denis sous le nom de Nightbuzz, écrit des chansons, réalise des concerts dessinés. Après Playlist, paru en 2004 chez Naïve, il a imaginé en 2011 un beau volume intitulé JukeBox (Fluide glacial). Il s'agit d'un hommage très personnel aux grandes figures pop qui l'ont fasciné, de David Bowie à John Lennon. On y retrouve anecdotes et fausses interviews de stars. Il a également, en 2012, revisité le cinéma à sa manière en publiant Cinérama, une sélection des meilleurs plus mauvais films du monde (Fluide glacial), voyage humoristique au pays des nanars.  Chr. F.

Yann Plougastel et Christine Ferniot

Les commentaires sont fermés.