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A Lyon, le Musée des tissus ne tient qu’à un fil

 

Avec deux millions et demi de pièces, le Musée des tissus est réputé détenir la plus belle tissuthèque au monde. Il appartient à la chambre de commerce et de l’industrie de Lyon, qui souhaite s’en défaire.

 

3/12/15 - 08 H 48 - Mis à jour le 3/12/15 - 08 H 48

 
 
 
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agrandirUne des salles du Musée des Tissus de Lyon.

 PIERRE VERRIER / MUSEE DES TISSUS

Problème, personne ne se porte candidat.

 

C’est un trésor inestimable, dont personne ne veut hériter. Voilà un an que la chambre de commerce et d’industrie (CCI) de Lyon cherche à se défaire duMusée des tissus et de son voisin consacré aux arts décoratifs, installés dans deux hôtels particuliers attenants, derrière la place Bellecour. « Non pas parce que nous le voulons, mais parce que nous le devons », insiste son président, Emmanuel Imberton, confronté à la baisse drastique de ses recettes fiscales. « Nous ne pouvons faire face aux lourds travaux nécessaires, poursuit-il. Encore moins consacrer 1,7 million d’euros aux frais de fonctionnement du musée », estime ce descendant de soyeux lyonnais.

UNE INSTITUTION PROFESSIONNELLE D’EXCEPTION

Ce sont ses ancêtres qui, parmi d’autres, ont contribué à fonder en 1856 la seule institution classée « musée de France » appartenant à une CCI. Piquée au vif par l’accueil mitigé de ses productions lors de l’Exposition universelle de Londres, en 1851, la « Fabrique » lyonnaise pousse à la création d’un musée d’art et d’industrie. Les grandes maisons versent alors leurs archives. Les missions commerciales collectent des échantillons à travers le monde. Des fouilles entreprises dans la nécropole d’Antinoé, en Égypte, livrent des pièces exceptionnelles.

> Lire notamment L’Opéra de Lyon s’effeuille au musée des tissus

D’abord entreposées au Palais du commerce, au cœur de la ville, les collections sont transférées en 1945 entre les murs de l’Hôtel de Villeroy. Attachés à leur musée, les professionnels y invitent leurs clients, ou viennent y puiser l’inspiration. Ils y effectuent également des recherches d’antériorité, pour s’assurer de ne violer aucun droit de propriété. Le musée abrite également le Centre international d’études des textiles anciens.

80 000 VISITEURS ANNUELS

Mais, désormais, sa vocation première est bien de dévoiler son fonds à ses 80 000 visiteurs annuels. « Avec 2,5 millions d’œuvres, couvrant 4 500 ans, nous racontons une histoire universelle des chefs-d’œuvre du textile », résume Maximilien Durand, directeur d’une structure connue par-delà les frontières. « Selon les années, entre un tiers et deux tiers de nos visiteurs viennent de l’étranger, notamment d’Asie. Sans doute parce que la France méconnaît les arts décoratifs en général, et le tissu en particulier », déplore-t-il.

C’est peut-être bien là le problème, à l’heure de transmettre le flambeau. La CCI est prête à céder ses collections. Et même à les laisser entre les murs des deux hôtels dont elle est également propriétaire. Seulement, personne aujourd’hui ne veut prendre le relais. Chacun se défausse, de crainte de récupérer seul la charge du musée. Au point que commence à se dessiner le scénario du pire : sa fermeture. « Et l’abandon dans les réserves de collections particulièrement fragiles », craint Maximilien Durand.

DES CHARGES QUI REBUTENT

Approchée, la métropole de Lyon a décliné. « Nous ne pouvons pas être le seul intervenant. Notre budget culture est en baisse cette année, baisse qui se poursuivra probablement l’année prochaine », justifie Georges Képénékian. Coordinateur des grands équipements culturels de la métropole, l’élu a déjà dû absorber en début d’année l’onéreux Musée des Confluences.

Reste l’État. Un temps envisagée, l’hypothèse de l’adossement au Musée du Louvre a fait long feu. « Le Louvre est pourtant la seule institution de cet ordre à ne pas disposer de département textile », glisse Maximilien Durand. Mais pour l’État, la question ne se pose pas pour l’heure. « Ce musée est propriété de la CCI », insiste Marie-Christine Labourdette, directrice des musées de France, jointe par La Croix, lorsqu’on l’interroge sur un possible transfert de tutelle.

C’est le sens du rapport de l’Inspection générale des affaires culturelles qui lui a été remis voilà quelques semaines. « Les pistes proposées ont déjà été explorées, se désole Emmanuel Imberton. Toutes reposent sur le fait que la CCI demeure le chef de file du projet. Or, ce n’est plus possible », réaffirme-t-il.

Tous les acteurs se retrouveront en janvier autour du préfet de la région Rhône-Alpes pour tenter de résoudre le casse-tête. « Une solution pérenne ne peut pas s’inventer sans un partenariat de tous les acteurs, via un groupement d’intérêt public, par exemple », esquisse Alain Daguerre de Hureaux, directeur régional des affaires culturelles. Avec, pourquoi pas, l’implication « de fondations, dans le cadre d’un partenariat public-privé », envisage, pour sa part, Georges Képénékian, de la métropole de Lyon. Aux yeux du président de la CCI, « ce sera la réunion de la dernière chance ».

BÉNÉVENT TOSSERI (à Lyon)

L’exposition «Le Génie 2.0» ouvrira au public le 18 décembre. Elle fait écho à l’exposition présentée au rez-de-chaussée, célébrant « Le Génie de la Fabrique ». Une démonstration du savoir-faire lyonnais à travers les siècles. Des reproductions des tissus ornant la chambre de Louis XVI aux dernières innovations en textile médical, une trentaine d’industriels de la région lyonnaise ont versé leurs créations les plus récentes. Pas un ne manque à l’appel. À voir – normalement – jusqu’à juin prochain. Musée des tissus et des arts décoratifs de Lyon, 34, rue de la Charité, 69002 Lyon. Rens. : www.mtmad.fr ou au 04.78.38.42.00.

 
 

3/12/15 - 08 H 48 - Mis à jour le 3/12/15 - 08 H 48

http://www.la-croix.com/Culture/Expositions/A-Lyon-le-Musee-des-tissus-ne-tient-qu-a-un-fil-2015-12-03-1388122

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