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Mort de l’artiste Margaret Keane, peintre des Big Eyes, immortalisée par Tim Burton

Mort de l’artiste Margaret Keane, peintre des Big Eyes, immortalisée par Tim BurtonMargaret Keane, Keiki Lisa (détail), 1986, impression à l'encre sur toile, 61 x 45,7 cm ©Keane Eyes Gallery, San Francisco, CA / Margaret Keane

Margaret Keane, peintre d'enfants aux grands yeux, est décédée dimanche dernier à l'âge de 94 ans. Victime durant 15 ans de son mari qui s'est attribué le mérite de ses toiles, l'artiste a vu son histoire relatée dans le film biopic Big Eyes de Tim Burton.

L’artiste américaine Margaret Keane, dont les peintures d’enfants au regard mélancolique étaient incroyablement populaires dans les années 1950 et 1960, est décédée dimanche 26 juin 2022 à 94 ans, dans la Napa Valley en Californie, suite à un problème cardiaque. Elle a été impliquée dans une bataille juridique sur la paternité de son travail après que son mari en a revendiqué le crédit, redoutable manipulation qui a dupé le monde entier. L’histoire de l’imposture a été racontée par Tim Burton dans le film Big Eyes, sorti en 2014.

Des personnages aux grands yeux, reflets de sa propre souffrance

Née à Nashville dans le Tennessee en 1927, Margareth subit dans son enfance une opération qui lui cause des problèmes d’audition. Elle devient alors obsédée par les yeux, qui l’aident à comprendre les conversations. Dès ses 10 ans, elle commence à dessiner des personnages avec de grands yeux en forme de soucoupe, reflets de sa propre souffrance. Après une école d’art dans sa ville natale, elle part étudier à la Traphagen School of Design de New York. Elle épouse un homme qu’elle finit par fuir avec leur petite fille Jane, née en 1950. Pour vivre, elle dessine des portraits de passants dans la rue.

 

L’une des plus grandes impostures que l’histoire de l’art ait connue

En 1955, elle épouse Walter Keane, ex-agent immobilier. En 1957, celui-ci commence à vendre ses toiles, signées sobrement de leur nom commun, Keane. Mais ce n’est que plus tard qu’elle découvre qu’il les fait passer pour siennes. Il la persuade alors que ses œuvres sont plus faciles à vendre ainsi. Apeurée, Margaret se rend complice du mensonge. Très vite son travail, usurpé par Walter, devient célèbre. Après avoir tenté sans succès de peindre des Big Eyes, Walter, jaloux et frustré, se met à boire et force son épouse à peindre 16 heures par jour, enfermée dans un atelier où personne n’est autorisé à entrer, pas même la fille de Margaret. La peintre confie en 2014, lors d’un entretien au « Guardian », qu’il l’a menacée de mort à maintes reprises, ainsi que sa fille. Avant d’affirmer : « J’étais en prison ».

Exposés à San Francisco ou encore New York, les Big Eyes sont progressivement déclinés en posters, cartes postales ou même assiettes en porcelaine et Walter ouvre rapidement des galeries dans tout le pays. Un fossé se creuse cependant entre le succès commercial des tableaux et leur réception par les critiques, qui les considèrent comme mièvres et kitsch. En 1964, à l’Exposition universelle de New York, une peinture intitulée Tomorrow Forever est même qualifiée de « travail de piratage insipide » dans le « New York Times », avant d’être retirée à la suite de plaintes.

Margaret Keane, Complicated Lady, 1972, imprimé sur toile rehaussé à la feuille d’or ©Keane Eyes Gallery, San Francisco, CA

L’ouverture de la Keane Eyes Gallery

Après quinze ans de mariage, le couple divorce en 1970. Margaret se remarie et annonce alors à la radio être la véritable auteure des toiles. Afin de le prouver, elle défie publiquement Walter de se soumettre à une démonstration de peinture en direct, à Union Square, à San Francisco. Bien qu’une foule, dont plusieurs médias, se soit rassemblée, Walter ne se présente pas. Margaret l’attaque en justice et lors du procès ouvert en 1986, elle réalise devant le juge et les jurés, en 53 minutes, un tableau typique de son style. Elle gagne alors l’affaire et est indemnisée de 4 millions de dollars.

En 1992, Margaret retourne en Californie et ouvre la Keane Eyes Gallery à San Francisco. Elle continue à peindre jusqu’à ses 90 ans dans la vallée de Napa, tout en vendant son travail aux enchères et dans sa galerie. Ses derniers portraits d’enfants sont plus joyeux qu’auparavant, libérés du poids du secret et de l’injustice. Son histoire a été adaptée au cinéma dans le film Big Eyes de Tim Burton. En 2018, le Los Angeles Art Show lui décerne un prix pour l’ensemble de sa carrière. Aujourd’hui, Margaret Keane est considérée comme une précurseuse du « surréalisme pop » et du lowbrow art, mouvements apparus en Californie dans la seconde moitié du siècle dernier, qui ne craignent ni le « populaire », ni le « mauvais goût », et dont l’un des plus célèbres représentants aujourd’hui est l’artiste Mark Ryden.

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