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Catégories : Des expositions

Les Nabis s’installent à Lodève

 


Gros plan sur un mouvement composé de disciples de Gauguin nommés Denis, Sérusier, Maillol… En hébreu, "nabis" signifie "prophètes". En 1888, de jeunes disciples qui entourent Paul Gauguin durant ses séjours à Pont-Aven composent un groupe pour inventer la peinture du futur

Un tableau de Paul Sérusier, Le Talisman, devient leur étendard. Maurice Denis est leur théoricien : « Un tableau, avant d’être un cheval de bataille, une femme nue, ou une quelconque anecdote, est essentiellement une surface plane recouverte de couleurs en certain ordre assemblées. »

Foin du naturalisme ou de l’impressionnisme alors dominant ! Les Nabis prônent une liberté à la fois graphique et chromatique qui annonce le fauvisme et même l’abstraction comme l’illustrent

Bretonnes au goémon d’Emile Bernard, le Paysage décoratif de Jan Verkade, ou encore deux étonnants petits paysages bretons du Danois Mogens Ballin, compagnon de route d’un éphémère mouvement dont les signatures ont souvent une postérité limitée.

Le musée de Lodève leur consacre une exposition très documentée. Les œuvres majeures sont rares mais la profusion de toiles, lithographies, correspondances, objets décoratifs, permet de comprendre l’évolution d’un courant qui prend sa source dans "l’art de la synthèse" enseigné par Gauguin. Dont le primitivisme est ici représenté par une belle série de bronzes à la patine noire, réalisés d’après ses fameuses sculptures polynésiennes en bois. Les deux tableaux de Gauguin accrochés dans la même salle ont en revanche peu de rapport avec le style nabi.

Un peintre se détache tout au long du parcours chronothématique : Maurice Denis (1870-1943). Logique puisque l’organisation de l’exposition a été confiée au Musée Maurice-Denis de Saint-Germain-en-Laye. Les Saintes femmes au tombeau témoignent du mysticisme du peintre et de l’influence de la Renaissance italienne. Avec Régates à Perros-Guirec, Maurice Denis livre une œuvre audacieuse qui déforme la perspective et télescope les couleurs. Les visages des Bretonnes sont ici sans traits.

Avant que le symbolisme n’alourdisse sa peinture, Maurice Denis révèle beaucoup d’inventivité pour les arts décoratifs (gouaches pour papiers peints, projets de vitraux). C’est là une caractéristique des Nabis qui voulaient mettre de l’art dans le quotidien de la vie. Le Paravent aux lapins de Pierre Bonnard est une pièce précieuse, plus délicate que la naïve Tentation de Saint-Antoine de Paul Ranson, proche de l’imagerie d’Epinal. Mais l’estampe, japonaise surtout, est une référence des Nabis.

On découvre encore parmi eux un Aristide Maillol, portraitiste élégant de jeunes femmes qu’il ne dénude pas encore. Au fil de l’exposition, l’académisme s’infiltre. Les vastes compositions qui bouclent l’exposition sont d’esprit pompier. Les Nabis se diluent au début du XXe siècle. Les Fauves rugissent déjà.



Jean-Marie GAVALDA

Musée de Lodève jusqu’au 14 novembre. 04 67 88 86 10

 

http://www.midilibre.com/articles/2010/06/12/CULTURE-LOISIRS-Les-Nabis-s-installent-a-Lodeve-1266425.php5

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