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  • Catégories : Des expositions, La peinture

    Exposition de Francis Denis à Paris Du 14 au 27 septembre 2007

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    Denis CORNET aura le plaisir de présenter sur les cimaises de sa galerie un ensemble d'oeuvres réalisées par le peintre Francis DENIS sur le thème de la Passion du Christ, oeuvres sur toile, bois ou carton.

     

         Francis DENIS accroche ses œuvres de Dunkerque à Paris, de Gand à Madrid... Il préfère les manifestations collectives aux expositions en solo. « L’artiste qui vit dans une tour d’ivoire n’est pas mon style. Je suis curieux de l’œuvre des autres… »

         L’homme s’en nourrit pour mieux créer. Du reste, son travail est très inspiré de celui des grands maîtres : Jérôme Bosch, Picasso, Braque, le sculpteur baroque espagnol Grégorio Fernandez. « Je voudrais vivre comme eux, rêve Francis DENIS, être reconnu comme artiste national… » Pour l’heure, l’homme partage sa passion colorée avec le métier d’éducateur à l’IME de Longuenesse. Totalement autodidacte, il s’est essayé à la gouache et au pastel avant de découvrir l’huile sur bois ou sur papier. « J’ai eu l’impression de me libérer ! » se souvient-il. Il peint beaucoup, vite, sans regret « Il ne faut pas que je touche une œuvre cinquante fois, ma technique me l’interdit. » Il peint en couleurs vives et chaleureuses, drôles et brûlantes, parfois fulminantes.

         Ses femmes sont roses, rondes, gouleyantes sur fond bleu, « ce bleu qui traduit le plus la notion d’espace et de liberté. » Ses christs se veulent ardents : « Ils sont une réflexion sur l’existence et non une démarche mystique ou religieuse, précise le peintre. Je m’interroge sur la bêtise des guerres de religion. »

         Beaucoup de portraits, de formats carrés et de fruits rebondis. « Je préfère glisser sur une courbe plutôt que de me heurter à un angle. »

     

    Marie-Pierre GRIFFON

    L’Echo du Pas-de-Calais n°83 ( avril 2007 ) ( extraits )

     

    www.francisdenis.com

     

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    Galerie THUILLIER

    13, rue de Thorigny ( près du Musée PICASSO )

    75003   PARIS

     

      La couleur joue les premiers rôles dans ces compositions qui résument le motif à l’essentiel. Francis DENIS s’empare du réalisme en prenant soin d’évincer les détails anecdotiques au profit d’un minimalisme architecturé, souvent réduit à des structures géométriques extrêmement  simplifiées. Travaillant par thème, il souligne les contours du sujet dans une mise en scène très simplificatrice. Très remarquées au salon Linéart de Gand, les œuvres de cet artiste vont figurer aux cimaises de galeries internationales. »

    Thierry SZNYTKA

    Arts Actualités Magazine hors-série n° 14, janvier 2006

     

     

     

    Source de cet info: le peintre lui-même

  • Catégories : Des lieux, La littérature

    Maisons d'écrivains

    La Fédération des maisons d'écrivain & des patrimoines littéraires
    vient de publier, grâce au soutien du Secrétariat d'Etat à la Consommation
    et au Tourisme, une carte recensant 203 lieux, maisons d'écrivain et
    musées littéraires, à visiter dans toute la France.

    Cette carte à vocation touristique (bilingue anglais) recense, en
    essayant d'être la plus complète possible, l'ensemble des maisons d'écrivain
    et lieux liés à la littérature ouverts au public dans notre pays. Au
    verso, elle donne la localisation exacte de chaque lieu et ses
    coordonnées téléphoniques et renvoie à la consultation d'Internet, plus
    particulièrement à la base de données du site de la Fédération.

    Vous pouvez la commander auprès de la Fédération (la carte est
    gratuite, seuls les frais de port vous seront facturés) ou l'obtenir dans
    l'Office de Tourisme le plus proche de chez vous.

    Rendez-vous sur notre site Internet : www.litterature-lieux.com !

  • Catégories : Blog, Web

    Blogueuse avant l’heure

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    Brigitte Gemme en 1996 (à gauche) et en 2007.


    Laurent Suply (lefigaro.fr). Publié le 20 juillet 2007Actualisé le 23 juillet 2007 : 08h22


    Brigitte Gemme avait 17 ans quand, en 1995, elle a ouvert le premier blog francophone.


    Un village global. Des milliards de visiteurs uniques. Des millions de dollars levés par les « réseaux sociaux ». Et 100 millions de blogueurs, selon les prévisions annuelles du cabinet Gartner.


    A l’heure où le web s’écrit avec six zéros avant la virgule, qui se souvient des « homepages », ces espaces personnels inaccessibles au commun des mortels ? Qui se souvient du temps où les jeux en ligne n’avaient pas trois dimensions, ni même une, mais s’écrivaient en mots et phrases ? Brigitte Gemme, certainement, et avec un brin de nostalgie.


    « Des opinions, des états d'âme et surtout des banalités »


    Cette québécoise est en effet une des pionnières du web francophone, à une époque où la France voyait encore le futur dans une boîte beige nommée « Minitel », et en particulier du "blogging". Le terme peut paraître usurpé : l’expression « weblog » remonte à 1997, alors que Brigitte inaugure son journal personnel dès 1995. A 17 ans, membre du club informatique de son collège, elle relève le défi d’un autre membre, employé d’un des premiers « FAI », et crée sa page personnelle, intitulée « Montréal, Soleil et Pluie ».


    « 7 juin 1995. De retour de Halifax a 5:30 le matin, je suis a mon clavier avant même 7:00. Le voyage fut long, mais cette fois au moins j'ai pu dormir... » Telle est la teneur du premier billet de Brigitte Gemme. Du moins du plus ancien à être encore archivé sur le web.


    Vite connu sous le nom de « MSP », le journal est-il un blog ? Billets quotidiens classés chronologiquement, usage de la première personne et contenu personnel font pencher pour le oui. En revanche « il n’y avait strictement aucun moyen pour un éventuel auditoire de réagir », souligne l’auteure, qui réfute le caractère quasi-archéologique de son œuvre. « J'ai exprimé des opinions, des états d'âme et surtout des banalités par le biais d'un nouveau média. Ce n'est pas une grande révolution... », dit-elle. Pourtant, quelle meilleure définition du blog, deux ans avant l’invention de ce mot, et une décennie en avance sur l’avènement du phénomène parmi le grand public ?


    Internet s’est démocratisé


    Reste à savoir comment cette idée novatrice à pu germer dans la tête de Brigitte Gemme. « J'étais une jeune femme dans un monde essentiellement masculin, qui faisait quelque chose de différent avec un même outil. Je ne me servais pas du web à des fins techniques, mais pour insuffler un peu de poésie », explique-t-elle.


    « Trois ans, deux jours, et plus de mille regards quotidiens plus tard », le mardi 9 juin 1998, Brigitte Gemme signe l’excipit de Montréal, Soleil et Pluie. « Internet s'est démocratisé(…). Ca m'a dérangé de me rendre compte que de quasi-étrangers se sentent, à cause de ces quelques mots, plus "intimes" avec moi ». En filigrane, la seule discordance avec l’archétype du blogueur des années 2000 : la course à l’audience et la notoriété l’ont détournée, et non attirée.

    Source:http://www.lefigaro.fr/high-tech/20070720.WWW000000238_blogueuse_avant_lheure.html

  • Catégories : "Carpe diem"

    Le seul regret de Jean-Pierre Elkabbach

    PIERRE DE BOISHUE.
     Publié le 21 juillet 2007
    Actualisé le 21 juillet 2007 : 21h58

    Il y a quarante ans, le journaliste croisait une inconnue sans oser l'aborder. Depuis il s'est contraint à ne plus laisser passer sa chance.

    « JE VIS intensément le présent. La Femme en bleu explique sans doute cette attitude. » Étonnante confidence que celle de Jean- Pierre Elkabbach. Il avait 30 ans. Il était tombé sous le charme éphémère d'une inconnue... Le président d'Europe 1 et de Public Sénat garde précisément en mémoire cet épisode qui, dit-il, a forgé son caractère et a eu un impact sur sa vie. « Je débutais ma carrière de journaliste, se souvient-il. J'étais timide et réservé. Je me trouvaissur les Champs-Élysées, un jour de juin. Le temps était splendide. À un moment donné, j'ai croisé une femme magnifique d'environ 35 ans, très brune, dans une robe bleu nuit en mousseline... »
    Installé dans son bureau parisien, au siège d'Europe 1, Jean-Pierre Elkabbach s'interrompt. Curieuse impression que celle d'entendre l'interviewer, dont le parcours professionnel offre une succession de succès et de traversées du désert, s'appesantir sur un souvenir aussi original. « C'était une apparition. Cette femme me rappelait ces actrices italiennes qu'on aimait bien autrefois. Elle ressemblait à Lea Massari. Nous nous sommes croisés. Je me suis retourné. Elle aussi. Nous avons échangé un sourire. Nous avons continué notre chemin. J'ai à nouveau jeté un oeil derrière moi. Elle m'a adressé un autre regard. Puis elle a tourné dans une rue. J'ai essayé de la retrouver. J'ai couru. En vain. Je ne l'ai plus jamais revue. D'une certaine façon, j'ai été influencé par cet épisode. »
    Avant d'exposer cette anecdote, l'ancien animateur de « Cartes sur table » avait jeté un oeil dans le dictionnaire sur la définition du mot « regret » pour expliquer en quoi celle-ci était contraire à sa philosophie de la vie. Mélancolie, amertume, remords... « Je ne me reconnais pas dans tous ces mots parce qu'ils traduisent un échec. J'ai plus de désirs et d'envies que de regrets. Le goût de l'action domine chez moi », indique le journaliste, qui se souvient encore de son dépit après avoir perdu la femme en bleu. « Cela aurait pu être une rencontre importante pour elle et pour moi. Elle n'a jamais eu lieu. Elle m'a laissé sur un sentiment de frustration... » Et Jean-Pierre Elkabbach de poursuivre sur le même registre et de décrire sa chance d'avoir échoué plus tôt sur les Champs-Élysées : « Ceci m'a conduit à arrêter, plusieurs années plus tard, une femme en rouge. » Le chef d'entreprise remonte le courant de ses souvenirs.
    La situation vécue des années auparavant se répète. Il est frappé par le regard d'une inconnue vêtue de rouge qu'il aperçoit à travers la vitre d'un autobus au coin de la rue Cognacq-Jay. Il décide de tenter sa chance en se lançant à sa poursuite.« Elle était brune et très belle. Je lui ai fait signe de descendre. Elle a haussé les épaules. Le bus avançait lentement. Le conducteur s'est fait interpeller par les passagers qui observaient mon agitation dans la rue. Il s'est exécuté. La femme est descendue. Elle m'a donné son nom. Il s'agissait de Nicole Avril (dont il partage la vie, NDLR). Elle venait de publier deux livres. »
    Un tempérament de « fonceur » qui lui vaut des inimitiés. Et notamment lors de sa présidence à France Télévisions, dont il fut contraint de démissionner après la polémique sur les contrats qu'il avait accordés aux animateurs producteurs. « J'ai eu de très nombreuses périodes très heureuses, dit-il. J'intègre même les moments où j'ai reçu des coups, où j'étais mort socialement et où on parlait de moi comme si je n'avais jamais existé. » L'homme est peu disert sur ses échecs. Mais il se prête au jeu. Se reproche les périodes où il s'est montré « conformiste et pas assez audacieux », « impatient et impulsif » lorsqu'il exerçait de hautes responsabilités. « J'ai parfois blessé avec des mots maladroits. J'ai appris à mieux maîtriser les choses et à prendre les décisions avec plus de maturité. J'essaie de ne pas profiter des situations de pouvoir qu'on a à un moment donné. Elles sont forcément passagères », précise Jean-Pierre Elkabbach.
    En fin d'interview, il évoque Oran et la mémoire de son père. Parmi ses regrets « littéraires » : ne jamais avoir rencontré Albert Camus. « Nous avions des amis communs. J'ai le souvenir d'être allé parfois chez eux à l'heure du café et de ne voir de lui que la fin de sa cigarette qui se consumait dans un cendrier. » Mais dans son bureau d'Europe 1, Jean-Pierre Elkabbach souhaitait surtout raconter ce jour-là un regret heureux. Celui de la Femme en bleu...
  • Catégories : La littérature, La presse

    Lire de juillet, dossier "correspondance des écrivains" 2

    Dans l'intimité de Violette Leduc

    par Christine Ferniot
    Lire, juillet 2007

     Adressées en particulier à Simone de Beauvoir et à Jacques Guérin, ses lettres sont pleines de fougue.

    C'est à la parution de son autobiographie, La bâtarde, en 1964 que Violette Leduc connaît un succès fulgurant qui la transforme en phénomène de foire. Une reconnaissance tardive pour cette femme qui écrit depuis vingt ans, appréciée de quelques amis et soutenue, entre autres, par deux fidèles: Simone de Beauvoir et Jacques Guérin. C'est à eux deux que s'adressent la plupart de ses lettres. «Violette Leduc était une épistolière infatigable, voire obsessionnelle», rappelle Carlo Jansiti dans sa préface, et cette correspondance est une oe; uvre en soi. On y retrouve sa fougue, sa liberté de ton, ses combats de femme libre d'aimer, son indépendance de point de vue dans le domaine privé comme dans les goûts littéraires. Des années durant, Violette déclare sa passion à Simone de Beauvoir qui lui oppose une totale indifférence sentimentale mais une fidélité amicale sans faille. «Je vous aime et vous m'inspirez un seul amour, la chasteté, le silence, la vie monacale, la discrétion, l'effort d'écrire», envoie-t-elle au Castor en 1949. Beauvoir est sa lectrice privilégiée, la conseillant, admirant son écriture tourbillonnante. Rien ne devrait rapprocher les deux femmes, mais Simone est sensible au talent et à l'intrépidité de Violette tandis que la jeune femme écoute passionnément celle qui lui «insuffle la force d'écrire».

    Violette aime la «voix rauque» de Simone, sa beauté, son élégance. Elle le lui répète sans cesse et le note également dans des récits comme La folie en tête. Le petit mot, le pneumatique sont pour l'écrivain un moyen d'exprimer ses émotions, ses impuissances. Même chose avec Jacques Guérin, son ami et admirateur. Violette tombe amoureuse de cet homosexuel, et sa passion à sens unique ne fait qu'aiguiser son désir, elle qui cherche toujours l'impossible, provoquant sans cesse pour mieux se sentir rejetée. Dans ses récits, son autobiographie comme dans sa correspondance, Violette Leduc plonge dans l'autofiction avant même que le mot ne soit inventé, gommant l'éventuelle différence entre l'écriture privée et le récit public, la réalité et la fiction. Quand ment-elle? C'est la question qu'elle se pose à chaque fois qu'elle écrit une lettre, une page, un roman, revenant immanquablement au sens de la création, de l'authenticité portée par cette écriture exaltée qui reste inoubliable.


    Correspondance 1945-1972
    Violette Leduc
    Gallimard
    500 pages.
    Prix : 27 € / 177,11 FF.

    Source:http://www.lire.fr/enquete.asp/idC=51471/idR=200

  • Catégories : Jeux, La littérature

    Un jeu littéraire de Dominique Noguez (3). Qui a dit?

    Vous connaissez la plupart de ces phrases, mais savez-vous qui les a écrites? L'écrivain Dominique Noguez vous raconte la véritable origine des plus beaux aphorismes

     

    1. «Les femmes ne se souviennent guère que des hommes qui les ont fait rire et les hommes que des femmes qui les ont fait pleurer»
    a. Henry Bernstein
    b. Henry de Montherlant
    c. Henri de Régnier


    2. «La célébrité, c'est le ridicule moins la honte»
    a. Cioran
    b. Roland Dubillard
    c. Vauvenargues


    3. «Le refus des louanges est un désir d'être loué deux fois»
    a. Chamfort
    b. Jacques Dutronc
    c. La Rochefoucauld


    4. «Entre le fort et le faible, le riche et le pauvre, entre le maître et le serviteur, c'est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit»
    a. Lacordaire
    b. Saint-Just
    c. Tocqueville


    5. «Les voyages, ça sert surtout à embêter les autres une fois qu'on en est revenu»
    a. Alphonse Daudet
    b. Jean Cocteau
    c. Sacha Guitry

    REPONSES
    1. C'est Henri de Régnier dans «Donc...», volume de pensées paru aux Editions du Sagittaire-Simon Kra en 1927 et réédité en 2007 avec «Escales en Méditerranée» chez Buchet-Chastel. Ce superbe chiasme est moins équilibré qu'il ne semble: d'un côté un poncif vaguement machiste, de l'autre une remarque amère peut-être autobiographique. Homme qui pleure, Régnier, en effet, aurait eu de quoi l'être avec Marie, la fille de José Maria de Heredia, qu'il épousa en 1895 et qui le trompa successivement avec Pierre Louÿs, Jean de Tinan, Jean-Louis Vaudoyer, Edmond Jaloux, Henry Bernstein, Gabriele D'Annunzio et même Emile Henriot.
    Il n'est pas sûr qu'au XXIe siècle les rires et les larmes soient répartis entre les sexes de façon aussi tranchée.

    2.
    Cet apophtegme, qui semble fait pour notre ère télémédiatique, est de Roland Dubillard et figure à la fin d'«Entretien», l'un de ses savoureux «Diablogues», sketches pour deux comédiens écrits à partir de 1947 et dont beaucoup seront interprétés par Claude Piéplu et lui-même au théâtre et à la radio avant d'être publiés en 1976 aux Editions L'Arbalète (aujourd'hui en Folio/ Gallimard).

    3.
    Jacques Dutronc se l'est attribuée sans vergogne dans un volume de «Pensées et répliques», mais c'est la maxime n° 149 de La Rochefoucauld. Elle est exemplaire du grand moraliste en ce qu'elle débusque la part de comédie et même de vice qui se tapit derrière les plus belles vertus. Comme toujours, c'est l'amour-propre qui mène la danse et qui, «dans le même temps qu'il se ruine en un endroit, (...) se rétabli! en un autre». A rapprocher de l'admirable maxime n° 138: «On aime mieux dire du mal de soi-même que de n'en point parler», et aussi de la critique par saint Thomas de l'ironie socratique, forme d'autodépréciation qui masque selon lui un grand orgueil.

    4.
    Jean-Baptiste Henri Lacordaire, en religion le père Henri-Dominique Lacordaire (1802-1861), prononça la phrase en 1848, dans sa 52e Conférence de Notre-Dame de Paris. Elle était suivie de cette autre: «Le droit est l'épée des grands, le devoir est le bouclier des petits.» D'un côté, donc, le droit et la liberté, entendus comme sources d'abus; de l'autre, le devoir et la loi, qui protègent de ces abus.

    Bonne façon, peut-être, de distinguer la gauche de la droite. Il y a le côté des forts, des riches, de ceux qui se sentent le vent en poupe pour entreprendre et conquérir, même s'ils doivent au passage faire beaucoup de casse: c'est la droite. Et il y a le côté des faibles, des pauvres, de ceux qui ne survivent que lorsque les protègent des lois qu'on ne viole pas impunément: c'est la gauche. Cette distinction, comme toutes les distinctions manichéennes, est évidemment sujette à nuances et exceptions.

    5.
    C'est Sacha Guitry dans une note écrite «en tournée» à Naples et recueillie dans «le Petit Carnet rouge» posthume publié en 1979 par Henri Jadoux (Librairie académique Perrin). Quelques lignes plus haut, Guitry rêve d'«un homme qui adorerait les oeuvres d'art, les paysages, toutes les belles choses, et qui n'en parlerait jamais à personne».



    Dominique Noguez

    Le Nouvel Observateur - 2229 - 26/07/2007

     

    Source:http://artsetspectacles.nouvelobs.com/p2229/a350689.html

  • "Journées romaines" à Arles

    1334ed75f0e20a25de251ca5ac80af8e.jpgArènes d'Arles - AFP/ANNE-CHRISTINE POUJOULAT

    Du 19 au 27 août, Arles accueillera un nouveau festival autour des jeux du cirque et de l'Antiquité romaine

    Combats de gladiateurs, courses de chars et autres jeux du cirque vont revivre à Arles, le temps d'un nouveau festival qui va se dérouler dans les sites antiques de la cité, classée au Patrimoine mondial de l'UNESCO.

    C'est l'association Péplum qui est à l'origine de ce festival intitulé "Arelate, journées romaines d'Arles".

    Ce festival est chaperonné par des historiens et archéologues "afin de coller au mieux à l'Histoire tout en restant ludique" souligne sa coordinatrice Emmanuelle Carrié.

    Pas de folklore donc mais une programmation variée pour un public familial : reconstitution de la vie des Romains dans l'amphithéâtre ou autour du Musée de l'Arles et la Provence antiques (Mapa), projection de péplums dont "Gladiator" de Ridley Scott au théâtre antique et de documentaires à la médiathèque, exposition de BD à l'église Saint-Blaise, conférences, visites de monuments...

    Les visiteurs pourront également s'initier à l'artisanat antique (poterie, tissage, fabrication de vaisselle...) ou ripailler dans une Taberna Romana qui servira une cuisine traditionnelle romaine : plats sucrés-salés, vin rouge, coktails à base de gingembre etc.

    Organisatrice de l'évènement : l'association Péplum, à l'origine depuis deux ans déjà, en collaboration avec le Mapa, de deux journées avec défilé romain, combats de gladiateurs et visites thématiques qui attiraient près de 6.000 visiteurs.

    Cette année la ville d'Arles s'est associée au projet pour créer un évènement d'une plus grande ampleur, destiné à durer et à devenir "incontournable dans la région" affirme Emmanuelle Carrié.

    Entre les "Rencontres de la photographie" (du 3 juillet au 16 septembre), les festival de musiques du monde "Les Suds à Arles" (9 au 15 juillet), "il n'y aura plus de temps mort au cours de l'été à Arles" souligne la chargée des relations avec la presse de la mairie d'Arles, mélanie Christianini.

    Pour plus d'informations : www.arles-antique.cg13.fr

    Publié le 25/07 à 16:04

     

    Source:http://cultureetloisirs.france2.fr/culture/32957979-fr.php

  • Catégories : Mes textes en prose

    Baudelaire et les femmes 6. Les yeux de Marie Daubrun

    efbb39fbc4ac5d77f269ac9e59750907.jpg Dans mon mémoire de maîtrise,  

    « Le paysage dans les œuvres poétiques de Baudelaire et Nerval »  

     (en vente sur Lulu : http://stores.lulu.com/store.php?fAcctID=617288)   Dans la 1 ère partie consacrée à la poétique du paysage,  

    La symbolisation du paysage  

    2.2. La sexualisation du paysage dans « Les Fleurs du Mal »      

    2.2.4. Les yeux

     

      Marie Daubrun jouait La Belle aux cheveux d'or au théâtre de la Porte-Saint-Martin en 1848. La fée, apparue "au fond d'un théâtre banal", inspira le poème L'Irréparable (précédemment publié sous le titre A la Belle aux cheveux d'or dans la Revue des Deux Mondes). Baudelaire s'aventure dans les bras de sa muse, pour une liaison brève et orageuse, mais à l'issue féconde pour l’œuvre du poète (Les Chats, Le Poison, Ciel Brouillé, L’Invitation au Voyage). Par deux fois l'amitié de Baudelaire et de Banville, qui avait été son amant, sera en péril à cause de la jeune actrice.

    (http://baudelaire.litteratura.com/?rub=vie&srub=per&id=17)  

    Dans le Ciel brouillé  - comme dans La chevelure  les analogies se succèdent selon le système de l'infini diminutif jusqu'à: « Comme tu resplendis, paysage mouillé/ Qu'enflamment les rayons tombant d'un ciel brouillé! »( v. 11-12). Or ces deux vers confèrent au poème une plus grande indétermination encore, puisque ce « paysage mouillé », à l'image du regard de la femme » (certainement Marie Daubrun) «  d'une vapeur couvert » (v. 1), ne peut être mentalement immobilisé par le lecteur. ( Emmanuel Adatte, « Essai sur le dépassement du réel », p.  132.) »  Il s'agit  d'un « dépassement du réel » qui atténue l'angoisse des derniers vers fondés sur une analogie, entre la femme aimée et cruelle et l'hiver « implacable » :

     

     


    O femme dangereuse, ô séduisants climats!                                                                       

     

    Adorai-je aussi ta neige et vos frimas,                                                                         

     

    Et saurai-je tirer de l'implacable hiver                                                                           

     

    Des plaisirs plus aigus que la glace et le fer? (v. 13-16)                                    

     

      De même dans L'invitation au voyage, le regard féminin et le paysage évoqué par celui-ci sont marqués par l'indétermination :  

    Les soleils mouillés                                                                                               

     

    De ces ciels brouillés                                                                                       

     

     Pour mon esprit ont les charmes                                                                                  

     

    Si mystérieux                                                                                                   

     

    De tes traîtres yeux                                                                                              

     

    Brillant à travers leurs larmes.  ( V.  7-12). 

     

     

     

  • Catégories : Les livres d'amis blogueurs

    "Saisons", le recueil d'Elisabeth Leroy

    45c8391d4956640c02c3d87718676133.jpg

    Ce recueil de 90 poèmes est paru au prix de 10,11 euros (frais de port inclus).

    Dès maintenant, vous pouvez envoyer votre commande et votre adresse d'expédition à:


    lencrebleue@laposte.net


    Vous pouvez aussi aller voir le blog des passions d'Elisabeth:http://boulevarddesresistants.hautetfort.com/

    et son blog de poésies:http://depoesiesenpoesies.hautetfort.com/

  • Catégories : Jeux, La littérature

    Un jeu littéraire de Dominique Noguez (2). Qui a dit?

    Vous connaissez la plupart de ces phrases, mais savez-vous qui les a écrites ? L’écrivain Dominique Noguez vous raconte la véritable origine des plus beaux aphorismes

     

    1. «Cordonnier, pas plus haut que la chaussure!»
    a. Appelle de Cos
    b. Boileau
    c. Brumell


    2. «Quand la borne est franchie, il n'est plus de limites»
    a. Aristote
    b. Christophe
    c. Georges Pompidou


    3. «Chassez la naturel, il revient au galop»
    a. Boileau
    b. Destouches
    c. Horace


    4. «La tolérance? Il y a des maisons pour ça»
    a. Paul Claudel
    b. Paul Léautaud
    c. Jules Renard


    5. «La politique est chapitre de la météorologie. La météorologie est la science des courants d'air»
    a. Alphonse Allais
    b. Edouard Herriot
    c. Friedrich Nietzsche


    REPONSES
    1. Apostrophe du peintre grec Apelle de Cos à un cordonnier qui, après avoir donné son avis sur la manière dont il avait peint une sandale, se mêlait de vouloir juger une autre partie du tableau. (Rapporté par Pline l'Ancien, «Histoire naturelle», L. XXXV, § xxxvi, 85.) En latin: «Sutor, ne supra crepidam!»

    2.
    La phrase a effectivement été prononcée par Georges Pompidou lors d'une conférence de presse, mais elle n'est pas de lui. On la trouve dans le commentaire d'une vignette de «la Famille Fenouillard», bande dessinée de Christophe (pseudonyme de Georges Colomb, par allusion au découvreur de l'Amérique) publiée en 1893 chez Armand Colin après parution en feuilleton à partir de 1889. La vignette, située page 178 dans l'édition Armand Colin de 1947, représente les deux filles Fenouillard, Artémise et Cunégonde, en train de se crêper le chignon sur une banquise. La phrase, entre guillemets, est introduite comme suit: «Or, comme l'a dit judicieusement un auteur célèbre: «Quand la borne est franchie, il n'est plus de limites!»...» Il est très probable que l'auteur célèbre est Christophe lui-même. Cela dit, la proposition pourrait être d'Aristote ou de tout autre bon philosophe. Car elle n'est qu'en apparence une tautologie. Elle signifie que, lorsqu'on entre dans un territoire inconnu, on n'y a plus de repères. Ou que, si l'on transgresse une fois la norme, on ne se laissera plus arrêter par rien. C'est la définition de la démesure (hubris, en grec).

    3.
    C'est l'adaptation française par le diplomate, comédien et auteur dramatique Philippe Néricault, seigneur de La Mothe, plus connu sous le nom de Destouches (1680-1754), (1680-1754), d'un vers des «Epîtres» d'Horace (I, 10,24): «Naturam expelles furca, tamen usque recurret» ( «Tu peux chasser la nature (c'est-à-dire, ici, la végétation) à coups de fourche, elle n'en reviendra pas moins à toute allure »). Le vers de Destouches se trouve dans sa pièce «le Glorieux» (1732), acte III, scène 5. Lisette, dame de compagnie, s'adresse au Comte en lui reprochant son arrogance: «Je ne vous dirai pas: «Changez de caractère», /Car on n'en change point, je ne le sais que trop./Chassez le naturel, il revient au galop...»

    4.
    Prononcée par Paul Claudel, la phrase a été notée par Jules Renard dans son «Journal» le 13 février 1900. Au cours du déjeuner, Claudel parle du mal que l'affaire Dreyfus «nous fait à l'étranger». «Mais la tolérance? objecte Renard. - Il y a des maisons pour ça», gronde Claudel. Observant aussi que sa soeur Camille lit le journal antisémite «la Libre Parole», Renard écrit: «Ils éprouvent je ne sais quelle joie malsaine à s'abêtir (...). Ils ne connaissent pas le sourire de la bonté.» Sur Paul, il ajoute: «Cet homme intelligent, ce poète, sent le prêtre rageur et de sang âcre. (...) Son âme a mauvais estomac.»

    5.
    Cette double définition se trouve dans «Notes et maximes», recueil posthume d'inédits d'Edouard Herriot paru chez Hachette en 1961 et qu'on peut consulter à la BNF sous forme de microfiche (cote 16-Z-9567 L 1.40-MFC). On y trouve également le célèbre «la culture (...), c'est ce qui demeure dans l'homme, lorsqu'il a tout oublié».



    Dominique Noguez

    Le Nouvel Observateur - 2228 - 19/07/2007


    Source:http://artsetspectacles.nouvelobs.com/p2228/a350323.html
  • Catégories : La littérature, Voyage

    Les écrivains voyageurs 3. Joseph Kessel, le moujik de la NRF

    Né en Argentine, il grandit dans l'Oural avant de rejoindre Paris. Il devient. écrivain à la Nouvelle Revue française, parcourt le monde pour «France Soir» et bâtit sa légende à force de livres éblouissants et de verres broyés entre les dents

     

    C'est un Kessel étonnamment sobre, indifférent aux oeillades des jolies inconnues sur le pont de l'«Astu-rias», qui vogue vers Buenos Aires ce 12 août 1937. Jean Mermoz est mort huit mois plus tôt. La jeune gloire de l'Aéropostale, disparu au large de Dakar aux manettes de la «Croix-du-Sud», était son ami, son frère. Joseph Kessel, polygame sentimental, le coeur ouvert à toutes les aventures, place au plus haut la camaraderie virile et l'amitié. En guise d'adieu au disparu, il va écrire un livre. Tout au long de la traversée, on le voit sous la Voie lactée, crinière au vent, se recueillir sur cet océan que l'ami, le frère, tant de fois, a survolé.

    Comme à son habitude, Joseph Kessel a vu les choses en grand. Son enquête sur Mermoz et «sa cohorte ailée» fera l'objet d'une série d'articles dans «France-Soir». La biographie sera publiée par Gallimard. Au Kessel de la fin des années 1930, au romancier de «la Steppe rouge» et de «Belle de jour», au grand reporter, auteur d'articles retentissants sur le trafic d'esclaves en mer Rouge, au prince noctambule des cabarets russes parisiens déterminé à «faire de civique jour un dimanche» et qui, au petit matin, signe en titubant des chèques en blanc pour payer la vodka et tous les verres fracassés, à cet homme-là, on ne refuse rien. Il est déjà, à l'aube de ses 40 ans, l'Homo kesselianus qu'André Chamson accueillera en ces termes en 1962 à l'Académie française. En attendant, le voici qui aborde après trois semaines de traversée la terre de Mermoz - en ce temps-là, seul le courrier franchit par avion les océans. Des journalistes l'attendent à hôtel, pressés de célébrer comme il se doit le retour au pays du «juif argentin». Car Kessel a vu le jour non loin d'ici, dans la pampa. Le 10 février 1898, à Clara, dans une colonie agricole de Mosesville, peuplée d'émigrés des ghettos de Russie, naissait Joseph-Elie. Sur les bords du Tigre, là où les eaux du Panama rejoignent celles de l'Uruguay, là où Mermoz se baignait à la saison chaude, «Jef» Kessel sait que sa famille avait embarqué un jour pour la Russie et qu'il avait failli mourir de dysenterie au cours de ce périple de 18 000 kilomètres. Au beau milieu de l'Atlantique, ni son père médecin ni l'infirmier de bord ne savaient que faire pour sauver la vie de la petite chose famélique qui dépérissait dans les bras de Raïssa, sa mère, paniquée, épuisée au sixième mois de sa deuxième grossesse. Le capitaine avait prévu de jeter le peut corps par-dessus bord.

    Quarante ans plus tard, Joseph Kessel n'oublie pas qu'il doit la vie à une jeune émigrante italienne qui proposa de nourrir au sein, en même temps que son propre enfant, un bébé squelettique qu'elle ne reverrait pas. Les Kessel s'installeront donc avec leur Yossienka (petit Joseph adoré) à Orenbourg, dans l'Oural. Les premières années du garçon seront bercées par le tintinnabulement des caravanes afghanes venues se ravitailler à la maison Lesk, épicerie pour nomades impeccablement tenue par Anton, le grand-père maternel. Puis ils émigrent en France. Cette enfance errante fera de lui un vagabond intraitable.

    Mais pour l'heure, l'écrivain a rejoint Marcel Reine, autre figure de l'Aéropostale, pour refaire après Mermoz la traversée de la meurtrière cordillère des Andes, «cette chevauchée de neige et déglace, cette fureur pétrifiée dans un éternel assaut». Sur un authentique vieux zinc des débuts de la ligne, un Latécoère-28, les deux pèlerins volent jusqu'en Patagonie, bravant les vents des Andes et provoquant le destin - un atterrissage forcé est souvent fatal. Quelques archanges intrépides morts pour l'Aéropostale passent dans son beau roman sur Mermoz.

    Des bateaux, Kessel en a pris bien d'autres avant l'«Asturias». «A moi venaient les mers de Chine, l'océan Indien, la mer Rouge et toutes leurs escales», écrira-t-il. Embarquer le 10 novembre 1918, à 20 ans, à bord du «Président-Grant» à destination de New York, fut sa première échappée vers un glorieux destin. Ce jour-là, la France fête une victoire à laquelle l'adolescent, qui sera toute sa vie «pressé d'avoir peur», a participé de justesse: son jeune âge ne l'a pas autorisé à s'engager dans l'aviation avant 1917. Dans l'escadrille S.29 qui lui inspirera «l'Equipage», premier roman à la gloire des mess enfumés et de la fraternité d'armes, il s'est découvert une fascination pour la guerre et un «attrait morbide pour la violence élémentaire des instincts». Afin de goûter davantage encore cette drogue dure, il rejoint les volontaires du «Président-Grant» pour une improbable mission de «soutien» aux forces blanches de Sibérie mobilisées contre l'Armée rouge naissante. C'est Corto Maltese à Vladivostok. Dans une invraisemblable pagaille qui comble son désir de chaos, des soldats des quatre coins du monde se demandent ce qu'ils font là, chaque nation ayant envoyé ses représentants dans l'affolement collectif. A l'Aquarium, on trinque à la russe au bras des entraîneuses, et les verres de vodka vides explosent sur le sol. Kessel fera sienne la bizarrerie locale.

    Cette guerre finie, il va en trouver d'autres. Justement, l'Irlande gronde. L'insurrection contre la Couronne d'Angleterre devient sanglante et c'est bientôt pour «la Liberté», un des grands journaux français, qu'il met le cap sur Londres. Arrêté par les Anglais pour activité terroriste, le maire de Cork, embastillé à Brixton, refuse d'être jugé par ces «étrangers». Fasciné par «la foi la plus ardente» des sinn-feiners, Joseph Kessel raconte à ses lecteurs qui sont vraiment les hommes invisibles de l'IRA. La France aimait l'écrivain, elle se passionne pour le journaliste. Dix articles, et sa réputation de grand reporter est faite. Il a 22 ans.

    Un autre bateau, pour la Russie soviétique cette fois. Joseph Kessel en rapporte une série d'articles sur la face cachée du bolchevisme et la «boue sanglante» de sa police secrète, la Tcheka, qui recrute parmi les illettrés et les repris de justice. Pour «la Revue de France i>, férocement anticommuniste, il signe un article mémorable intitulé «Silhouette de la Tcheka», fusillant Trotski d'une formule: «bourreau hors cadre». «Le Caveau n° 7», une nouvelle publiée au Mercure de France, achève de discréditer un régime qui transforme en monstres des hommes qui rêvaient d'égalité. Gaston Gallimard, directeur de la maison d'édition la Nouvelle Revue française, le remarque et lui demande un roman. «La Steppe rouge» sera publié en novembre 1922, sept nouvelles glaçantes sur la banalité du mal. Si Paul Valéry admire son talent pour traduire «l'épouvante et l'angoisse tontes mies et toute la force d'une vérité actuelle et incroyable», Paulhan et Rivière regardent de haut ce moujik échevelé qui considère que le sang et la misère sont le lot de la plupart des hommes. Qu'importe, Kessel est chez lui à la NRF.

    Kessel est désormais partout où l'Histoire bascule. Et quand il n'y est pas, c'est elle qui vient à lui. Elle se présente en 1926 sous les traits d'un certain Haïm Weizmann, qui, à la mort de Theodor Herzl, a repris le flambeau du sionisme mondial. Celui qui sera un jour le premier président de l'Etat d'lsraël veut entraîner à Jaffa le grand Kessel, qui n'est pas très motivé. Le sionisme? Chimère attendrissante. Rêve sans lendemain de rescapés des pogroms russes. Le plus sage, pense-t-il, est que les juifs s'intègrent dans leurs pays d'accueil. Mais la passerelle du «Champollion» à peine franchie, Kessel, d'abord meurtri par le spectacle de ces pionniers en haillons, est ému par le chant d'un rabbin. Puis la joie intranquille du sionisme le gagne quand il découvre Tel-Aviv la fragile, où des préfabriqués s'alignent et buttent au pied des dunes de sable - à vaincre elles aussi. La vallée de Jezréel, ancien marécage infecté de malaria transformé en jardin fécond, achève de conquérir un homme conscient que «le plus petit brin d'herbe vous met l'âme à l'envers».

    Israël ne se fera plus sans Kessel. Jef a trouvé sa «Terre d'amour» et lui restera fidèle quand elle sera terre de feu. Pour «France- Soir» il reviendra, le 14 mai 1948. A la douane de Haïfa, un jeune garçon apposera en caractères hébraïques sur son passeport avec un tendre sourire le visa n° 1 d'un Etat qui n'a même pas un jour, événement dont il fera le récit pour le quotidien parisien dans un article de une éblouissant entré depuis dans les annales de la presse. Sa signature sera si fortement liée à «France-Soir» et à son directeur, le légendaire Pierre Lazareff, que ce dernier demandera qu'on aille débusquer «le vieux lion» dans sa retraite d'Avernes pour écrire sa nécrologie, le jour venu.

    Jef Kessel, qui disposait à «France-Soir» d'un crédit illimité pour parcourir le monde, était capable de faire grimper sur son seul nom les ventes d'un numéro de 100 000 exemplaires. Mais malgré cette ahurissante popularité, il faisait volontiers une brève non signée sur un incendie de poubelle au coin de la rue. Lui qui couvrira la Seconde Guerre mondiale et écrira avec son neveu Maurice Druon «le Chant des partisans»; lui qui à Londres promettra à de Gaulle un grand livre sur «l'Armée des ombres» ne sombra pas dans l'arrogance - sans doute s'adressait-il trop de reproches pour être vaniteux.

    Car l'auteur du «Lion», livre vingt fois réédité en cinquante ans, perçu comme un demi-dieu, était miné par de puissants remords. Jamais il se s'est pardonné de n'avoir pas senti le désarroi de son jeune frère, Lazare, mort suicidé l'année de ses 20 ans, ni d'avoir trouvé sa mère mourante, boulevard Brune, l'hiver 1956, alors qu'il rentrait d'un interminable périple afghan. Rassemblant ses dernières forces, Raïssa Kessel s'était accrochée à la vie dans l'unique espoir d'embrasser une dernière fois l'éternel absent. Ce souvenir-là aussi brouillerait plus d'une fois ses yeux gris. Mais son tourment le plus lancinant fut d'avoir négligé Sandi, son premier grand amour, son coup de foudre en mer de Chine, sur un bateau, encore, que les amis du couple appelaient parfois «la sainte», tant elle pardonnait tout à son chien fou de mari, ses absences et ses nuits dans d'autres alcôves. De son vrai nom Nadia-Alexandra Polizu-Michsunesti, Sandi la Roumaine fut toute sa courte vie subjuguée par son Jef et accepta les sacrifices qu'exigeait l'amour pour un homme qui s'était juré de ne jamais rien se refuser.

    Kessel aima passionnément sa «Sandinette» jusqu'à embrasser chaque soir un petit portrait d'elle soigneusement glissé dans ses bagages aux heures du départ. Mais au cours des longs mois où Sandi s'éteindra lentement au sanatorium de Davos, son héros préférera souvent aux visites à la malade les nuits tsiganes du Caveau caucasien ou l'oubli de soi dans une guerre lointaine. Les regrets seront terribles. Trente ans plus tard, il verra dans la déchéance alcoolisée de son autre amour, sa femme, la tumultueuse Michèle, la punition de tous ces manquements. Et nul ne sait s'il fit le lien entre le désespoir inguérissable de la belle Irlandaise et le refus de son mari de; lui donner ce qu'elle désirait de toute son âme: un enfant.

    Superstitieux - pas un voyage sans prononcer le salvateur «Dobri tchass zbogom»«Que l'heure soit favorable et que Dieu nous protège.» , persuadé que tout bonheur se paie d'un chagrin et chaque rire d'une larme, il puisera dans tous ses remords d'admirables pages du «Tour du malheur», le plus tolstoïen de ses livres. Son ami Yves Courrière parlera du «vide affreux de son mie qu'il devait remplir à tout prix». Pour s'étourdir à ce point, il lui fallait bien trois patries.

    Attaché à la France qui l'avait sauvé, puis à Israël qu'il fallait aider à vivre, Kessel sera ensorcelé par l'Afghanistan, découvert sur le tard. Avec une énergie intacte, à peine altérée par soixante ans de cavale et d'embardées alcoolisées, il s'enfonce jusqu'aux confins russo-afghans pour en humer les parfums, si proches de l'Oural de son enfance. C'est par l'image que cet écrivain décide de faire aimer cette terre encore inconnue. Cette fois encore, il voit grand et rêve d'un film. Il a déjà le titre: «la Passe du diable». Derrière la caméra, le jeune chef opérateur débutant s'appelle Pierre Schoendoerffer. Un jeu cruel, le bouzkachi, où les meilleurs cavaliers du pays se disputent avec sauvagerie la dépouille d'un bouc remplie d'eau et de sable, sert de prétexte à montrer du pays. A la tombée de la nuit, l'équipe de jeunes cinéastes découvre avec stupéfaction l'attaché-case usé de Kessel: un bar miniature dont l'académicien fait un usage immodéré, devant les «frères» afghans scandalisés. Car Kessel fut toute sa vie un bad boy incontrôlable, qui broyait ses verres de vodka avec les dents dans toutes les tavernes du monde comme dans les très sélectes réceptions chez Gallimard, devant la femme de Gaston tétanisée par ce Capitaine Fracasse - c'est ainsi qu'on l'appelait du côté de Montmartre - en train de croquer le cristal familial avec aplomb.

    «La Passe du diable» fut occulté par la guerre d'Algérie. En revanche, «les Cavaliers» fut salué comme un chef d'oeuvre, ce qui lui vaudra lors d'un retour à Kaboul une standing ovation des moudjahidin reconnaissants. L'écrivain glissa son testament d'homme et de voyageur dans cette bible ethnologique, qui continue d'influencer les grands reporters de la presse écrite à l'heure du bouquet satellite et des tour-opérateurs. Mais cette passion afghane, qui remplirait à elle seule la vie d'un honnête homme, fut presque un détail dans l'existence de ce géant hyperactif. Il faudra d'ailleurs à son amiYves Courrière, qui fit pour Kessel ce que Kessel avait fait pour Mermoz, pas moins de mille pages intenses pour faire le tour de l'Homo kesselianus.

    «Le Tour du malheur», tomes 1 et 2 Folio
    «Mermoz», Folio.«Les Coeurs purs», Folio
    «Nuits de prince», Folio«Le Lion», Folio
    «La Passante du Sans-Souci», Folio.
    «Le Petit Ane blanc», Folio
    «Les Cavaliers», Folio.
    «Terre d'amour et de feu», 10/18.
    «Joseph Kessel ou Sur la piste du lion», par Yves Courrière, Plon.
    «Kessel. Le nomade éternel», par Olivier Weber, Arthaud.

    Né en 1898 à Clara, dans la pampa argentine, Joseph Kessel fut grand reporter pour "France-Soir". Il est l'auteur d'une soixantaine de romans, de nouvelles et de récits. En 1962, il est élu à l'Académie française au siège du Duc de la Force. Il meurt en juillet 1979 devant le journal télévisé, après avoir allumé sa dernière cigarette.



    Anne Crignon

    Le Nouvel Observateur - 2229 - 26/07/2007


    Source:http://livres.nouvelobs.com/p2229/a350688.html

  • Frida Kahlo de A à Z, expo-évènement à Mexico pour son 100e anniversaire

    15 juin 12:14 - MEXICO (AFP) - Frida Kahlo aurait eu 100 ans cette année: au lieu de cent bougies, le palais des beaux arts de Mexico lui rend hommage avec une exposition extraordinairement complète qui rassemble toutes ses oeuvres majeures et des peintures habituellement éparpillées aux quatre coins du monde.

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    Auto-portrait de Frida Kahlo exposé au musée del Barrio en décembre 2004

    AFP/Archives -

     

     

     

     

     

     

     

    Les deux Fridas", "La colonne brisée" plongent instantanément le visiteur dans l'univers dramatique de Frida Kahlo et la souffrance qui a été la sienne du fait de son handicap après un accident de tramway et 33 opérations chirurgicales.

    Les 354 oeuvres, dessins, gravures, lettres de Frida et des photos de l'artiste, de ses proches sont distribuées dans huit salles du vieil édifice art-déco. C'est la première fois qu'on parvient à rassembler le patrimoine des musées mexicains et étrangers et celui des collectionneurs privés.

    Le parquet grince sous les pas des milliers de fanatiques ou d'écoliers en uniforme. D'habitude bruyants, les Mexicains observent un silence admiratif quand il s'agit de Frida Kahlo, fierté d'un pays.

    "Ce sont les gens qui l'ont rendue célèbre, comme (Pablo) Picasso. Elle appartient au peuple. C'est une icône universelle", commente Juan Coronel, un des organisateurs de l'exposition.

    L'exposition visible jusqu'au 19 août, retrace les grandes étapes de sa vie, ce qu'elle qualifie comme ses deux accidents --celui du tramway et sa rencontre avec le peintre muraliste Diego Rivera qui lui sera infidèle--, ses séjours aux Etats-Unis et son engagement politique du côté des communistes.

    Une série de dessins "Frida et la fausse-couche" la représentent nue, en larmes, un foetus à côté d'elle, et rappellent ses fausse-couche et son chagrin de ne pas pouvoir avoir d'enfant en raison des séquelles de son accident.

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    Léon Trotsky (g), accompagné de sa femme Natalia Sedova, est accueilli par Frida Kahlo (3e g) et Diego Rivera lors de son arrivée à Mexico, le 24 janvier 1937

    AFP/Archives -

     

     

     

     

     

     

    Dans un texte écrit en hommage au peintre, l'écrivain mexicain Carlos Fuentes voit en elle une "Cléopâtre brisée", "Frida est cassée, déchirée à l'intérieur de son corps", ajoute-t-il en soulignant qu'elle était pourtant gaie et enjouée.

    Après les autoportraits, une salle est dédiée aux natures mortes, avec une touche de surréalisme, une autre aux photographies, de nombreux clichés sont de son père, Guillermo Kahlo, immigré allemand.

    On la voit aussi avec Léon Trotski, qui fut son amant.

    Une cinquantaine de lettres écrites à la main ou à la machine à écrire sont suspendues au plafond par des fils. La plupart sont adressées à son médecin et confident Léo Eloesser et commencent par "mon très cher petit docteur" ou "joli petit docteur de mon coeur".

    André Breton, qu'elle a accueilli à Mexico, disait d'elle qu'elle était "une bombe avec un ruban autour".

    Riche en oeuvres, dont certaines sont présentées pour la première fois, mais du fait d'un montage classique, l'exposition n'a pas le cachet de celle de 2004, pour le cinquantenaire de la mort de Frida.

    Lors de l'inauguration de l'exposition mercredi, la politique s'est invitée à la fête. Le président Felipe Calderon a été conspué par des manifestants de gauche qui lui lançaient "Frida était communiste", "si elle était vivante, elle serait avec nous".

    Tout au long de l'année 2007, un hommage national est rendue au Mexique à Frida Kahlo (1907-1954), à l'occasion du centenaire de sa naissance, et à son époux Diego Rivera (1886-1957) pour le 50e anniversaire de sa mort.

    Le 5 juillet, le Musée Frida Kahlo a présenté quelques uns des "Trésors de la Maison bleue", 22.000 documents inédits (photos, dessins) découverts il y a trois ans, dans la maison de la famille des Kahlo-Rivera.

    © 2007 AFP
    AFP
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  • Catégories : Jeux, Web

    Jeu transmis par Elisabeth et que je transmets à mon tour à tous ceux qui passeront par ici et voudront bien le faire.

    Je vous révèle mes secrets les plus enfouis ou inavouables comme me l'a demandé Elisabeth:

    1. Quand j'étais petite, j''étais tellement timide que je me cachais sous la table au restaurant.

    2. On me prenait souvent pour un garçon car j'avais les cheveux courts, j'étais grande et j'étais souvent en pantalon


    3. Ma grande taille me valait d'ailleurs des quolibets

    4. On me reprochait aussi d'être trop sage, trop bonne élève...

    5.Je tombais souvent

    6. Je suis tombée amoureux d'un garçon qui me ramassait

    7.Le seul endroit où je me sentais à ma place, c'était dans les livres...

  • Catégories : Des évènements, La poésie, Musique

    Poésie-Image-Son-21 et 22 juillet 2007

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    70 OEUVRES SERONT EXPOSEES
    10 ARTISTES VOUS RECOIVENT
    ENTREE LIBRE ET GRATUITE - Salle IGESA - Peïra Cava

    Olga PARRA - Karine FRIBOULET - Léon David AMSALHEM - Eric DAVEUX
    Philippe TREARD - Didier CLERO - Lydia GUIGO - Nelly JOHNSON
    Armel AUBERT Amha - Aline VESCO-CHIARAMONTI
    PoesImageSon un événement de l’Art pour Art, proposé par NJART®, où chaque exposant, poète et plasticien présente chaque œuvre P. I. S. 2007 dans une prestation en duo improvisé tout au long de ce week end. Le public est invité à participer à l’événement, à rencontrer les artistes.

    PROGRAMME

    SAMEDI 21 JUILLET 2007


    11 H - 14 H CRÉATION DE LA FUSION
    La fusion se fera par choix à plusieurs tours, les exposants, poètes et plasticiens sélectionneront sur un bulletin les œuvres choisies pour illustration réciproque. Après dépouillement des 70 bulletins du premier tour, les œuvres P.I.S. PoesImageSon crées au premier tour seront les œuvres ayant reçu le même choix réciproque Poète et Plasticien. Si après le 3 ème tour plusieurs poèmes sont sélectionnés pour illustrer une même œuvre plastique, ou plusieurs œuvres plastiques sont sélectionnées pour illustrer un même poème, sans trouver de réciprocité, NJART® se réserve le droit d’arbitrer. Simultanément, les photos et poèmes affichés sont retirés lorsqu’ils deviennent œuvre P.I.S. PoesImageSon

    14 H - 15 H BAPTÊME DE LA FUSION
    Les œuvres P.I.S. PoesImageSon reçoivent un titre proposé par les auteurs de la fusion. Le nom de l’œuvre obtenue peut être le titre du poème accolé au titre de l’œuvre picturale, mais également un titre spécifique issu de la fusion des coauteurs. La matérialisation de la fusion se fera par une exposition jumelée.

    15 H - 18 H TEMPS DE LECTURES
    Lecture de l’œuvre P.I.S. PoesImageSon - improvisation du duo poète-plasticien pour donner au public l’interprétation de l’oeuvre, le sens de la créativité, de la fusion




    DIMANCHE 22 JUILLET 2007


    11 H - 13 H MICRO LIBRE
    Chaque poète et chaque plasticien parle de lui : son parcours, son oeuvre, ses projets, la motivation de son choix dans le cadre de l’œuvre P.I.S. PoesImageSon

    13 H - 15 H A LA DECOUVERTE DE...
    Chaque exposant poète et plasticien rencontre son public, dialogue, échange, dédicace les livres exposés, présente les press book, revues de presse entre autres.

    15 H - 17 H TEMPS DE LECTURE
    Lecture de l’œuvre P.I.S. PoesImageSon - improvisation du duo poète-plasticien pour donner au public l’interprétation de l’oeuvre, le sens de la créativité, de la fusion

    17 H EVENEMENT SURPRISE.....




    L'ART n'étant qu'un et indivisible par nature, l'objectif de PoesImageSon, est la fusion d'une œuvre poétique et d'une œuvre plastique pour aboutir à une seule et même création de l'inspiration humaine au delà des règles académiques venant freiner la créativité, tout en préservant toujours la recherche du beau et de l'idéal spirituel.

    POETES
    SCULPTEURS
    ARTISTES PEINTRES
    http://poesimageson.free.fr/Pour tout complément d'information une adresse e-mail :
    njart@free.fr

    Artistiquement Vôtre.

    Nelly Johnson

    NJART®
    http://www.njart.fr

  • Catégories : Des lieux, La littérature

    C'est le premier parc à thème littéraire

    Entrez dans le monde de Dickens !

     

    L'écrivain y a vécu : c'est donc à Chatham que vient de s'ouvrir un grand parc consacré à l'auteur d' « Oliver Twist ». Tout y est du Londres misérable du XIX e siècle, catins et pickpockets compris. Visite guidée

     

    Il pleut sur Chatham, ville peu riante du Kent à quarante minutes de train de Londres, où l'écrivain anglais le plus connu après Shakespeare a passé les premières et les dernières années de sa vie. La navette pour les docks n'est pas bien signalée. Mais enfin voici Dickens World, annoncé en lettres blanches sur fond bleu étoilé, un parc d'attractions consacré à l'univers de l'auteur d' « Oliver Twist ».

    On vous promet une plongée dans le ventre fangeux de l'Angleterre du début du XIX e, ses égouts, ses odeurs et ses rats. Dans le train, pendant que défilait un paysage de cataclysme postindustriel fait d'usines désaffectées, on s'était pris à rêver d'un Zola World, avec descente aux enfers sponsorisée par Gervais ( e ) ou d'un Hugo Land avec sa parade de misérables et son train fantôme où les Thénardier feraient peur aux enfants. « A partir de ce point, plus que trois heures d'attente » : la première semaine, victime de son succès, Dickens World, inauguré en mai dernier, a refusé du monde et à la Pentecôte, particulièrement humide, 15 000 personnes y ont trouvé refuge.

    A priori, rien de franchement de mauvais goût ne nous attend : Dickens World a reçu l'approbation de la vénérable Dickens Fellowship ( fondée en 1902, 6 000 membres dans le monde ). Thelma Grove, ancienne secrétaire générale, a suivi le projet comme consultante. « Des descendants de Dickens m'ont appelée un jour, effrayés par ce qui se tramait ; j'ai participé aux réunions et j'ai été agréablement surprise » , raconte cette orthophoniste à la retraite. L'idée de ressusciter le Londres miséreux de l'ère victorienne est née dans les années 1970 dans la tête de Gerry O'Sullivan Beare, un concepteur de parcs à thèmes qui s'est battu pendant trente ans pour lever des fonds. Il est mort l'année dernière, avant l'inauguration. En 2005, grâce à Kevin Christie, un homme d'affaires spécialisé dans le cinéma, ont été enfin réunis les 500 financiers privés et les quelque 91 millions d'euros nécessaires à la création de ce complexe de loisirs de 12 000 m 2, qui englobe un parking, des restaurants et un multiplexe.

    Dans la pénombre, on distingue d'abord des maisons décrépies et, sous les réverbères, une place de quartier sordide, avec son usurier et son épicerie. On guette les rongeurs, mais de mauvaises odeurs, point. Une affiche jaunie détaille la ration quotidienne des cachots de Marshalsea, la prison londonienne où John Dickens, le père de Charles, qui travaillait au bureau de la paie sur les docks, fut emprisonné pour dettes. A 12 ans, Charles Dickens trimait déjà à la Warren's Blacking Factory, dont la façade glauque est reconstituée à l'entrée. Des journées à coller des étiquettes sur des pots de cirage pour 6 shillings par semaine : l'expérience changera définitivement sa vision du monde.

    Faquins, prostituées, chasseurs de rats, tous les personnages dickensiens sont là. A peine a-t-on posé le pied dans ces ruelles sombres qu'un certain Bill, pickpocket en haillons, vous subtilise votre carnet de notes. C'est l'un des 60 employés qui paradent en costume pour 6 livres de l'heure. Mike, le maître de la sévère pension Dotheboys, coiffe d'un bonnet d'âne les élèves-visiteurs qui ne gagnent pas assez de « Dickens points » au quiz. Derrière leurs pupitres en bois à écrans tactiles, les cancres rigolent... Tony, un autre employé portant beau avec son haut de forme, un amoureux de Dickens, a trouvé là un moyen agréable d'arrondir sa retraite. « Mettez-vous bien à l'avant , sinon vous ressortirez trempés ! » , prévient Tony. C'est par les soupiraux reconstitués de Marshalsea que commence l'attraction phare de Dickens World, « la Croisière des Grandes Espérances. », une quinzaine de minutes en bateau, des égouts douteux - un colorant marron, nous assure-t-on - jusqu'aux toits de la ville, traversée du cimetière comprise. « Aujourd'hui , tout est loisirs ! », s'enthousiasme Kevin Christie, le patron de Dickens World. Il espère atteindre les 300 000 visiteurs par an et attend d'ailleurs un coup de pouce décisif du passage dans quelques jours du Tour de France à deux pas d'ici.

    « Cela mettra notre région
    , qui en a besoin, sur la carte du monde » , se réjouit aussi Louise Dale, une infirmière. D'autres se montrent plus circonspects et craignent la saturation de ce coin du sud-est de l'Angleterre où l'on ne compte plus les références à l'auteur. « On a déjà un Dickens World : c'est Rochester ! » Chaque année, en juin, un festival y voit parader les dickensophiles, venus parfois d'Australie, du Japon ou d'Amérique un pays fou de l'écrivain : 60 % des visiteurs du Musée Dickens ( 1 ) de Londres sont américains.

    A l'étage, un film retrace l'épopée américaine de Charles, à qui l'acteur Gerald Dickens, l'arrière-arrièrearrière-petit-fils, prête sa voix. C'est le moment pédagogique de Dickens World, l'occasion d'apprendre, mais toujours en s'amusant ( la tête d'un condamné à mort vous arrive en pleine figure ...).« On a une idée fausse de Dickens ; on en fait quelqu'un de plus sérieux et intellectuel qu'il n'était . Il écrivait pour tous, était lu par tous, y compris les enfants . C'était une personnalité flamboyante, un showman plein d'humour » , explique l'écrivain Lucinda Hawksley, la cousine de Gerald.

    Dans le « Monde de Dickens », tout n'est pas parfait. Des techniciens vont et viennent, le bruit des perceuses couvre parfois la voix des apparitions dans la maison hantée où, devant un hologramme de chaise vide, les Mitchell attendent en vain que le fantôme veuille bien se montrer. Et le Britannia Theatre, un show de personnages mécaniques, n'est toujours pas opérationnel. « Les actionnaires ont mis la pression pour que l'on ouvre le 25 mai » , souffle une employée. « C'est un work in progress , concède Kevin Christie. On n'a jamais dit qu'on serait aussi spectaculaire qu'un Disneyland ; on n'a jamais promis qu'on serait aussi instructif qu'un musée . » L'ambition ici ? « S'amuser en acquérant quelques connaissances. » Le risque ? Décevoir l'amateur de sensations fortes et énerver le puriste.

    Dans son bureau à Londres, Andrew Xavier, le jeune directeur du Musée Dickens, se montre conciliant : « Tout ce qui peut contribuer à diffuser la vie et l'oeuvre de Dickens auprès des jeunes générations , qui, en juillet, vont se précipiter sur le dernier “ Harry Potter” , est le bienvenu. »
    « Dickens ? Bien sûr , j'ai vu tous ses films » , assure Billy, élève d'Ashford. On lui dédie ce mini-scoop : Robert Zemeckis, le réalisateur de « Roger Rabbit », prépare une adaptation du « Conte de Noël ». Que Hollywood vole au secours de Dickens, ça tombe bien : on annonce l'ouverture en 2009 d'un parc Harry Potter à Orlando, en Floride.

    ( 1 ) 48, Doughty Street, dans le quartier de Bloomsbury.

    Dickens World :
    Leviathan Way, Chatham Maritime,
    dans le Kent. Renseignements : www.dickensworld.co.uk.
    Pour y aller :
    Trains pour Chatham à partir de Victoria Station, Charing Cross et London Bridge. Entrée : 12,50 livres pour les adultes ; 7,50 livres pour les enfants.

     



    Marie-Hélène Martin

    Le Nouvel Observateur - 2226 - 05/07/2007

    Source:http://artsetspectacles.nouvelobs.com/p2226/a349248.html

  • Catégories : La littérature

    Le seul regret de Bernard Pivot

     NATHALIE SIMON.

     

     Publié le 20 juillet 2007

     

    Actualisé le 20 juillet 2007 : 08h08

    Bernard Pivot : « Avant, j'étais un peu désinvolte, parce que je comptais sur ma mémoire, là, je ne le pouvais plus. Il fallait que je bosse vraiment et que je m'applique. »

     

    Delort/Le Figaro.

     

    « JE NE VOUS AURAIS jamais reconnu et pourtant vous dites que nous nous sommes rencontrés de nombreuses fois ? », lâche Bernard Pivot qui nous reçoit dans l'appartement où il vient d'emménager dans le XVIIe arrondissement. « J'ai présenté»Apostrophes* pendant quinze ans et les gens sont persuadés que j'ai une mémoire phénoménale, mais je n'en ai pas du tout ! » Celui qu'on surnomme « le roi Lire » a hésité à évoquer un autre regret : celui de ne pas s'être assez souvent mis en colère.

     

     

     

    « J'ai toujours été une victime un peu souriante de ma mauvaise mémoire. Elle fonctionne très bien dans l'actualité, le moment, l'urgence et la fraîcheur. Après la lecture d'un livre par exemple, je peux retrouver pendant une huitaine de jours la page où telle phrase a été écrite. Quand j'animais une émission littéraire, je pouvais ainsi, avec une précision souvent redoutée des auteurs, retrouver tel passage dans tel ouvrage. Cela m'a toujours amusé de voir que les gens étaient impressionnés et croyaient que j'avais une mémoire extraordinaire. Mais au bout d'un moment, tous ces sentiments, ces images, nés de la lecture, disparaissent de mon esprit. »

     

     

     

    L'explication remonte à l'enfance du journaliste. « Après la guerre, j'ai eu ce qu'on appelle une primo-infection, la première attaque de la tuberculose. Ce n'était pas très grave, mais à ma stupéfaction, quand je suis revenu, je me suis aperçu que je n'avais plus la même mémoire. D'un seul coup, je me suis mis à peiner pour apprendre par coeur les fables de La Fontaine. Avant, j'étais un peu désinvolte, parce que je comptais sur ma mémoire, là, je ne le pouvais plus. Il fallait que je bosse vraiment et que je m'applique. »

     

     

     

    Le petit Bernard a grandi et est devenu le pape de la langue de Molière, l'animateur d'émissions mythiques comme « Apostrophes » (724 numéros) et « Bouillon de culture », qui lui ont donné la réputation de quelqu'un doué d'une mémoire hors du commun ! Depuis 2004, il est membre de la prestigieuse Académie Goncourt et ne craint pas de se comparer aux personnalités qu'il côtoie : « François Nourissier, Jorge Semprun, Françoise Chandernagor, Robert Sabatier ont tous une mémoire extraordinaire. Robert Sabatier peut vous réciter 2 000 ou 3 000 vers à la suite. Mon ami Philippe Meyer connaît, quant à lui, des centaines, des milliers de chansons sur le bout des doigts. Jean d'Ormesson, lui aussi, sort des citations comme moi je sortirais des chaussettes du tiroir de ma penderie. » Au quotidien, ce défaut joue des tours à l'ex-animateur. « Dans les articles ou les livres que j'écris, dès que je fais une citation, il faut que j'aille la vérifier parce que, deux fois sur trois, je commets une erreur. Parfois, ce problème a un avantage, il m'évite de tomber dans une sorte de facilité, de commencer un article par une citation, par exemple. »

     

     

     

    Quand on tente de rassurer Bernard Pivot - « Vous ne me reconnaissez pas, ce n'est pas grave » -, il répond qu'il en éprouve de la tristesse. Et se remémore (oui) des anecdotes savoureuses : « Un dimanche soir, sur l'aéroport d'Heathrow, à Londres - c'était du temps d'»Apostrophes* -, je vois un monsieur qui vient vers moi et me tend la main. Je me rends compte que je le connais, mais suis incapable de me rappeler qui il est. Il me demande : « Vous ne me remettez pas ? ». Je réponds « Non. » Il me dit : « Mais j'étais votre invité vendredi soir sur le plateau d'»Apostrophes*. »

     

     

     

    L'homme a évidemment appris à vivre avec son « handicap » : « Depuis une quinzaine d'années, je préviens les personnes que je rencontre que je ne les reconnaîtrai pas quand je les reverrai. Cela m'a donné mauvaise réputation. On croit que c'est du dédain, de l'orgueil. À la fin d'»Apostrophes* et de»Bouillon de culture*, nous avions l'habitude de rencontrer les invités. Anne-Marie Bourgnon, mon assistante, était toujours derrière moi pour me dire : « Attention, à gauche, c'est un tel, à droite, tel autre... ». En plus, après une émission, vous êtes un peu sonné et je reconnaissais encore moins les participants. Anne-Marie m'évitait de faire des gaffes, mais combien de fois j'ai blessé des gens à cause de ma mémoire défaillante, poreuse. J'oublie la vie tranquille, tout ce qui n'est pas marquant dans la joie ou le chagrin. C'est comme une infirmité. Avec l'âge, cela ne faut qu'empirer ! »

     

     

     

    À la fin de l'entretien, l'auteur du Dictionnaire amoureux du vin (Plon) se lève pour saluer et se précipite soudain sur un appareil photo : « Je vais vous prendre comme cela, je ne vous oublierai pas ! »

     

    Source:http://www.lefigaro.fr/reportage/20070720.FIG000000148_mon_seul_regret.html

  • Catégories : La littérature, Voyage

    Nicolas Bouvier ou l'essence du voyage

    5ccfe8001fa76d1889595c353b3ece8a.jpgLe livre culte de la littérature du voyage possède un nom, "L'Usage du Monde", et un auteur, Nicolas Bouvier. Dans "Indigo Street", les photos font écho aux phrases de l'écrivain, qui concentrent l'esprit du voyage.

    Indigo Street, sur les traces de Nicolas Bouvier

    Prilep, Macédoine. "Un voyage se passe de motifs. Il ne tarde pas à prouver qu'il se suffit à lui-même. On croit qu'on va faire un voyage, mais bientôt c'est le voyage qui vous fait, ou vous défait." (Nicolas Bouvier, L'Usage du Monde). Photo © Eric Rechsteiner
    Les écrivains-voyageurs (2)

     

    Nicolas Bouvier, le Suisse errant

     

     

     

    De Genève à Tokyo en passant par Ispahan, et de pannes de voiture en petits boulots, il sut oublier livres et horloges pour se laisser porter par les hasards de la route. Portrait un usager du monde et styliste admirable

     

     

     

     Dans les récits de Nicolas Bouvier passent parfois d'indomptables Américaines à chapeaux et caméras, de « l'espèce qui digère en une journée une douzaine de temples et une ou deux résidences impériales sans même sentir leur estomac ». Des Françaises en gants de fil, chagrines de ne s'être pas vu livrer, en même temps que leurs billets d'avion, « l'âme du Japon ». Des touristes en longues files résignées, attendant qu'un guide les « conduise au paysage », récriminants et dociles, pleins de mépris pour les autochtones, qui le leur rendent amplement. A ces activistes péremptoires et fébriles, Nicolas Bouvier a constamment opposé sa philosophie du voyage, édifiée sur les quatre piliers de l'ignorance, de la lenteur, du dénuement, de la fatigue.

    Vieux débat, celui de savoir s'il vaut mieux partir lesté de connaissances, ou dans un état d'ignorance bénie. Nicolas Bouvier dit ne pas vouloir se prononcer, mais sa pratique est éloquente. Quand il part, ce lecteur impénitent se soucie peu de se charger de livres. Il se contentera de ce que lui offriront, à l'étape, d'improbables bibliothèques, Stendhal à Téhéran et Dickens à Colombo. Il n'établit pas la liste des monuments à visiter, des points de vue célèbres à ne pas manquer. Sur ce que lui réserve le voyage, il s'interdit d'anticiper. « Voyager, c'est prévoir », avait dit Paul Morand. Rien de plus antipathique à Nicolas Bouvier, qui fait confiance à la surprise, à la rencontre, au hasard : à quoi bon savoir et prévoir, si on est empêché de voir ?

    A quoi bon encore se fixer des dates et des horaires, établir l'emploi d'un temps qu'il faut savoir perdre ? A tous les modes de locomotion qui se targuent d'en faire gagner, Nicolas Bouvier préfère la marche, moyen le plus sûr de s'approprier le monde à la semelle de ses souliers. En cheminant, « les paysages s'annoncent, se laissent percevoir et décrire avec la minutie d'une peinture flamande, et ne disparaissent pas sans crier gare ». Au rythme litanique des pas, mille détails sautent au visage, que l'homme pressé n'a aucune chance de capter : la couleur des fichus, l’odeur du pain, la taille des oignons, la forme des nids. A chaque pas, mille bifurcations s'ouvrent, mille contretemps contraignent à la halte. Les voyages de Nicolas Bouvier ont toujours été troués de pauses imprévues : à Tabriz, la neige l'a bloqué pendant six mois ; à Tokyo, c’est un séjour forcé à l’hôpital, et à Mahabad, celui dans une prison débonnaire. Le voyageur s'accommode de cette lenteur, et même la célèbre : « Tu te pousses à petite vitesse, un mois passe comme un rien. »

    Oublier le savoir des livres et le temps des horloges, c'est aussi rompre avec les commodités de l'existence ordinaire. Le père de Nicolas Bouvier avait averti le garçon en mal d'errance : il lui faudrait se débrouiller sur les routes, exercer partout les petits métiers de la survie. A chaque étape, il devrait trouver les quatre mètres carrés où poser sa paillasse, et gagner la pitance du jour. On le voit donc faire la plonge dans les soutes torrides du bateau des Messageries, tenir la caisse dans une troupe de baladins, graisser des ressorts dans un garage, vendre des dessins de nus, s'improviser photographe ambulant, jouer des valses musette dans les bars : tout cela pour trois œufs, deux chemises amidonnées, un esturgeon fumé. Parfois aussi, dans l'espoir de négocier une conférence pour l'Alliance française ou un article dans le journal local, il doit rendre visite aux autorités : il passe de la courette du chauffeur de taxi sikh qui le loge aux salons feutrés de l'ambassade, ludion sur l'échelle sociale. Que pèsent alors les statuts, les ambitions, les carrières ? Jour après jour, le voyageur se désencombre.

    Pour décrire cette marche au dénuement, Nicolas Bouvier use libéralement du lexique de la médecine (le voyage « décongestionne » et « purge »), de la lessive (le voyage « décape », « débarbouille », « essore », « étrille », « rince », « récure »), du cambriolage (le voyage « dépouille », « déleste », « détrousse »).

    Il arrive au dénuement de basculer dans la misère. Faim, fatigue, fièvre, folie même sont alors les mauvaises compagnes du voyageur. Nicolas Bouvier, pourtant, les juge parfois bénéfiques puisqu'elles sont des moyens de connaissance, d'illumination, voire de progrès spirituel : quand le corps est recru, les bandelettes du vieil homme tombent, des portes inconnues s’ouvrent. Mais on peut aussi y laisser sa vie et sa raison. Secoué par la malaria à Ceylan, dans une chambre termitière où le guettent des monstres à la carapace de chitine, où il sait pourrir, où il croit mourir, il frôle la démence : les soirs de lune, un jésuite fantôme, grand connaisseur de diableries, sort du pavé. Alors il s'interroge : pourquoi donc un gribouille comme lui va-t-il s’égarer sans profit dans des lieux aussi disgraciés ? Qui l'oblige à croupir dans l'étuve malsaine de Ceylan ? « Qu'est-ce que j'ai au monde à foutre ici ? »

    Par quel ressort, en effet, en vient-on au lâcher tout du voyage et au choix de conditions aussi rudes ? Un coup d'oeil sur les jeunes années de Nicolas Bouvier fait vaciller l'explication déterministe. Pas trace, ici, d'un malheur natif. Dans cette enfance, on ne trouve que la musique et les livres, la beauté des paysages, la tendresse de parents cultivés et polyglottes, les belles demeures d'été au bord du lac, barque sur la grève, bouquets sur le piano, ombres longues sur les pelouses, tintement des cuillers sur les tasses à thé, jolies cousines qu'on lutine sous la capote des calèches. Une brillante carrière universitaire attend l'adolescent, un beau mariage, tout ce que sa mère, dans les lettres qui l'attendent à la poste restante de Ceylan, lui rappelle avec une sournoise insistance, en évoquant le parcours des copains, « arrivés », eux, pendant qu'il partait, dûment mariés désormais et chargés de distinctions flatteuses.
    Rien ne semblait promettre le jeune homme rangé au staccato de cette vie étrange où l'errance ne s'arrêtera que pour raconter l'errance, puis embrasser des métiers incertains qui sont autant d'errances : devenu « iconographe » au retour de ses équipées, Nicolas Bouvier s’est fait chasseur d’images pour maisons d’édition, occupé à une collecte aussi hétéroclite, énigmatique et inépuisable que le butin rapporté des voyages.

    Peut-être peut-on apercevoir, malgré tout, quelques présages de la rupture avec une existence assise. L'enfant détestait la barrette sage dans ses cheveux, vivait l'école comme un éteignoir. Quelque chose en lui protestait contre la touche de raideur huguenote de l'éducation. Tout ce qui évoquait la carrière, ambitions, honneurs, médailles, lui semblait « appeler le cercueil ». A 12 ans, allongé sur le tapis avec un vieil atlas, le nez sur les cartes, il rêvait sur le vert olive des deltas, les bruns plissés des plateaux, et plus que tout sur les blancs mystérieux qui sa vie durant le rendront fou d'impatience. Les vignettes missionnaires de l'école du dimanche avec leurs jonques et leurs baleines, Jules Verne, Stevenson et les noms des villes inconnues le faisaient délirer. Et le fait d'être le citoyen d'un pays coincé dans son corset de montagnes a peut-être aussi joué sa partie dans la vocation pérégrine : la Suisse, comme on le sait peu, est une terre de nomades. Sous la solidité suisse, « ce comme il faut qu'on nous prête, vous trouverez cette quête incessante, ce mouvement brownien helvétique où se devine un fil d'incertitude et d'insatisfaction, une nostalgie qui ne se satisfait ni de présence, ni d'absence ».

    Pour ses premiers voyages, Nicolas Bouvier avait choisi les routes de l'Est. Le chemin du couchant, Irlande, Ecosse, Californie, Colombie-Britannique, il le prendra plus tard. Pour commencer donc, Yougoslavie, Macédoine, Afghanistan, Inde, Ceylan, Japon. Des pays où rien n'est mieux compris que le projet de voyager, constamment entouré de révérence, comme un emploi du temps du plus haut intérêt : « Que vous partiez pour échapper au poignard d'un cousin, visiter un lieu saint, vendre quelques balles de pistache ou satisfaire une curiosité importe peu, le trajet compte plus que les motifs. » L'Asie, mère de l'Europe, offre partout la profondeur de l'histoire, les traces écrites des ambassades, invasions, migrations, pèlerinages, négoces, le compagnonnage des vivants et des morts. Et la merveille paradoxale de cette profondeur est d'être alliée à la frugalité des êtres et à l'extrême dénuement des lieux.
    L'homme que la dérive du voyage a ramené à l'humilité se sent chez lui dans ces cantons dépouillés. Partout Nicolas Bouvier a élu les paysages déshérités, « les chemins qui ne vont nulle part, les paysages faits avec des chutes de paysages mieux foutus ». Il lui suffit, comme à Hokkaido, l'île du nord du Japon, de trois chevaux noirs sur le vert strident d'un pré plat, du brouillard, d'une mer grise sous le cri malveillant des corbeaux ; ou, au sud d'Ispahan, des berges d'une rivière tarie. Quand il ira vers l'ouest, ce sont encore les contrées où l'homme fait figure d'accident qu'il élira : tourbières désolées d'Irlande sous la balafre du vent, collines gorgées d'eau sous le ciel fou d"Ecosse. « Les lieux d’où un homme est quasiment absent nous piègent comme des miroirs aux alouettes. » Toute cette austérité a sa récompense : « Comme une eau, le monde vous traverse et vous prête ses couleurs. » Elle délivre le voyageur des souvenirs et des projets qui engourdissent ses sens et parasitent ordinairement sa vision. Elle libère l’attention, que Nicolas Bouvier, comme Alain jadis, tenait pour la plus haute des vertus intellectuelles. Le voici prêt, au long de la route, pour la collecte des images les plus fraîches :  « Les pousses gonflées du tabac, l’oreille soyeuse des ânes, la carapace des jeunes tortues » ; les plus cocasses : dans la rue de Prilep, la boutique du marchand de cercueils jouxte celle du marchand de fusils, son frère, dont le commerce soutient le sien ; les plus efficaces : devant la porte d’un troquet afghan dont les samovars fument, un tronc d’arbre couché contraint la voiture à s’arrêter net, péremptoire argument publicitaire ; les plus insolites : au cimetière de Belgrade, croix de perles violettes et lampions font signe vers un au-delà, sur des tombes que l’étoile rouge frappe d’un emblème lourdement terrestre.

    Et il y a encore la merveilleuse diversité des visages. Sur les routes de l’Est, Nicolas Bouvier était devenu photographe. Il fallait vivre, il est plus facile de faire argent d’une photo que d’un texte, et comme les gens qui l’entouraient n’avaient que leur tête à offrir et étaient disposés à payer le travail en nature, il s’était fait portraitiste. Il avait appris les ficelles du métier : s’effacer, se faire le simple quidam qui passe par là, se taire, attendre l’instant où les émotions et les rêves réprimés affleurent aux visages, bondir alors sur l’instant décisif. Ce savoir-faire s’est communiqué à ses portraits écrits. Voici son copain Thierry Vernet, retrouvé à Belgrade derrière le rideau crocheté d’un café :  « Un jeune requin folâtre et harassé avec ses ailerons sur les oreilles et ses petits yeux bleus. » Voici l’important directeur de l’Institut franco-iranien et la rosette qui sur son veston noir « brillait comme un petit œil irrité ». Et voici encore un visage pompeux, « comme une porte à fronton derrière lequel on devine le filet de vie intérieure d’une courette ».

    Voir n’est encore rien en effet si on ne sait deviner. Derrière la profusion et le tumulte des signes, la présence d’un autre monde est constamment sensible dans la prose précise de Nicolas Bouvier. Il avait, il est vrai, choisi des pays où rôdent les forces irrationnelles : l’Asie des exorcistes, jeteurs de sorts, diseurs de bonne aventure qui détalent, pris de panique, à la seule vue d’une main aux lignes inquiétantes ; l’Irlande du « Side », ce monde souterrain, peuplé de visiteurs de l’ombre aux intentions suspectes. Mais l’extraordinaire peut loger aussi bien dans un paysage d’apparence banale : il suffit d’un roc que la foudre a fendu, d’une souche de cornouiller. Certains paysages ont une charge sacrale, une gravité particulière, une vertu maléfique ou thérapique ; ils recèlent une menace, ou une promesse. Et Nicolas Bouvier, pour les déchiffrer, fait confiance à la pulsion vitale qu’a aiguisée en lui le voyage : il y a des lieux à l’air malfaisant, où on file un mauvais coton, d’où il est urgent de déguerpir. Il y a, en revanche, des lieux qui vous font entrer en lévitation et paient d’un coup le voyage, « où le mot de bonheur paraît bien maigre et particulier pour décrire ce qui vous arrive ».

    Il n’était pas parti sans espoir de retour. Dès son premier voyage d’adolescent, son père lui avait imposé la contrainte d’avoir à raconter. Il savait qu’il devrait, après les grands espaces, se colleter avec les mots. Il avait toujours aimé l’habileté artisane, les trucs du métier, les tours de main réussis qu’on souligne d’un « et voilà le travail ! » triomphant. Sur l’édredon bleu de la chambrette irlandaise où le clouait la fièvre, il contemplait affectueusement ses mains tavelées qui avaient tenu mille emplois, « bricolé des carburateurs et des arbres à cames, fait la plonge, tenu l’accordéon dans un bar de Quetta, caressé force matous puceux et quelques dames ». Il en a usé avec les mots comme avec les choses, pratiqué sur eux un long, un épuisant bricolage ; les forgeant comme des clous ; les tisonnant sans relâche pour leur faire rendre un peu de couleur ; les considérant souvent avec suspicion comme tous ces mots en « aque », arnaque, barbaque, « liés par un fil de poisse » ; heureux, parfois, de découvrir un mot « frais comme un œuf sur la paille ». Il a parfois regretté cette application maniaque, souhaité avoir plus de désinvolture. Il a tort : pour son lecteur, le charme de cette écriture, comme de l’homme, tient à l’alliage rare de la précision et du lyrisme, de la profusion et de l’ascétisme, du prosaïque et du merveilleux, de la rigueur et du tremblement, du burlesque et de l’angoisse. Celle-ci n’est jamais absente des écrits de Nicolas Bouvier. Le voyage et la mort ont de temps immémorial partie liée, et il aurait volontiers dit que voyager, plus sûrement que philosopher, c’est apprendre à mourir. Se mettre en route, c’est nécessairement penser à l’ultime dénouement, qui accompagne comme une basse les pas du voyageur. S’il aime tant Hölderlin, Michaux, Lorca, et davantage encore la nudité liturgique des poèmes d’Akhmatova, c’est que tous rendent palpable l’approche de ce qu’il appelle la « dernière douane ». Il ne faudrait pourtant pas croire que la méditation de la mort engendre chez lui le désespoir, car « derrière ce dénouement terrifiant, au-delà de ce point zéro de l’existence et du bout de la route, il doit encore y avoir quelque chose ». En attendant cette révélation dernière, la mort « invite à ouvrir l’œil, dresser l’oreille, froncer le nez comme un lapin, à prendre au plus court, à ne rien perdre de la cambrure des femmes, de l’odeur du chèvrefeuille, du fumet d’un gigot, ou du chant du loriot ». Sans son obscure présence, on ne pourrait goûter l’allégresse d’être au monde, ce miracle élémentaire que célèbre l’œuvre amicale de Nicolas Bouvier. 


    Nicolas Bouvier est né en 1929 près de Genève, où il est mort en 1998. Il a reçu de nombreux prix, dont ceux de la critique (1982) et des belles-lettres (1986), le prix Louis-Guilloux (1991) et le grand prix Ramuz (1995).

    A LIRE
    • « L’Usage du monde », Payot, 364 p., 10,40 euros.
    • « Le Poisson-scorpion », Gallimard, « Folio », 172 p., 5,10 euros.
    • « Chronique japonaise », Payot, 228 p., 9 euros.
    • « Journal d’Aran et d’autres lieux », Payot, 182 p., 7,30 euros.
    • « Dans la vapeur blanche du soleil. Les photographies de Nicolas Bouvier », Zoé, 212 p., 37 euros.
    • « Œuvres », préface de Christine Jordis, dessins de Thierry Vernet, Gallimard, « Quarto », 1 428 p., 30 euros.

     

     

     

    Mona Ozouf

     

    Le Nouvel Observateur - 2228 - 19/07/2007

     

     

     

    http://artsetspectacles.nouvelobs.com/p2228/a350322.html

     

     

     

  • Catégories : Mes textes en prose

    Baudelaire et les femmes 5. Le visage de madame Sabatier

    dc733a536130dc33230a83337b38258d.jpg Dans mon mémoire de maîtrise,  

     « Le paysage dans les œuvres poétiques de Baudelaire et Nerval »  

     (en vente sur Lulu : http://stores.lulu.com/store.php?fAcctID=617288)  

     Dans la 1 ère partie consacrée à la poétique du paysage,  

    La symbolisation du paysage  

    2.2. La sexualisation du paysage dans « Les Fleurs du Mal »      

    2.2.3. Le visage

     

             

    Madame Sabatier est comparée dans A celle qui est trop gaie à un « beau paysage » (v. 2) et « Le rire joue en ton visage / Comme un vent frais dans un ciel clair. »(v. 3-4)  Mais le spleen  (/« mélancolie », étymologiquement : « humeur noire », c’est-à-dire « venin » ( Ed. du « Club du Livre », Yves Florenne, t. I, p. 1031 », cité par A. M Amiot, « Baudelaire et l’illuminisme, notes, p. 252 » est présent :

     

      Et, vertigineuse douceur !                                                                                                        

     

    A travers ces lèvres nouvelles,                                                                                            

     

    Plus éclatantes et plus belles,                                                                                      

     

    T’infuser mon venin, ma sœur ! (v. 33-36)    

    Cette allégorie – comme beaucoup d’autres des FM- a été mal comprise : « Les juges ont cru découvrir un sens à la fois sanguinaire et obscène dans les deux dernières stances. La gravité du recueil excluait de pareilles plaisanteries. Mais venin signifiant spleen ou  mélancolie est une idée trop simple pour des criminalistes. Que leur interprétation syphilitique leur reste sur la conscience (Note de l’éditeur en bas de page, cité par A. M Amiot, op. cit. , p. 252.) » L’interprétation syphilitique est du fait de Baudelaire !

     

      Source de l’image :        http://baudelaire.litteratura.com/?rub=vie&srub=per&id=11
  • Catégories : Des femmes comme je les aime, La littérature

    Littérature:Le seul regret de Régine Deforges

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    Scarlett Coten pour Le Figaro

    MOHAMMED AÏSSAOUI. Publié le 19 juillet 2007Actualisé le 19 juillet 2007 : 08h22

    Chaque jour, une personnalité du monde de la politique, des arts, du sport et de l'économie se confie. Aujourd'hui, la romancière Régine Deforges.




    UNE SECONDE à peine. Régine Deforges n'a pas eu à réfléchir bien longtemps quand on lui a demandé quel était son seul regret. Dès la question posée, elle lance : « Ce petit copain que j'ai laissé sur le bord de la route. » Puis, elle enchaîne, comme si elle avait trop retenu ses mots, l'émotion étant perceptible dans sa voix : « J'avais six ans. Nous étions en vacances à Peyrac (dans le Lot). J'avais proposé à ce garçon de faire une excursion avec nous au gouffre du Padirac. Il est venu. Mais il n'a pas pu monter avec nous dans la voiture qui nous emmenait - il y avait trop de monde dans le véhicule. J'aurais voulu qu'il monte avec nous, mais ce n'était pas possible. » C'était en 1942 ou 1943. L'auteur de La Bicyclette bleue ajoute : « Je ne l'ai plus jamais revu. Je n'aurais sans doute pas eu de regret s'il n'avait pas été juif et appartenu à une famille de réfugiés. »


    L'étonnant est que, plus de soixante-quatre ans après, elle se souvienne avec autant de précision de cette promesse non tenue. Cela arrive à tout le monde ; et les enfants ont tendance à vite oublier. On a beau lui rétorquer qu'elle n'y était pour rien, elle insiste : « C'est plus qu'un regret, c'est un remords, un sentiment d'abandon, de trahison. » De plus, ce petit garçon n'était pas abandonné, il vivait, réfugié, avec sa grand-mère à Peyrac (qui, elle, n'était pas juive). Et une fille de six ans pouvait-elle s'imaginer ce qui se passait en France et en Europe et sentir à ce point le poids de la culpabilité ? « Oui, même à cet âge-là, même à cette période-là, on avait conscience de ce qui se tramait. D'autant que, lorsque mes parents recevaient des amis juifs chez eux, ils nous disaient « ne dites pas que tel ou tel est venu chez nous ». » On sentait qu'il se passait « quelque chose ».


    Si elle ne souvient pas bien de l'année (1942 ou 1943), Régine Deforges raconte aujourd'hui la scène dans les moindres détails : « C'était l'été. Il faisait très beau. Il s'appelait Clovis, il était blond, en habits de dimanche, très bien coiffé, la raie soigneusement mise. Il devait avoir deux ou trois ans de plus que moi. » Elle se rappelle parfaitement avoir insisté pour que ses parents emmènent le garçon avec elle, lui aussi voulant rejoindre la voiture - un moyen de transport rare à l'époque. Sa mère avait même dû descendre pour expliquer au petit que ce n'était pas possible. « Maman s'est alors approchée de lui et lui a dit qu'elle ne pouvait pas l'emmener. Trop de monde dans la voiture : il y avait des adultes, ma soeur et moi. » L'automobile est partie sans le petit garçon : « Je n'ai pas cessé de me retourner, je voyais sa silhouette disparaître petit à petit. Cet épisode m'a bouleversée », dit-elle.


    Ces souvenirs lui restent fixés à jamais, comme une photo. En fait, ce qui a blessé l'auteur de Noir tango, c'est davantage ce décalage entre un moment de bien-être promis à ce garçon qu'elle ne connaissait pas et le fait de devoir le laisser tout seul avec sa tristesse. « Depuis, je me méfie de mes enthousiasmes », explique cette mère de trois enfants. Du coup quand elle propose quelque chose de sympathique à des amis, il lui reste toujours un fond d'inquiétude. L'angoisse du bonheur.


    Il y a une quinzaine d'années, elle a parlé de Clovis lors d'une émission télévisée dans l'espoir de le retrouver. Quand elle a commencé à l'évoquer, l'auteur du Diable en rit encore n'avait pu retenir ses larmes... Cette collectionneuse de romans noirs est également retournée à plusieurs reprises à Peyrac, à la recherche du moindre indice qui aurait pu la mettre sur la trace de Clovis - elle ne connaissait de lui que ce prénom. Au village, personne ne se souvient de ce petit garçon. La maison de sa grand-mère est à l'abandon.


    Elle en a fait du chemin, depuis 1942 ou 1943, la petite Régine. Libraire, éditrice remarquée, romancière populaire, auteur d'une des plus grandes sagas de l'édition française, membre d'un jury littéraire prestigieux (dont elle a démissionné avec fracas), présidente de la Société des gens de lettres, chargée de mission auprès du ministre de la Culture... Tous ces titres ne lui font pourtant pas oublier l'épisode de ce petit garçon privé d'excursion au gouffre de Padirac.


    Aujourd'hui, Clovis devrait avoir plus de soixante-dix ans. Et s'il se reconnaissait dans cette histoire, et lui faisait signe ? « Oh ! oui. Ce serait un merveilleux cadeau. Je pourrais lui demander pardon. »


    Source:http://www.lefigaro.fr/reportage/20070719.FIG000000146_mon_seul_regret.html